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Rapport du BST sur Lac-Mégantic: un nouveau Walkerton

Avec le recul, on peut dresser de nombreux parallèles entre la catastrophe de Lac-Mégantic et sa gestion par le gouvernement fédéral, et la crise de Walkerton qui a coûté à un autre gouvernement conservateur la confiance des citoyens.
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Plus d'un an après la tragédie qui a détruit le centre-ville de Lac-Mégantic et coûté la vie à 47 personnes, le Bureau sur la sécurité des transports du Canada (BST) a finalement rendu public son rapport sur la tragédie de Lac-Mégantic. Son verdict est sans appel : le laxisme de Transport Canada dans la surveillance des activités de la Montreal Maine & Atlantic (MMA), et plus largement dans le transport de matières dangereuses au pays, est directement mis en cause dans ce qui est la plus grave catastrophe industrielle de l'Histoire du Québec. Le gouvernement Harper vient de frapper son Walkerton.

À la lumière des constats du BST, on ne peut que comprendre la colère des Méganticois qui tiennent aujourd'hui le gouvernement fédéral pour responsable de la tragédie qui a marqué à jamais leur communauté. La Mairesse de Lac-Mégantic, Colette Roy-Laroche, qui avait jusqu'à maintenant maintenu une réserve exemplaire, a même rappelé Transport Canada à ses responsabilités, à savoir d'assurer la surveillance du transport ferroviaire au pays et de protéger a sécurité du public. Dans un geste déshonorant, la ministre Lisa Raitt s'est lavé les mains du rapport du BST, refusant d'assumer toute responsabilité au nom de son gouvernement et rejetant le blâme sur la MMA.

Avec le recul, on peut dresser de nombreux parallèles entre la catastrophe de Lac-Mégantic et sa gestion par le gouvernement fédéral, et la crise de Walkerton qui a coûté à un autre gouvernement conservateur la confiance des citoyens, et éventuellement le pouvoir, au tournant des années 2000 en Ontario.

Rappelons les faits. En 1996, le gouvernement conservateur de Mike Harris lance la Révolution du bon sens, un programme de coupures et de privatisations sans précédent. Il privatise dans la foulée l'approvisionnement en eau dans les villes ontariennes. En mai 2000, l'eau de la petite ville ontarienne de Walkerton est contaminée par la bactérie E Coli suite à la négligence de Stan et Frank Koebel, les deux personnes responsables de l'approvisionnement en eau potable de la ville. Bilan : sept décès et 2300 personnes contaminées. En 2002, une enquête menée par le juge O'Connor blâme sévèrement le gouvernement ontarien. Le juge affirme que la province n'a pas mis en place des systèmes de protection adéquats après avoir privatisé l'eau potable et que les coupures au ministère de l'Environnement l'ont empêché d'assurer une surveillance adéquate.

Tous les ingrédients de Lac-Mégantic y sont : un gouvernement conservateur à forte consonance idéologique, une déréglementation tous azimuts et des coupes dans systèmes de surveillance, un laxisme inconcevable dans la protection du public qui mène inévitablement à une tragédie qui aurait été évitée dans des conditions normales. Pour Mégantic, le bouc émissaire parfait est Tom Harding, conducteur de la locomotive. Pour Walkerton, c'étaient les frères Koebel. Mais il y a une différence de taille : au final, Mike Harris a perdu la confiance des citoyens et le pouvoir, alors que Stephen Harper continue de nier sa responsabilité et de tenter de faire porter le chapeau à la MMA.

Cette ligne de défense tiendra-t-elle encore longtemps ? Il est permis d'en douter et les gens de Lac-Mégantic ont raison de continuer de demander des comptes. Selon le rapport du BST, les chargements de pétrole brut transportés par les compagnies ferroviaires sont passés de 500 wagons en 2009 à 160 000 en 2013. Transport Canada n'a rien fait pour encadrer la croissance fulgurante du transport de cette matière dangereuse d'un bout à l'autre du pays. Il a aussi fermé les yeux sur les lacunes manifestes de la MMA en matière de sécurité. On peut présumer que ce laxisme n'est pas étranger à l'agenda pétrolier du gouvernement Harper : sortir le pétrole au plus vite, coûte que coûte.

Ce même gouvernement veut aujourd'hui nous convaincre que les projets d'oléoducs présentement sur la table sont sécuritaires. Or, qu'a-t-il fait pour s'en assurer ? Il a procédé à la plus importante déréglementation de l'histoire du pays en défaisant des pans entiers de notre régime de protection de l'environnement et de la sécurité des communautés. Il continue de laisser les pétrolières surveiller elles-mêmes leurs installations et faire rapport, parfois avec plusieurs jours de retard, sur les fuites de pétrole. Il a confié à l'Office national de l'énergie - un organisme qui n'a jamais refusé un projet pétrolier - le mandat d'approuver les projets d'oléoducs. Finalement, il a mis des barrières aux citoyens qui veulent faire valoir leurs droits.

À Mégantic non plus on ne les a pas écoutés.

Les ingrédients sont réunis à nouveau. Attendrons-nous une autre catastrophe ? Un Walkerton a été suffisant pour mettre le gouvernement Harris face à ses responsabilités. Au tour du gouvernement Harper maintenant de reconnaître les siennes ou de frapper son Walkerton.

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