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Le respect dû aux personnes âgées et leur maintien à domicile

Avant tout projet de nouvelles structures et de nouveaux modes de financement d'une assurance autonomie, c'est l'amélioration de l'offre des services et l'écoute des désirs des personnes âgées qu'il faut prendre en compte. Tout nouveau plan doit être régi de manière claire afin d'éviter que les administrateurs se protègent et trouvent là prétexte à accaparer plus pour eux et à minimiser les services pour les patients ou les personnes âgées.
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«Mourir la belle affaire, mais vieillir! » - Jacques Brel

Je ne peux que saluer l'intention du ministre de la Santé - le docteur Réjean Hébert, gériatre - de s'intéresser avec vigueur et détermination au sort des personnes âgées. Certes, «refuser de prendre le virage du maintien à domicile serait irresponsable financièrement». Mais avant d'ajouter un autre programme et une autre ponction dans les revenus des particuliers pour le financement d'un tel programme ou d'une autre forme d'assurance - ici ''autonomie'' (après l'assurance médicaments et le fonds santé) -, il serait utile de revoir les conditions de la coordination et de l'administration des soins et du maintien à domicile.

Un certain portait tragique et désespérément obscur de la vieillesse est amplifié par le traitement normatif de l'organisation des soins ou services au maintien à domicile.

Un premier obstacle à la réalisation efficiente de l'intention bien avisée du gouvernement québécois de développer les soins et le maintien à domicile serait partiellement lié à l'approche bureaucratique jumelée aux pressions syndicales. Les processus alors arrêtés figent une fragmentation des taches des préposés ou des intervenants auprès des personnes en perte d'autonomie. La catégorie professionnelle détermine alors ce que peut ou ne pas faire tel ou tel intervenant, alors que tout du respect des personnes âgées et la compassion même devraient inciter les intervenants à répondre plus aux besoins immédiats qu'à des motifs normatifs. On multiplie alors les périodes d'attentes pour tel ou tel service alors qu'un(e) proposé(e) ou un(e) auxiliaire familial pourrait déjà résoudre bien des situations évidentes qui n'exigeraient que quelques dizaines de minutes de plus en compagnie du bénéficiaire...

Hypothèse

Ainsi, la réalité de la dynamique organisationnelle dont hérite maintenant le ministre de la Santé du Québec ferait obstacle à une louable intention. Nous aurons entendu des versions variées d'intentions au cours d'une quinzaine d'années, souvent associées à des promesses électorales qui (quelques fois) auront produit leur lot de plans, de programmes et de services assortis de considérations quasi-comptables et de normes évaluatives. Mais d'améliorations concrètes, il y en a peu, sans trop d'effets observables, hormis un durcissement au fur des années de la fonction administrative, que traduit le nombre croissant de cadres que nous rapportent des reportages journalistiques...

Ainsi, je ne crois pas que la seule approche du Vérificateur général (reprise par Le Devoir dans un éditorial titré Soins à domicile - Dissiper le flou) soit de prime importance. Les disparités régionales, par exemple, peuvent être le fait de besoins différents... et d'autres études plus précises - d'autres études encore, mais le système en produit des tonnes! - ne feront que différer le problème à plus tard, alors que la dynamique organisationnelle est en cause...

Questionnement

L'état de la situation, la dignité même des personnes âgées, oblige les décideurs et les politiciens - nonobstant l'option partisane - à se poser certaines questions avant de profiler la menace d'autres taxes et impôts pour financer les services requis pour répondre aux besoins croissants du maintien à domicile et de l'hébergement des personnes en perte d'autonomie.

J'ai le sentiment que beaucoup aurait déjà pu être fait et pourrait être réalisé à court terme par une approche plus compassionnelle, moins bureaucratique. En bout de piste, si rien du court diagnostic que je résume ici n'est corrigé, ce sont les syndicats et le lobbying des entreprises immobilières de résidences pour personnes âgées (aînés, par euphémisme d'un marketing d'affaires) qui se serviront avant que services aux personnes âgées ne soient rendus..

On est en droit d'exiger des réponses à certaines questions des décideurs des politiques de maintien à domicile et pour des soins aux personnes âgées,

L'organisation du maintien à domicile intervient sur un mode trop normatif

Les taches et les temps alloués aux intervenants sont aujourd'hui découpés en fonction de descriptions syndicales et administratives.

  • Le maintien à domicile requiert une approche intégrée qui doit comprendre des modes d'assistance (ergonomie, physiothérapie) qui permettent de maintenir l'autonomie physique et psychologique;
  • Les soins et services requièrent une approche plus souple, plus intégrée, libérée de lourdeurs administratives et de trop de postes de cadres, mais augmentée de plus d'intervenants en contact mus par des motifs de compassion et d'entraide.
  • Les évaluations successives s'imposent certes, mais encore faut-il qu'elles ne servent pas que de prétexte aux fonctionnaires pour se protéger et justifier l'excroissance des structures administratives.

Cheminement vers la semi-autonomie, et besoins criants de résidences pour personnes semi-autonomes en couple

  • Le traitement respectueux des personnes vivant en couple exige qu'on ne les sépare pas, sous prétexte d'une évolution de non-autonomie de l'un ou de l'autre des époux.
  • Quel argument justifie qu'on (travailleur social ou administration) sépare deux personnes devenues vulnérables, deux personnes qui auront passé plus de 50, 60 ou 70 ans ensemble, qui se tiennent par la main dans tous leurs déplacements, qui ne veulent pas être séparées dans cette dernière période de vie, ce jusqu'à leur mort.
  • Le manque de places pour personnes semi-autonomes est une réalité pressante sur la Rive-sud, plus qu'ailleurs, semble-t-il, et depuis fort longtemps. L'organisation des soins à domicile et par la suite des soins en résidences pour personnes semi-autonomes doit prévoir des chambres pour les personnes âgées toujours en couple, car il est inhumain de séparer des personnes qui ont vécu ensemble toute leur vie durant.

Résidences privées pour personnes âgées (retraités)

Il existe un nombre croissant de résidences pour personnes âgées (les aînés dit-on alors, par souci de marketing d'affaires) gérées par des sociétés immobilières. Mais, un lieu de résidence pour personnes âgées requérant des soins à domicile exigerait aussi un aménagement physique sécuritaire à l'intérieur des appartements, et satisfaisant les recommandations d'associations pour personnes âgées.

On rapporte déjà des opérations de lobbying visant à profiter de programmes de maintien à domicile, voire de subventions, alors que les entreprises immobilières auraient déjà la responsabilité de faire en sorte que leurs appartements soient sécuritaires pour les clientèles à qui ils les louent (Le Devoir, 24 mars 2012). Ces entreprises immobilières auraient l'obligation légale d'adapter l'aménagement des appartements de manière à répondre aux normes prévues pour les habitations pour une clientèle vieillissante... (tuiles antidérapantes dans la salle de bain et la cuisine, régularité des surfaces des planchers, prises électriques répondant aux normes dans les salles de bain et de lavage...). À défaut on crée indûment des risques de chute et autres incidents...

Discussion

C'est au Québec que la proportion des personnes âgées est parmi les plus élevées au monde, après le Japon. Mais, le Japon valorise la contribution patrimoniale des aînés. Ils ont un rôle à jouer dans la transmission de savoir-faire, de métiers ou d'arts traditionnels. Ici, on néglige cette fonction vitale, ce qui représente une forme de mépris envers les vieux. En Afrique, on dit qu'un vieillard qui meurt est une bibliothèque qui brûle. Ici, on parque les vieux de manière à correspondre à des encadrements normatifs, où on les distrait comme des enfants par des activités de peintures à numéro... La désolante indicible frayeur de vieillir se voit partout! Comment vivre heureux sans être utile? Or, le système les condamne à l'inutilité.

Et les vieux vivent dans la crainte d'être placés; il faut voir dans leurs visages cette crainte d'un jugement fatidique du travailleur social qui jugera de leur autonomie... Cette frayeur les pousse à tout supporter, fragiles et vulnérables, et à ne point s'opposer à la hausse de tous les frais des administrations résidentielles.

Puis, la lourdeur administrative du maintien à domicile vient à bout des résistances, ou épuise lentement les aidants naturels tout autant que la lourdeur des soins et des attentions à prodiguer...

Ainsi, plus que le mode de financement ou des disparités régionales, ou les paramètres de nature comptable relevés par le VG et relatés par la presse, ce sont chacune des tares de la dynamique des processus organisationnels relevées plus haut qu'il faut craindre.

Alors, avant tout projet de nouvelles structures et de nouveaux modes de financement d'une assurance autonomie, c'est l'amélioration de l'offre des services et l'écoute des désirs des personnes âgées qu'il faut prendre en compte. Tout nouveau plan doit être régi de manière claire de manière à éviter que les administrateurs se protègent et trouvent là comme dans les coupures budgétaires, prétexte à accaparer plus pour eux et à minimiser les services pour les patients ou les personnes âgées. Ah! Si ces administrateurs se commettaient à poser des gestes positifs, non des gestes administratifs!

Ailleurs ou plus tard, je vous entretiendrai de solidarité citoyenne, de respect de la transmission des valeurs culturelles et religieuses et des traditions profondes dont les personnes âgées sont encore des dépositaires vivants...

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