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Pourquoi le vote stratégique c'est la démocratie!

Certains indépendantistes de gauche s'insurgent depuis le début de la campagne électorale contre l'éventualité même de considérer la possibilité d'entendre un péquiste soulever la question du votre stratégique. En fait, il semble qu'il soit devenu profondément anti-démocratique de proposer aux gens de faire quelque réflexion que ce soit sur la question du vote utile.
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Certains indépendantistes de gauche s'insurgent depuis le début de la campagne électorale contre l'éventualité même de considérer la possibilité d'entendre un péquiste soulever la question du votre stratégique. En fait, il semble qu'il soit devenu profondément anti-démocratique de proposer aux gens de faire quelque réflexion que ce soit sur la question du vote utile.

Le vote est toutefois une action qui doit s'ancrer dans un système d'institutions politiques et démocratiques donné. Cela signifie qu'on ne peut totalement exclure de notre choix des considérations extérieures qui déterminent le fonctionnement de la démocratie de notre société.

Dans un système de tradition britannique comprenant un mode de scrutin « uninominal à un tour » comme celui dans lequel nous composons, nous avons souvent raison d'être déçus du manque de représentativité que le système offre à ses citoyens. Il est mathématiquement possible (et probable) d'élire un gouvernement minoritaire quand près de 65% des gens ont voté pour d'autres partis. Il est aussi possible d'élire un candidat lorsque près de 70% des électeurs se prononcent contre ce dernier le jour du scrutin (comme ce sera très probablement le cas dans les comtés de Nicolet-Bécancour ou de Jean-Lesage). Toutefois, dans un tel cas, on peut au moins se réjouir que tous les candidats aient des chances similaires de se faire élire, ce qui vient confirmer l'adage voulant que chaque vote compte véritablement.

Dans la présente élection, il existe un très grand nombre de circonscriptions où les partisans de la gauche, ne sachant plus comment s'entendre entre eux, se font une lutte si féroce que leurs efforts serviront très probablement à donner la victoire à des libéraux ou encore caquistes. Il ne s'agit pas ici de critiquer la (très intéressante) lutte entre Nicolas Girard du PQ et de Françoise David de QS dans Gouin. Dans les deux cas, un député progressiste et indépendantiste sera élu. Le malheur de cette lutte réside dans le fait qu'un de ces deux candidats n'aura pas de voix au Parlement à la prochaine législature. Il ne s'agit pas non plus de Rosemont ou de Hochelaga-Maisonneuve où Québec solidaire, bien que plus fort qu'avant, ne divisera pas le vote au point de faire élire un caquiste ou un libéral.

C'est toutefois des luttes comme celles auxquelles on assiste dans les circonscriptions de Laurier-Dorion, de Sainte-Marie-Saint-Jacques, de Jean-Lesage, de Jean-Talon, de Hull et d'Outremont qui me font douter de l'interprétation que certains font du compromis en démocratie.

Tout en étant bien évidemment un système politique dans lequel les citoyens, sans égard à leur statut social, peuvent s'exprimer par le biais d'un vote aux élections législatives pour élire des représentants qui seront législateurs et contrôleurs de l'action gouvernementale au Parlement, la démocratie c'est aussi autre chose. Dans un contexte comme celui dans lequel nous vivons, c'est la possibilité et même l'obligation de prioriser les enjeux sur lesquels notre vote portera. C'est d'utiliser le plus de rationalité possible pour tenter au mieux que possible d'identifier l'adversaire principal. C'est de penser que des victoires, ça se gagne par la force du compromis. C'est aussi comprendre que la démocratie, c'est de rêver à des réformes, mais c'est aussi être souple sur les moyens pour y arriver, pour paraphraser François Legault.

C'est donc contre cet absolutisme d'un vote obstiné à gauche du centre gauche que les Lisée et Marois se prononcent lorsqu'ils appellent au vote stratégique dans ces quelques circonscriptions qui feront probablement la différence le 4 septembre.

Parce que les solidaires, aiment toujours davantage voir un péquiste qu'un « caquiste » au Parlement. Parce que pour un progressiste qui hésite, il vaut mieux avoir un PQ imparfait au pouvoir qu'un PLQ parfaitement campé contre soi qui gouverne. Parce que la grande majorité des partisans d'Option nationale rêve quand même à un gouvernement souverainiste (même moins pressé qu'eux) à la tête de l'État.

Tous ces détails parfois agaçants, les solidaires, les verts et les partisans d'ON les réfutent en se réfugiant dans l'obstination d'un vote qu'ils rêvent plus représentatif de leurs intérêts. Souvent toutefois, leur enthousiasme organisé permet à leurs adversaires de droite de se moquer de leur amateurisme et de les dépasser au dernier droit. La droite a toujours été beaucoup plus habile pour se rassembler et à comprendre certains principes inhérents au vote stratégique, ce qui fait en sorte qu'elle ne sent pas le besoin d'en débattre en public.

Le vote utile n'est donc pas fait pour être systématique et c'est ce qui le rend légitime et utile dans plusieurs cas. Je dis donc que la démocratie c'est de ne jamais renier les rêves que l'on peut avoir, mais qu'il s'agit, dans notre cas du moins, d'un système très imparfait ou le vote stratégique est nécessaire pour penser pouvoir avancer dans la direction qu'on croit être la bonne.

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