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Le Canada, ses réfugiés et le monde

Le gouvernement conservateur de Stephen Harper semble se soucier plus de l'exploitation des mines que des conflits politiques et miliaires engendrés par les milices qui se combattent pour contrôler les ressources naturelles.
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En parlant à certains de mes amis qui sont des réfugiés politiques au Québec, plusieurs m'ont fait part de cette idée, ou, devrais-je dire, de ce préjugé selon lequel le Canada serait le pays qui accueille le plus grand nombre de réfugiés, et qu'ils y sont plus choyés que dans les autres pays de L'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

Rassurez-vous, ils sont évidemment mieux traités ici que dans leurs pays d'origine, souvent en état de guerre.

Mais cette idée est fausse. Le Canada n'accueille pas le plus grand nombre de réfugiés au monde. Cependant, le ministère joue avec les chiffres pour faire de la politique partisane. Pour cela, il peut nous présenter des chiffres selon certaines catégories, en faisant fi des autres catégories, comme :

  • Réfugiés parrainés par le gouvernement (RPG)
  • Réfugiés parrainés par le secteur privé
  • Personnes à charge des réfugiés
  • Demandeurs d'asile (de la catégorie des résidents temporaire selon si reconnu comme réfugiés au sens de la convention des nations unies de 1951 et le protocole afférent de 1967)

Il est à noter que seuls les réfugiés pris en charge par le gouvernement canadien reçoivent un montant unique d'aide de 1330 $, pour aider à payer la nourriture, le mobilier, les articles ménagers et les vêtements. L'argent n'est jamais octroyé directement aux réfugiés, mais à un organisme communautaire.

Le Canada est un pays d'immigrants et possède une longue tradition d'accueil des réfugiés et des opposants de tous les pays. En 1986, l'ONU a décerné au peuple canadien la médaille Nansen en « reconnaissance de leur contribution majeure et soutenue à la cause des réfugiés».

Plus de 45,2 millions de personnes ont fui leur pays ou ont été déplacées à l'interne en 2012. La guerre reste la principale cause des déplacements, dont plus de la moitié sont survenus dans cinq pays, soit l'Afghanistan, la Somalie, l'Irak, la Syrie et le Soudan. Le nombre de demandeurs l'asile à des pays tiers ne cesse d'augmenter. Environ 893 700 requêtes ont été présentées en 2012. Dans l'ensemble, les pays en développement abritent 81% des réfugiés dans le monde, contre 70% il y a dix ans. Il est donc faux de dire que l'occident absorbe les flux migratoires.

Revenons au Canada. Plusieurs organismes dénonçaient l'inaction du gouvernement conservateur. Les chiffres recueillis démontrent que le nombre de réfugiés venus s'installer au Canada en 2012 est en baisse de 26 % comparativement à 2011, même si le gouvernement répète qu'Ottawa tente d'accroître ce nombre de 20 %. Ce déclin est attribuable à la fermeture de bureaux d'émission de visas en Syrie, car le Canada a rappelé ses employés à cause de la guerre civile internationalisée qui y règne depuis 2011. Les diplomates des bureaux en Syrie traitaient les demandes provenant de la grande région du Moyen-Orient. Cette décision est compréhensible. Cependant, le gouvernement montre son insouciance devant les engagements du Canada dans ce dossier, puisqu'il aurait dû ouvrir des missions temporaires en Jordanie, près des camps de réfugiés, notamment le camp de al-Zaatari.

Combien de réfugiés le Canada accepte-t-il?

En 2012, 5 412 réfugiés ont été parrainés à partir de l'étranger par le gouvernement fédéral. Comme mentionnés ci-haut, d'autres groupes peuvent aussi parrainer des réfugiés. Les groupes privés, les Églises et d'autres organismes de bienfaisance ont parrainé 4 212 réfugiés additionnels.

En 2012, nous notons environ 33 246 réfugiés qui ont fait une demande d'asile, alors qu'ils se trouvaient à l'intérieur des frontières canadiennes. De ce nombre, d'après le site internet d'immigration Canada, la Commission de l'immigration et du statut de réfugié a accepté d'étudier 29 000 demandes, parmi lesquelles 42 % ont été acceptées. 3 800 autres demandes ont été abandonnées, soit parce qu'elles ont été retirées ou parce que la situation a été résolue. En fin d'année, 32 600 demandes étaient en suspens.

Qu'en est-il des budgets et des répercussions économiques?

Ce sont les pays pauvres qui supportent le plus gros fardeau d'aide apportée aux réfugiés et aux déplacés. Pendant ce temps, les Occidentaux sont de moins en moins accueillants et l'hostilité à l'égard de la population réfugiée s'accroît. On parle d'invasion, de profiteurs du système, etc. Notamment envers les Maghrébins en Italie, en Espagne et en France, ou encore envers les Européens de l'Est.

Le mois dernier, nous avons quand même remarqué une solidarité envers les naufragés de Lampedusa, que l'Italie accueille, mais sans une solidarité réelle tant sur le plan monétaire qu'humaine. Ces drames remettent en relief l'hypocrisie institutionnelle de l'Union européenne, qui n'est solidaire que lorsque les états financiers des banques sont en difficultés.

Le Pakistan, par exemple, supporte les plus lourdes répercussions économiques avec 710 réfugiés pour un dollar de son PIB par habitant (en parité de pouvoir d'achat), suivi de la République démocratique du Congo et du Kenya avec respectivement 475 et 247 réfugiés.

En comparaison, l'Allemagne, le pays industrialisé qui accueille la plus importante population réfugiée (594 000 personnes), héberge 17 réfugiés pour un dollar de son PIB par habitant (source UNHCR). Cela risque d'évoluer avec les événements en Libye, en Syrie, en Tunisie, en Côte d'Ivoire, au sud du Soudan et en Érythrée. Les conflits de ces pays ont déplacé encore plus de personnes qui ne sont pas encore prises en compte dans les rapports de 2013.

Qu'en est-il chez nos voisins américains?

Ils sont fiers de la tradition d'accueil des immigrants et des réfugiés. Leur programme de réinstallation des réfugiés est le plus accueillant en nombre parmi les pays occidentaux (85 000 demandes d'asile). En Europe, l'Allemagne est en tête avec plus de 64 500 demandes, suivie par la France avec 54 900 et la Suède, qui est quand même géographiquement loin, avec 43 900 réfugiés.

Depuis 1975, les Américains ont accueilli près de 3 millions de réfugiés en provenance des cinq continents. Il faut noter que les États-Unis reçoivent 43% moins de réfugiés qu'il y a 20 ans. Pour l'ensemble de la période 1990-2010, on enregistre une moyenne annuelle de 493 732,9 réfugiés. C'est en 2006 qu'on enregistre le plus grand nombre (843 490) et c'est en 2010 qu'on enregistre le plus bas (264 574).

Enfin, nous devons faire une révision nationale de nos valeurs canadiennes afin de ne pas les réajuster par rapport aux politiques que mène le gouvernement conservateur. Ce dernier semble se soucier plus de l'exploitation des mines que des conflits politiques et miliaires engendrés par les milices qui se combattent pour contrôler les ressources naturelles. Accueillir un plus grand nombre de réfugiés est un objectif noble en soi, mais les intégrer via des politiques économiques internes qui se doivent d'être socialement généreuses, serait encore mieux. Les pays occidentaux se doivent de renégocier les vieilles conventions qui régissent les flux migratoires et les statuts de réfugiés qui datent des années '50. La réalité de la mondialisation a changé les donnes.

Le but de ce billet est de faire passer le message que l'accueil n'est pas uniquement sous la responsabilité des États, mais aussi des individus habitant ces pays favorisés. Si vous connaissez des immigrants, réfugiés ou non, invitez-les à venir boire un verre et à manger un steak chez vous. Soyez accueillant, Et pas seulement à Noël...

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