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Les partis politiques ne sont pas des églises

Choisir un parti politique en fonction des chances que l'on a de contribuer à la hauteur de son talent est une raison tout aussi valable qu'une autre.
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Le personnage politique qui a déjà représenté ou voté pour un autre parti ne devrait pas faire face à des inquisitions.
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Le personnage politique qui a déjà représenté ou voté pour un autre parti ne devrait pas faire face à des inquisitions.

Au cours de la saison estivale, plusieurs anciens candidats, députés, et au moins un ancien ministre du Parti québécois ont déclaré leur intention de se présenter aux élections provinciales québécoises d'octobre prochain, mais cette fois-ci sous la bannière de la Coalition avenir Québec.

On en a fait un certain cas dans les médias sociaux et, comme l'on pouvait s'y attendre, des membres du camp fédéraliste n'ont pas tardé à faire observer que le nombre de transfuges du PQ à la CAQ ne pouvait signifier autre chose que cette dernière est, elle aussi, un parti souverainiste. On le sait, les démentis ont suivi de la part du chef de ce parti, celui-ci ayant essentiellement déclaré son attachement au Canada.

Or, cet épisode était à peine terminé que des rumeurs se sont mis à circuler, voulant que madame Gertrude Bourdon, présidente-directrice générale du Centre hospitalier de Québec, fasse le saut en politique pour se joindre à la CAQ. On connaît la suite: madame Bourdon a annoncé qu'elle ne représenterait pas ce parti, puis le Parti libéral du Québec a tôt fait de celle-ci sa candidate dans la circonscription Jean-Lesage.

C'est quelque chose qui ressemble à un procès pour apostasie que certains font à madame Bourdon par les temps qui courent.

Si l'on croyait que le passage de quelques péquistes à la CAQ avait provoqué une tempête, on n'avait encore rien vu. Car c'est quelque chose qui ressemble à un procès pour apostasie que certains font à madame Bourdon de nos jours. Journal de Montréalet Journal de Québec en tête, leurs chroniqueurs Fatima Houda Pépin, Michel Hébert et Joseph Facal entre autres, ont tour à tour publié des articles parfois incendiaires à son sujet.

Il est vrai que la qualité comme le prestige de la candidature de madame Bourdon, de même que le fait qu'elle soit ministrable à la santé avait de quoi exciter des médias et chroniqueurs connus d'avance pour leur tendance antilibérale / anti-Couillard. Toutefois, en filigrane, au sein des attaques prévisibles à saveur partisane, une autre mérite notre attention.

Il s'agit de celle qui porte sur la soi-disant apostasie de madame Bourdon. Celle-ci aurait en effet commis le crime de «changer» de parti politique. Pire encore, elle a eu des échanges avec deux formations politiques différentes et, ô infamie, à quelques jours d'intervalle. G comme... girouette, titrait une toute récente chronique du Journal de Montréal.

On conviendra que, dans notre culture, changer de parti politique n'est pas bien vu.

On conviendra que, dans notre culture, changer de parti politique n'est pas bien vu. D'ailleurs, l'expression populaire vire-capot, qui ne date pas d'hier, l'illustre bien. On est en quelque sorte dans le domaine des idées reçues. Or, je crois que nous vivons à une époque où cette idée doit être mise au rancart.

Est-il juste de soumettre des femmes et des hommes politiques à des attentes foncièrement irréalistes du genre de celle dont il est question ici? Plus précisément, pourquoi reprocherait-on à un personnage politique représentant un parti en 2018 d'avoir adhéré à un autre parti dans le passé, ou encore d'avoir voté pour un autre parti à un moment ou à un autre? Si l'accord entre les positions politiques d'un individu et celle d'un parti change, il est tout à fait normal, voire souhaitable, de passer à un parti avec lequel on devient davantage à l'aise au fil du temps.

Les hommes et les femmes politiques devraient avoir, tout comme les autres citoyens, cette prérogative. On traite trop souvent, peut-être inconsciemment, les partis politiques comme des églises. On en serait membre à la vie, à la mort, alors que dans le cas des églises on est passablement plus à l'aise qu'auparavant avec le fait de changer de tradition ou de voie religieuses. Tout récemment encore, on scrutait le passé d'une possible candidate libérale dans le but de débusquer le fait qu'elle aurait voté oui en 1976! Franchement...

Il y aura toujours de la place en politique pour des gens dont les convictions sont telles, que tout au long de leur carrière, un seul parti leur conviendra.

Il y aura toujours, bien sûr, de la place en politique pour des gens dont les convictions sont telles, que tout au long de leur carrière, un seul parti leur conviendra. Toutefois, d'autres modèles devraient aussi avoir droit de cité. Le personnage politique qui a déjà représenté ou voté pour un autre parti ne devrait pas faire face à des inquisitions.

De même, on devrait être capable de voir d'un bon œil des candidates et des candidats potentiels qui discutent avec plus d'un parti politique avant d'arrêter leur choix sur l'un d'entre eux. Somme toute, choisir un parti politique en fonction des chances que l'on a de contribuer à la hauteur de son talent est une raison tout aussi valable qu'une autre.

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