Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Au-delà des résistances ou parler positivement de l'éducation québécoise

Après quinze années de présumés déboires constatées par une application approximative et inégale du PFÉQ partout au Québec et après tout ce temps de déchirements, n'est-il pas le temps de cesser de regimber ?
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.

Depuis trop d'années, le terrain médiatique de l'éducation appartient à ceux qui manifestent leur résistance et leur opposition à tout ce qui diverge de la conception traditionnelle de l'éducation. Au XXIe siècle, plusieurs modèles alternatifs circulent et tentent d'insuffler un vent de modernisme à la pédagogie. En ce sens, les médias sociaux facilitent une libre circulation de ces options. Ils permettent également un certain réseautage qui se traduit par l'animation de communautés d'apprentissages professionnels par les participants eux-mêmes, ce qui permet un enrichissement des pratiques enseignantes pour ceux qui y participent.

Quinze années de malheur ?

Devant cette surabondance de vent nouveau, plusieurs intervenants en éducation se sentent soufflés, littéralement, ce qui les force à résister d'autant plus en rejetant les nouvelles idées émergentes.

J'ai eu l'occasion de participer récemment à un débat sur la pertinence du Programme de formation de l'école québécoise (PFÉQ). Évidemment, dans ce genre d'exercice démocratique, il y a deux visions qui s'opposent et, bien souvent, dans cette saine confrontation, de nouvelles idées prennent forme, lesquelles sont mieux collées aux réalités des débatteurs et des positions qu'ils représentent.

Pour ma part, j'ai toujours eu une approche d'ouverture aux orientations ministérielles, et ce, malgré le fait que, comme tout le monde, j'ai éprouvé un certain malaise et inconfort face à la rupture de l'actuel PFÉQ avec son ancienne mouture. Peut-être suis-je trop conciliant, naïf, idéaliste ou mou ? Je l'ignore. Ledit débat m'a cependant permis de comprendre que bon nombre d'intervenants scolaires sont demeurés en situation de refus face à ces nouvelles orientations adoptées il y a presque vingt années, lesquelles sont en vigueur depuis presque quinze années. Évidemment, le discours dominant est que la Réforme est la source de tous les maux et qu'il faut retourner aux planches à dessin pour jeter les bases d'une nouvelle réforme qui réformera l'ancienne. Ou, encore, qu'il faut revenir aux programmes par objectifs. Comme si une de ces possibilités allait faire l'unanimité... Pour une nouvelle réforme de la Réforme, les mêmes rengaines prendront certainement le dessus : pas assez de consultation, trop peu d'écoute, pas assez de bases scientifiques, etc.

Quel sera le résultat ? Il y aura des résistances et elles émaneront probablement des mêmes individus qu'à l'heure actuelle. Bref, du pareil au même.

Ma réflexion est simple, aucunement scientifique et probablement surprenante comme me l'ont fait remarquer plusieurs observateurs. Après quinze années de présumés déboires constatées par une application approximative et inégale du PFÉQ partout au Québec et après tout ce temps de déchirements, n'est-il pas le temps de cesser de regimber et de tous se mettre au travail main dans la main pour lui donner une réelle chance ? Ensuite, nous pourrons le condamner en bonne et due forme et le MELS lui-même se rendra à l'évidence. À ceci, voici ce que m'ont répondu quelques interlocuteurs :

- Oui, c'est facile dire cela quand c'est vous avez gagné!

- Euh, gagné quoi? ai-je répondu.

- Ben, vous l'avez eu votre réforme !

Était-ce une épreuve de force à ce point? Était-ce une véritable guerre d'opinions et de positions qui s'est soldée par la soumission d'une idéologie à une autre ? Doit-on véritablement conclure qu'il s'agit d'une défaite et, conséquemment, cela justifie aux opposants l'adoption d'une attitude de vaincu, avec toute l'aigreur et l'amertume que cela implique ? Est-il nécessairement question d'abjurer nos croyances et nos idéaux ?

L'heure est à la cohésion et non à l'opposition frontale ou détournée qui se traduit par une résistance au quotidien. N'est-ce pas une responsabilité professionnelle de tout intervenant oeuvrant dans le monde de l'éducation de faire en sorte que tout fonctionne au lieu de rester en marge dans l'attente de pouvoir témoigner de l'effondrement de la Réforme pour ainsi pouvoir scander fièrement le désormais célèbre je vous l'avais bien dit! N'est-ce pas une même responsabilité de faire évoluer l'éducation et faire en sorte qu'elle s'arrime avec la réalité sociale et culturelle ? Malheureusement, les impératifs du PFÉQ sont empêtrés dans une structure et une idéologie ancestrale qui ralentit son potentiel actualisant.

Les bébelles...

L'intérêt de l'éducation envers les avancées technologiques n'a rien de nouveau. Certains chercheurs internationaux en éducation identifient même une corrélation entre l'évolution technologique du monde du travail et celle du monde scolaire. Comme quoi l'école doit ultimement permettre à l'élève de se préparer au monde du travail, ce qui inclut l'utilisation de technologies, l'intégration de savoirs et le développement de compétences. Plusieurs gauchistes hurleront qu'il s'agit d'une conception réductrice et mercantile de l'éducation et probablement qu'ils ont raison. Néanmoins, il semble y avoir un décalage important entre la formation scolaire et les besoins du monde professionnel.

Plusieurs doutent de la pertinence des technologies en milieu scolaire. Les tablettes seraient des bébelles, les TBI sont inutiles, internet sans fil est cancérigène et les possibilités offertes par les médias sociaux en pédagogie menacent la qualité de la communication. La ludification de l'apprentissage via les technologies vient en contradiction avec l'idéologie ancienne voulant qu'apprendre, ça fait parfois mal et que l'école se doit d'être faite à la dure. Si les élèves s'ennuient, c'est qu'ils sont démotivés.

Ils ont tout faux, car il y a définitivement moyen d'apprendre en ayant du plaisir et, à ce niveau, plusieurs recherches le démontrent. Comme si la motivation tombait du ciel ou qu'elle était innée. Comme si les élèves devaient s'ennuyer. Et pire, comme si nous devions ostraciser les efforts des enseignants qui désirent dynamiser leur classe en variant leurs approches et les outils pédagogiques non éprouvés. Est-il vraiment obligatoire qu'une méta-analyse confirme, avec des données probantes éprouvées par la recherche scientifique, la validité de chacune des stratégies employées par l'enseignant ou chacun de ses outils didactiques ? Ceux-là même qui prônent et défendent l'autonomie professionnelle des enseignants leur nuisent en alimentant la dictature méta-analytique des données probantes issues de recherches universitaires : au-delà des méta-analyses, point de salut ! Non pas que ces recherches ne soient pas d'intérêt ; bien au contraire ! Cependant, elles ne doivent pas avoir pour conséquence de limiter l'intuition et la créativité enseignante liées au fait que ce dernier est celui qui connaît le mieux ses élèves. C'est la base même de la différenciation pédagogique.

Un grand tableau et une sortie de classe

Si cette énergie d'opposition était convertie en énergie positive et si ce type de leadership était mobilisateur et positif, notre système d'éducation s'en porterait bien mieux. C'est dans cette optique qu'un forum a été créé par des intervenants qui veulent mettre en valeur ce qui est positif dans le monde de l'éducation actuel et ce qui fonctionne avec les élèves. Le but est de mobiliser les intervenants du Québec entier et laisser entrevoir d'autres avenues pédagogiques que celles qu'ils utilisent. Un bel espace est réservé à des enseignants qui partagent leurs pratiques gagnantes avec leur réseau. C'est une extraordinaire initiative de Pierre Gagnon qui a facilité l'arrimage du projet (auquel je participe d'ailleurs) avec une jeune entreprise québécoise, ChallengeU, laquelle met à notre disposition, les ressources techniques pour parvenir à l'enregistrement des épisodes et les diffuser sur internet. Tous les intervenants sont bénévoles et offrent de leur temps gratuitement parce qu'ils croient qu'il est possible d'enseigner différemment. Ils veulent offrir leur humble contribution à l'éducation québécoise et tiennent à inspirer leurs collègues.

Le premier webisode du Grand Tableau est disponible depuis le 9 mars. Celui de la Sortie de classe l'est depuis le 10 mars. Ils sont tous deux accessible ici.

VOIR AUSSI SUR LE HUFFPOST

L'école Steve Jobs

L'école Steve Jobs

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.