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Lettre à Jean-François Lisée: le Canada est un «corps étranger» que l'attentisme ne saurait retirer

Monsieur Lisée, il faudra beaucoup plus que quelques sorties sporadiques suggérant les bienfaits de l'indépendance du Québec pour nous convaincre que vous êtes sérieux dans votre démarche. Comment croire qu'il ne s'agit pas simplement d'une manœuvre électoraliste pour éviter de perdre encore plus d'appuis chez les indépendantistes? Vous avez le fardeau de la preuve. Une opération de communication publique ne suffira pas.
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Monsieur Lisée,

Vous avez fait le 11 décembre dernier une sortie médiatique très surprenante qui laissait miroiter un retour à un discours public plus indépendantiste au Parti québécois. Dans une entrevue donnée à La Presse canadienne, vous avez affirmé essentiellement deux choses. D'abord, que les Québécois se considèrent de plus en plus souverains. Ensuite, que les Québécois prennent de plus en plus conscience que le fédéralisme canadien est comme un « corps étranger », une structure qui nuit à leur développement et qui les empêche de prendre des décisions conformes à leurs intérêts.

Du discours aux actes

Tant mieux si les Québécois cheminent psychologiquement vers l'indépendance politique. Tant mieux s'il leur apparaît de plus en plus urgent de sortir du carcan canadien. Je ne pourrais pas être plus en accord avec eux là-dessus. Tant mieux également si vous, monsieur Lisée, utilisez votre visibilité médiatique pour faire la promotion de ces idées. C'est ce qu'il faudrait faire chaque jour. C'est ce qu'il aurait fallu faire sans relâche depuis 18 ans.

Si cette sortie annonçait une reprise en charge réelle du projet d'indépendance du Québec, je m'en réjouirais sans retenue. Je ne ménagerais aucun effort pour y contribuer et pour appuyer une telle démarche. La volonté d'Option nationale de faire l'indépendance est sincère et se trouve au-delà de toute attitude partisane. Nous sommes d'ailleurs le seul parti politique à avoir inscrit dans ses statuts qu'advenant le cas où un autre parti politique nous rejoignait sur cette question, nous proposerions la collaboration, voire même la fusion à nos membres. Bien qu'on nous ait accusés de diviser le « vote indépendantiste », nous sommes là pour le recréer. Rappelons qu'à ce jour, nous sommes le seul parti qui s'engage clairement à faire l'indépendance dans un premier mandat. Lorsque le Parti québécois et Québec solidaire auront renoué avec l'audace et la franchise sur la question indépendantiste, nous marcherons avec eux sans hésitation. Le Québec peut compter sur nous.

Cela dit, il faudra beaucoup plus que quelques sorties sporadiques suggérant les bienfaits de l'indépendance du Québec pour nous convaincre que vous êtes sérieux dans votre démarche. Comment croire qu'il ne s'agit pas simplement d'une manœuvre électoraliste pour éviter de perdre encore plus d'appuis chez les indépendantistes? Vous avez le fardeau de la preuve. Une opération de communication publique ne suffira pas.

Appel à la cohérence

M. Lisée, j'en appelle à votre cohérence politique. Vous avez la responsabilité, devant le peuple québécois, de faire en sorte que votre parti prenne l'engagement clair de réaliser l'indépendance dans un prochain mandat. En cultivant l'attente du « moment opportun » pour déclencher un référendum, votre parti envoie le message à la population que le moment présent n'est pas le bon moment, que nous ne sommes pas actuellement capables de nous gouverner nous-mêmes et que la liberté peut attendre. Cette posture est profondément pernicieuse pour le peuple québécois. Elle affaiblit son courage et lui inspire un sentiment d'impuissance. Nous ne pouvons la tolérer.

Le moment opportun pour faire l'indépendance, c'est toujours il y a vingt ans. Mais le deuxième meilleur moment, c'est maintenant. L'appui à l'indépendance est en ce moment plus élevé qu'il ne l'était avant que Jacques Parizeau n'enclenche le processus référendaire de 1995, et ce, malgré le fait qu'on ait pratiquement arrêté de porter sérieusement le projet depuis. Les jeunes de 18 à 35 ans n'ont jamais eu l'occasion de voter au sujet de l'indépendance. Il y a du travail à faire auprès de cette frange de la population, puisque nous avons laissé nos adversaires les convaincre qu'il s'agissait d'une vieille question. Cependant, notre expérience démontre qu'il suffit d'en parler de façon argumentée, franche et décomplexée pour soulever l'enthousiasme des jeunes envers l'indépendance. Ils nous suivront si nous avons l'audace nécessaire à la réalisation d'un tel projet. Le moment opportun est quelque chose que l'on doit créer et non attendre. C'est notre courage qui inspirera celui de la population.

Les militants du Parti québécois qui tiennent le fort du mouvement indépendantiste sans relâche depuis plus de 40 ans méritent que leurs leaders fassent preuve d'un courage qui soit à la hauteur de leur lutte. Si le Parti québécois refuse de prendre des engagements clairs quant à son mode d'accès à l'indépendance, il devra au moins jouer franc jeu et expliquer pourquoi.

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