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Oui, on peut rire de Dieu, de nos prophètes, de nos sages

Au bout de leurs doigts, ils ont des crayons qui dessinent des traits. Ils écrivent avec des mines, ils donnent des visages à leurs mines, des mines à leurs visages. Les autres posent des mines et laissent le sang couler par terre, ce sang qui crie de la terre, ce sang qui coule infiniment de douleur face à la haine.
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Au bout de leurs bras, ils ont des machines de fer qui tuent.

Au bout de leurs doigts, ils ont des crayons qui dessinent des traits. Ils écrivent avec des mines, ils donnent des visages à leurs mines, des mines à leurs visages.

Les autres posent des mines et laissent le sang couler par terre, ce sang qui crie de la terre, ce sang qui coule infiniment de douleur face à la haine.

Ceux-là rient, se moquent avec leurs traits d'humour mais en forçant les traits, ils dénoncent, ils dénoncent la violence au nom des religions. Ils savent en leur for intérieur, en leur âme qui aujourd'hui tressaille et trépasse, qu'un trait-ça passe et qu'au nom d'aucun dieu, on ne peut tuer et assassiner froidement même celui qui se moque de vous.

Qui sont ceux dont les armes prennent le pas sur leur cerveau, sur leur âme. Ils sont dés-âmés, jamais désarmés devant ceux qui n'ont que le rire pour arme et des larmes.

Avec des traits et des mots, ils étaient révoltés,

Avec des traits et des mots ils étaient des enfants terribles, des enfants libres qui osaient. On les aimait parce qu'ils osaient dire ce que personne d'autre ne disait, sans vergogne, brisant les cadres, prenant des risques avec une liberté effrontée, non soucieux du qu'en dira-t-on, faisant voler en éclats le bienpensant, en éclats de rire.

Oui on peut rire de Dieu, de nos prophètes, de nos sages, mais on ne peut rire en se penchant sur les victimes.

Là, à deux pas, boulevard Richard Lenoir, le sang a été répandu sur la terre. Là où tant d'entre nous passent et repassent dans un décor banal, un quartier sans histoire, des hommes, des femmes et des enfants ont perdu ce qu'ils avaient de plus cher, leurs hommes, leurs femmes, leurs parents.

Qui sont ces hommes qui nient leur propre visage en le masquant : des morts-vivants qui croient que par la mort, on se venge d'une caricature ? Quelle commune mesure entre un trait qui dénonce même sans tendresse, des mots qui provoquent et des balles qui transpercent les cœurs ? Ne leur a-t-on pas appris que le trait ne tue pas ? Ils illustrent le trait en étant la pire caricature d'une religion qui souhaite la paix. Ils n'ont rien compris et nous projettent avec violence au temps des guerres de religion, où l'on tirait une balle et non un trait pour une croyance, pour un dieu. Ils ont oublié qu'Isaac dans la Bible ou Ismaël son frère dans le Coran ne sont pas morts sur l'autel des sacrifices.

Les enfants sont retournés à l'école, boulevard Richard Lenoir, le marché a installé ses étals multicolores, le vent a soufflé dans les arbres, mais une page est restée en noir et blanc. L'humanité a été blessée au plus profond de son âme. Le crayon s'est soulevé pour certains définitivement. « Celui qui assassine une personne assassine l'humanité entière « (Talmud, Sanhédrin). Mais le crayon va reprendre le chemin du papier et y crier la liberté d'expression, plus que jamais en mémoire de ceux que l'on a brusquement fait taire, nous allons clamer, plus haut et plus fort

Non à l'esclavage, oui à la liberté

Non à la cruauté, oui à l'humanité

Non au fanatisme, oui à l'ouverture

Non à l'obscurantisme, oui à la remise en question

Nous allons continuer d'étudier la Torah qui nous enseigne cette ouverture, nous allons dire shemoth des noms, de ceux qui sont sortis d'Égypte, de ceux qui sont morts pour se battre pour la liberté et l'audace.

Pour l'art des traits et des mots, et nous allons marcher sur ce boulevard la tête haute fiers de nos valeurs et de notre humanité.

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