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Je me présente, Sonia Di Capo. Jeune femme de 35 ans, souvent confinée au lit, ou à tout le moins, presque toujours chez moi, après 13 ans d'exposition aux moisissures. La vie me promettait un brillant avenir après avoir étudié en sciences, en littérature, en musique et en danse, toujours en me distinguant par ma passion et mon désir de réussir. Mais le sort en a voulu autrement. Entre 1995 et 2008, je suis progressivement devenue très malade. Je ne me doutais pas que le logis qui me protégeait du vent et des tempêtes m'empoisonnait lentement, mais sûrement. Les moisissures y étaient cachées entre les murs de ma chambre à coucher.
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Ils sont nombreux ceux qui croient encore que les moisissures ne sont pas dangereuses à moins d'être asthmatique ou d'avoir déjà un pied dans la tombe. Même parmi les professionnels de la santé. Mais les moisissures, aussi petites soient-elles, laissent parfois de lourdes séquelles à ceux et celles qui les ont respirées longtemps.

Je me présente, Sonia Di Capo. Jeune femme de 35 ans, souvent confinée au lit, ou à tout le moins, presque toujours chez moi, après 13 ans d'exposition aux moisissures. La vie me promettait un brillant avenir après avoir étudié en sciences, en littérature, en musique et en danse, toujours en me distinguant par ma passion et mon désir de réussir. Mais le sort en a voulu autrement. Entre 1995 et 2008, je suis progressivement devenue très malade. Je ne me doutais pas que le logis qui me protégeait du vent et des tempêtes m'empoisonnait lentement, mais sûrement. Les moisissures y étaient cachées entre les murs de ma chambre à coucher.

Pendant 13 ans, j'ai cherché la cause de mes symptômes dont l'existence même était souvent niée par les médecins. Quand on ne me renvoyait pas du revers de la main, on m'aiguillait vers toutes sortes de médicaments inadéquats, donc destructeurs, accélérant souvent la détérioration de ma santé.

Autrefois, on m'appelait le volcan ou la tornade. Aujourd'hui, je me lève souvent accablée d'une fatigue insurmontable et dois faire preuve d'abnégation devant presque tous mes désirs. Les symptômes touchent tous mes systèmes : nerveux, hormonal, digestif, immunitaire, musculo-squelettique, etc. Je suis désormais gravement sensible ou intolérante à tous les aliments, aux produits chimiques et aux médicaments. Toute prise d'aliment sans une supplémentation très coûteuse (1000 $ par mois, juste pour ma survie) provoque une cascade de réactions et de symptômes débilitants et j'en ai pour des jours, des semaines, parfois plus d'un mois à m'en remettre. Et les médicaments, je n'en parle même pas. Mon médecin, Dr Louis Jacques, spécialiste en santé environnementale, me dit qu'il n'y a pas de remède en médecine pour cette condition.

Évidemment. Si on est sensible aux médicaments, les possibilités sont limitées. Et pourtant, je ne suis pas la seule à souffrir de cette maladie. Selon Statistique Canada, on est 180 000 personnes au Québec à souffrir, à divers degrés, d'hypersensibilité environnementale. Parfois, c'est aux produits chimiques ou encore aux ondes électromagnétiques, d'autres, comme moi, ont la maladie des moisissures. Si nous sommes si nombreux, alors pourquoi cette maladie n'est-elle pas reconnue au Québec? Elle l'est pourtant dans la majorité de l'Amérique du Nord.

En fait, le Québec et la Saskatchewan sont les deux seules provinces où les médecins n'ont pas le droit de soigner des maladies non reconnues, sans déroger au code de déontologie. Pour cette raison, les malades comme moi, qui avons déjà de la difficulté à nous déplacer, et dont la condition nous plonge dans un gouffre financier sans fond, nous retrouvons sans ressources. Les médecines douces nous aident à survivre, à fort prix d'ailleurs, mais ne nous guérissent pas. J'ai appris dans les dernières semaines qu'il existe plusieurs protocoles pour s'attaquer à la maladie des moisissures. Mais c'est seulement en Ontario ou aux États-Unis qu'on trouve des cliniques environnementales qui remettent les hypersensibles sur pied. Toutefois, les soins n'y sont couverts par aucun régime d'assurance.

Nous, Québécois, avons choisi de nous doter d'un système de santé universel. Nous, les 180 000 personnes atteintes d'hypersensibilités environnementales faisons partie de cette société. Des solutions pour nous aider existent. Nous devrions normalement y avoir accès. En guise de prévention, il faudrait de plus retirer du marché les matériaux de construction qui ne sont pas fongifuges. Il faudrait aussi reconnaître que les milliers de produits chimiques qui se retrouvent dans nos différents produits de consommation pourraient avoir des répercussions sérieuses sur notre santé et que les ondes électromagnétiques dont nous sommes transpercés toujours de plus en plus, peuvent devenir très hasardeuses pour certaines personnes. Vous ne le savez peut-être pas, mais des personnes doivent s'exiler hors de la ville et parfois dans la nature la plus sauvage pour survivre à ces agressions environnementales.

Aujourd'hui, selon Rohini Perris, présidente de l'Association pour la santé environnementale du Québec, je dois trouver 30 000 $ pour aller me faire soigner à l'extérieur de la province, et possiblement du pays, alors que je suis dans un état de survie extrême. Si seulement, on me permettait de me soigner dans ma propre province, ça me sauverait des efforts titanesques, à moi et aux autres 180 000 personnes qui méritent au moins que le Gouvernement fasse l'effort de reconnaître cette maladie, qui nous enlève toute qualité de vie. S'il vous plaît. Nous n'avons pas le cancer, mais on souffre tout autant, sinon plus, et on mérite que ce que l'on vit soit à tout le moins reconnu officiellement.

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