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«Je suis devenu plus intense, plus revendicateur», lance Markantoine

Un mois après une agression qu'il qualifie d'homophobe à Charlevoix, le designer soutient une grande tournée pour démystifier les réalités LGBT+ en région.
Le designer Markantoine Lynch-Boisvert dit avoir été la cible d'une agression homophobe cet été dans Charlevoix.
Camille Laurin-Desjardins/HuffPost Québec
Le designer Markantoine Lynch-Boisvert dit avoir été la cible d'une agression homophobe cet été dans Charlevoix.

Quatre semaines après l’agression homophobe dont il dit avoir été victime à la sortie d’un bar de Charlevoix, le designer Markantoine Lynch-Boisvert se porte un peu mieux. Il était ressorti de l’incident avec deux commotions cérébrales et trois fractures au visage. Mais il est toujours habité par une colère, indigné qu’un tel acte puisse encore avoir lieu en 2019. Pour lui, il n’y a qu’une solution pour éviter que ce genre de cauchemar ne se reproduise: l’éducation.

C’est pour cette raison qu’il a accepté d’appuyer le GRIS, cet organisme qui fait de la sensibilisation à propos des réalités LGBT+ dans les écoles. Depuis 25 ans, des bénévoles se rendent dans des classes pour se présenter et, surtout, pour répondre aux questions des jeunes. Jeudi matin, l’organisme annonçait un projet spécial pour souligner son 25e anniversaire: il entreprendra une tournée de la province, pour desservir les coins qui ne le sont pas actuellement, comme le Saguenay-Lac-Saint-Jean, le Bas-Saint-Laurent, la Côte-Nord et le Nord-du-Québec.

«L’éducation, c’est quelque chose qui me tient à coeur, insiste Markantoine. Je suis moi-même enseignant (au Collège Lasalle) et je pense que la transphobie, l’homophobie, le racisme... tout ça, si on veut le combattre, ça passe par l’éducation.»

Pendant l’année scolaire qui vient de débuter, le GRIS-Montréal va établir des partenariats avec les écoles en région qui souhaitent recevoir la visite d’intervenants. Le projet se concrétisera pendant les deux années suivantes. Le GRIS espère ensuite pérenniser ce partenariat en région.

Des modèles

«On sait que c’est difficile, quand il y a très peu de modèles LGBT+, les jeunes se sentent seuls, souligne la présidente du GRIS-Montréal, Catherine Duclos. On veut leur donner des modèles et des histoires auxquelles ils peuvent se raccrocher. Pour leur donner espoir que leur futur sera positif.»

C’est d’ailleurs ce qui fait le succès de la démarche de l’organisme: des vraies histoires.

«Il ne s’agit pas juste d’éduquer avec des statistiques, ajoute Mme Duclos. On leur raconte nos vies, on leur parle honnêtement d’amour, de sexualité, de ce que c’est, être un adulte heureux et comblé dans la vie, qui contribue à la société.»

Une agression qui a fait grand bruit

L’affaire avait été très médiatisée après que le designer l’eut dénoncée sur les réseaux sociaux: au mois d’août dernier, alors qu’il était en fin de semaine d’amoureux à Charlevoix, il s’était fait battre violemment.

Un suspect a maintenant été arrêté dans cette affaire et la Sûreté du Québec poursuit son enquête afin d’éclaircir les circonstances de l’agression.

Markantoine affirme avoir d’abord assisté à une altercation entre un employé du bar où il se trouvait et un client, qui traitait le premier d’«esti de fif».

Markantoine affirme être sorti avec son copain, ne voulant pas s’en mêler. Puis, dehors, le même client l’aurait interpellé avec la même insulte. Au moment où Markantoine lui aurait demandé quel était son problème, l’homme aurait répliqué avec un violent coup de tête. Le designer aurait tenté de répliquer, mais de nombreuses personnes auraient alors séparé les deux hommes.

“Ç’a comme allumé une flamme en dedans de moi. En fait, elle était déjà allumée, mais là, elle brûle à 100%.”

- Markantoine

Markantoine est parti à pied avec son copain, et c’est un peu plus loin que le même homme, accompagné de quelques amis, les auraient rattrapés. Ils l’auraient alors frappé à coups de pied.

«Je me souviens d’avoir entendu un des gars dire à l’autre d’arrêter, parce qu’il allait me tuer», précise-t-il.

Il se remet tranquillement de ses commotions cérébrales, mais affirme avoir dû retarder d’un mois sa prochaine collection. Il prévoit d’ailleurs offrir au GRIS-Montréal une partie des profits réalisés avec la vente de ses billets.

Cette expérience traumatisante ne l’a pas rendu craintif pour autant.

«Je ne suis pas quelqu’un de peureux en général, dans la vie. Je ne suis pas devenu plus craintif, je suis devenu plus intense, plus revendicateur. Ç’a comme allumé une flamme en dedans de moi. En fait, elle était déjà allumée, mais là, elle brûle à 100%.»

Le designer a appris hier que le suspect arrêté a deux enfants. «Mon souhait, c’est que ses deux enfants reçoivent la visite du GRIS dans leur classe, pour qu’ils deviennent de meilleurs êtres humains que leur père», conclut-il.

Campagne de financement

Le GRIS a également démarré ce matin une ambitieuse campagne de financement pour pouvoir réaliser ses projets, dont l’objectif est de 500 000$.

Le comédien Vincent Bolduc, porte-parole de l’organisme depuis 2008, a affirmé qu’il n’avait jamais autant ressenti l’urgence de parler de ce que fait le GRIS-Montréal. Il est lui-même souvent en colère chaque fois que des agressions ou des boutades homophobes font surface dans les médias.

«L’arme la plus concrète que j’ai trouvée, c’est que chaque fois que je vois un geste violent ou une parole mal placée, je vais donner cinq ou dix dollars au GRIS, (...) pour pouvoir envoyer ces guerriers lumière sur le terrain», a-t-il lancé.

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