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Les actions du gouvernement Trudeau concernent peu les Québécoises. Ses inactions posent toutefois problème.
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C'est le thème central. Après les familles et les Autochtones, c'est l'égalité homme-femme qui sert de trame de fond au 3 budget du gouvernement Trudeau. Pour un gouvernement qui se targue d'être féministe, peut-on dépeindre son dernier budget comme un exercice qui va dans le sens de ses prétentions? Ça dépend d'où on le regarde.

Le budget contient des énoncés de principes intéressants. Par exemple, bonne idée que cette volonté exprimée du gouvernement de faire preuve de transparence salariale en rendant publique plus d'information sur les pratiques des employeurs sous juridiction fédérale. Ottawa compte également exiger, pour chaque projet, une analyse d'impact fondée sur le genre, comme on le voit de plus en plus dans les milieux scientifiques. Il se donne également les moyens financiers pour améliorer l'efficacité de ces analyses. Au niveau des principes, le gouvernement fédéral fait des progrès. C'est lorsqu'il est question de sous que ça se gâte.

Certes, on doit souligner la volonté annoncée d'aller de l'avant avec une loi sur l'équité salariale. Enfin, le fédéral fait son entrée au 21 siècle! N'empêche qu'il s'inspire de ce que le Québec réalisait il y a de cela... 22 ans. Bonne nouvelle pour les quelque 200 000 travailleuses et travailleurs du Québec sous le Code canadien du travail, par exemple dans les banques ou les aéroports. Mais il ne s'agit tout de même que du rattrapage d'une génération de retard par le gouvernement fédéral.

Le budget Morneau annonce également en grande pompe l'instauration de congés parentaux. Vous avez bien lu : les familles du reste du Canada n'y ont pas droit. Il n'y a que le Québec qui se soit doté d'un régime d'assurance parentale et encore, il a dû se battre pendant 10 ans avec le fédéral, y compris devant les tribunaux, avant de pouvoir le créer en 2006. Puisque les familles québécoises profitent de leur propre régime depuis 12 ans, cette mesure ne s'applique donc qu'aux provinces canadiennes. Par ailleurs, celles-ci ne devraient pas retenir leur souffle : les sommes annoncées ne seront en vigueur qu'après la prochaine élection. C'est une promesse électorale, pas une politique.

Puisque les familles québécoises profitent de leur propre régime depuis 12 ans, cette mesure ne s'applique donc qu'aux provinces canadiennes.

La même logique s'applique pour bon nombre de mesures phares du budget. Ottawa prépare le terrain pour une assurance médicament et prévoit la création de services de garde à bas prix : encore des politiques dont le Québec s'est déjà doté et qui, donc, ne s'appliquent qu'aux autres provinces.

Les actions du gouvernement Trudeau concernent donc peu les Québécoises. Ses inactions posent toutefois problème.

Les nouvelles mères en pâtissent au premier chef. Encore aujourd'hui, une femme s'étant prévalue de son congé de maternité et de son congé parental en vertu du programme québécois n'a pas accès à l'assurance-emploi si elle devait perdre son travail à son retour. Ça fait deux ans que je fais pression pour que ce gouvernement se voulant féministe colmate cette brèche.

Les employées sous le Code canadien du travail auront beau se réjouir de l'équité salariale nouvellement acquise, elles demeurent prises dans un carcan mal adapté aux familles. Un exemple? Si elles doivent se prémunir d'un retrait préventif pour terminer une grossesse, elles ne sont pas protégées par le Code du travail québécois. Par conséquent, plutôt que recevoir 90 % de leur salaire comme les autres Québécoises, elles obtiendront 55 % de leur salaire SI et seulement SI elles sont admissibles à l'assurance-emploi. Six salariés sur dix n'y ont pas accès actuellement et comme les femmes sont plus susceptibles d'occuper des emplois à temps partiel, l'accès à l'assurance-emploi leur est encore plus difficile.

C'est connu : les femmes ont un revenu moyen plus faible que les hommes et prennent une plus grande part de la charge des enfants. Il n'est donc pas étonnant de les retrouver nombreuses en attente d'un logement à prix modique. Le gouvernement Trudeau annonce justement de nouvelles sommes à cet égard, avec une attention particulière pour les victimes de violence familiale. Sur papier, c'est bien, sauf que sur le terrain, les milliards annoncés depuis 2016 dorment toujours dans les coffres de l'État. Les logements ne se construisent tout simplement pas! Plutôt que de s'engager à accélérer le pas, le gouvernement Trudeau a lancé cet automne un vaste plan pancanadien mur-à-mur aussitôt rejeté par Québec et qui sera source de chicanes, donc de délais supplémentaires.

Entendons-nous : si les femmes ne se retrouvent pas dans les parlements, ce n'est pas qu'une question de services de garde.

Le budget prétend également vouloir encourager les femmes à se présenter en politique. Il y impose une certaine latitude pour celles qui souhaiteraient amener leur enfant à la Chambre des communes, en plus de faciliter l'accès à un service de garde. Entendons-nous : si les femmes ne se retrouvent pas dans les parlements, ce n'est pas qu'une question de services de garde. Voilà une solution un peu simplette à un enjeu bien réel.

Finalement, constatons que le fédéral réduit la hausse des transferts en santé à 3 %. Notons que puisque les coûts du système augmentent de 5 % par année au Québec, il s'agit bel et bien ici d'un désinvestissement du fédéral dans la santé. En d'autres mots, Justin Trudeau sera directement responsable de nouvelles mesures d'austérité en santé chez nous. Tout gouvernement qui coupe en santé n'est pas un gouvernement féministe.

Donc, féministe, le budget Morneau? Pour une femme de l'Alberta, où encore cette semaine un répondant sur cinq à un sondage Léger estimait que la place d'une femme est au foyer, c'est un oui catégorique.

Mais pour les Québécoises?

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