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Pour en finir avec les abris Tempo

Alors que l'hiver fait finalement mine - mais oh, si tranquillement - de s'installer, le billet signé il y a quelques jour par, collègue blogueur, sur le, intitulé, -et qui résume bien ce que beaucoup d'autres disent sur ces fameux Tempo - a éveillé chez moi bien des réflexions.
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Flickr: kaybee07

Alors que l'hiver fait finalement mine - mais oh, si tranquillement - de s'installer, le billet signé il y a quelques jour par Pascal Henrard, collègue blogueur, sur le Huffington Post Québec, intitulé « Abri Tempo : le temps de la laideur », -et qui résume bien ce que beaucoup d'autres disent sur ces fameux Tempo - a éveillé chez moi bien des réflexions.

Réglons une chose en commençant: moi aussi je trouve ça laid, les abris Tempo. Je n'en ai pas, je n'en ai jamais eu. À l'époque où je vivais chez mes parents, eux non plus n'en avaient pas. Et je vis dans au quartier d'où les abris Tempo sont absents, ce dont je me réjouis chaque hiver.

Bon. Maintenant qu'on a dit ça...

Doit-on pour autant condamner la chose, urbi et orbi? Au nom de quoi? Pourquoi l'abri Tempo est-il ainsi devenu une cible, et un de symbole? Qu'y a-t-il au juste dans l'abri Tempo, pour tellement exciter l'animosité des commentateurs? (Et, quand ce n'est pas l'animosité, c'est au moins l'ironie: impossible de ne pas mentionner ici les fameuses «entrevues Tempo› de Marie-France Bazzo.)

En y pensant un peu, je réalise qu'il y a une certaine parenté entre l'abri Tempo et le célèbre camping Ste-Madeleine, situé sur le bord de l'autoroute 20, entre Québec et Montréal. Après une chronique de Patrick Lagacé à ce sujet dans La Presse, pendant la campagne électorale, j'avais d'ailleurs eu envie d'explorer la question. Je ne l'avais pas fait, par manque de temps. Mais maintenant, je me dis que je vais revenir un jour plus en profondeur, peut-être même bientôt, sur le camping Ste-Madeleine.

Et notons déjà quelques similitudes:

- On reproche, tant à l'abri Tempo qu'au camping Ste-Madeleine, la 'pollution visuelle' qu'ils causent. Et on les associe, de façon plus large, à des sources de pollution environnementale: dans le cas de l'abri Tempo, la voiture (on va souvent nous parler du « culte de l'automobile») ; dans le cas de Ste-Madeleine, l'usage des roulottes et des véhicules récréatifs (VR) (j'en avais déjà parlé un peu ici).

-On laisse presque toujours entendre que, si on utilise un abri Tempo, et/ou si on campe dans un endroit comme Ste-Madeleine, c'est faute de mieux: faute d'être mieux renseigné, mieux éduqué, plus ouvert.... Dans le cas d'un propriétaire d'abri Tempo, cela veut dire: être esclave de son « char », pas assez avisé, vaillant et responsable pour favoriser le transport en commun, trop paresseux pour pelleter... Et pas assez allumé, non plus, pour apprécier pleinement les caractéristiques de notre bel hiver. De la même façon qu'on regarde ceux qui campent en roulotte ou en VR comme d'impardonnables pollueurs, qui contribuent en toute inconscience au réchauffement planétaire.

À première vue, comment être contre de tels arguments?

Pourtant, quand on y pense un peu, les critiques à l'endroit des abris Tempo pourraient aussi s'appliquer aux maisons dotées de gros garages. Culte du «char», paresse... et aussi manque de respect de l'environnement: parce qu'un garage chauffé, contrairement à un abri Tempo, en plus, c'est énergivore... Reste l'esthétisme? Pas forcément: les « monster homes » à garages doubles et triples, est-ce plus beau? Les quartiers entiers constitués de telles maisons sont-ils tellement mieux, sur le plan du design et de l'urbanisme ? Les abris Tempo, au moins, ont le mérite d'être... temporaires.

Alors pourquoi cible-t-on tellement, spécialement, les abris Tempo ? Serait-ce d'abord parce que cela ne correspond pas à nos goûts et à notre mode de vie, à nous journalistes, animateurs, artistes, et commentateurs dans les médias à divers titres ? C'est un peu comme pour le camping-caravaning : «ouache, quelle horreur, ces grosses roulottes et ces VR, avec leur consommation d'essence effrayante...» Mais en fait, quelqu'un qui va tous les week-end dans sa maison de campagne des Laurentides ou des Cantons de l'Est, et qui prend l'avion pour passer ses vacances en Italie, en Grèce, en France ou en Asie.... pollue-t-il tellement moins, au bout du compte ? Mais encore une fois, l'élite, y compris l'élite intellectuelle et médiatique, pratique assez peu le camping-caravaning...

Mais restons à notre hiver. Pourquoi ne serions-nous pas fiers de nos abris Tempo ? Il s'agit quand même, au départ, d'une invention éminemment ingénieuse et pratique. Et pourquoi y voir automatiquement une invention pour les gens qui « haïssent l'hiver » et ne veulent rien en savoir ? Au contraire: on ne verra jamais d'abri Tempo dans l'entrée de celui qui passe quatre à six mois dans le Sud, c'est sûr. Si quelqu'un se dote d'un abri Tempo, c'est au moins qu'il passe l'hiver ici. Qu'y a-t-il de mal à avoir inventé quelque chose qui permette d'épargner du « pelletage » ? Qui permette aux voitures de moins se dégrader, en étant moins exposées au sel et aux intempéries ? Pouvoir conserver sa voiture plus longtemps, cela aussi c'est écologique, non ? En plus d'être économique...

Au lieu de juste 'blaster' le Tempo, pourquoi n'essaierait-on pas de l'améliorer? OK, sous sa forme actuelle, il est laid. C'est un peu ce que j'écrivais à propos d'endroits comme le Quartier Dix30 : plein de gens qui ne trouvent pas ça très beau y ont quand même recours, parce que c'est pratique. Et ils se tourneraient peut-être vers autre chose, s'il y avait autre chose sur le marché. Comment en arriver à un meilleur design, et un meilleur concept ? Pourquoi ne pas lancer un concours, visant à concevoir un meilleur abri Tempo, plus résistant, avec un meilleur design, et qui s'intégrerait mieux aux divers environnements, y compris l'environnement urbain ?

Et qui pourrait lancer ça?

La question semble vraiment toucher une corde sensible: sur Facebook, où j'ai partagé ce billet après l'avoir publié sur mon blogue, il m'a valu une avalanche de commentaires vraiment très intéressants et pertinents. J'en partage quelques-uns ici: «Pour enlaidir le moins possible le Québec, nous attendons la première neige avant de monter l'abri Tempo. Mais on devrait peut-être engager un artiste émergent pour le décorer, qu'en penses-tu?»

«Drôle, je n'ai jamais eu d'abris Tempo, et pourtant, j'envie le côté pratique de la chose. Laid? Absolument. Mais qui sont ceux qui critiquent? Ils n'ont ni voiture, ni garage, ni entrepreneur pour déneiger devant chez eux à 6am. C'est temporaire. Un mal nécessaire. Comme l'hiver.

«Ce serait bien des toiles colorées, roses, jaunes, vert fluo... Ou avec des fresques, des paysages tropicaux, pour accentuer le kitsch de la chose.»

«Dans notre quartier, les abris Tempo sont interdits. Résultat: numéros de souffleuses matin et soir. Personnellement, je préfèrerais de loin des abris Tempo à cette pollution sonore et atmosphérique.»

«Dans mon quartier, on n'a pas le droit non plus de clôtures si elles ne sont pas noires, ni de quoi que ce soit qui pourrait choquer l'harmonie du tout. Tout est beau, beau, beau, bien parfait.»

«Beaucoup de ces lois de voisinage sont en fait des lois anti-pauvreté déguisées. Dans les années 30, les gens dont les revenus étaient menacés se faisaient d'énormes potagers, élevaient des poulets, faisaient la lessive pour les familles aisées du voisinage, etc. Dans les 50 années, quand l'Amérique est devenue riche, tous ces symboles du système D rappelaient de mauvais souvenirs. «Ça faisait pauvre...» Tout ça a été interdit sous la vague prétexte de préserver la valeur foncière des quartiers - et de refouler les pauvres loin de la vue.»

«Ce qui est associé à la pauvreté est en effet généralement considéré comme de mauvais goût.»

«Hélas, les symboles apparents de richesse dépendent souvent de pratiques environnementales douteuses. Mais il semble que comme société, nous craignons plus l'apparence de la pauvreté que la dégradation des écosystèmes. (...) Les lois contre les cordes à linge nous obligent à dépenser plus d'énergie. Celles contre les grands potagers nous obligent à faire venir nos aliments de loin. Celles contre les abris Tempo provoquent une prolifération de souffleuses deux-temps et de tracteurs de firmes de déneigement. Celles qui rendent le gazon obligatoire nous obligent à dépenser beaucoup d'eau. (...) On peut aussi comparer les règlements des banlieues les plus cossues. Les abris Tempo sont interdits à Saint-Lambert, mais autorisés à Longueuil. Je suis prêt à parier que cela été avancé comme argument lors des défusions municipales, c'est une interdiction très populaire à Sant-Lambert parce que ça ne fait pas beau. Mais en contrepartie, toute une industrie du déneigement déploie ses pick-up modifiés avec gratte et souffleuse, ses chenillettes et même ses tracteurs agricoles modifiés à la moindre tempête. Et tout ce monde roule très vite pour servir ses clients...»

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