Deux pays, deux révolutions, deux armées, deux partis islamistes, deux peuples divisés. Deux c'est la complémentarité et la dualité. Les événements en Tunisie et en Egypte illustrent l'incapacité de nos dirigeants politiques ou militaires à rechercher l'unité, le compromis, la négociation, le dialogue, pour ne retenir que la dualité.
Deux révolutions
La Tunisie avait ouvert la voie, lors de l'hiver 2010/2011 la révolte gagne l'ensemble du pays après un fait déclencheur: l'immolation d'un marchand ambulant de Sidi Bouzid épuisé par les humiliations, il "enflamme" toute une région, ce vieux pays pétri de culture se réapproprie la parole et recouvre la liberté confisquée pendant plus d'un demi siècle. On s'épuisera vainement à expliquer pourquoi, à ce moment précis, tout un peuple se mobilise pour la même raison: la dignité. Sauf à se référer à la vieille règle du théâtre classique: "unité de temps, unité de lieu, unité d'action". Mais on ne percera pas le mystère, pourquoi là, pourquoi maintenant?
L'Egypte enchaîne quelques semaines plus tard, comme une évidence, comme en écho, comme un lien invisible qui dépasse les frontières et réunit les peuples. Le Pharaon tombera lui aussi, après des semaines de mobilisation à crier le même slogan que les tunisiens: "DÉGAGE". La mondialisation et l'appauvrissement de la population, les divisions internes et les intérêts convergents d'une partie de la bourgeoisie et des islamistes provoquent la chute de Moubarak. Le mouvement islamiste, seule force organisée, est prêt à assumer le pouvoir, pas la gestion d'un pays.
Deux partis islamistes
En Tunisie Ennahda, et en Egypte les Frères musulmans, remportent les élections, le premier scrutin démocratique dans chacun des deux pays. Ceux qui accèdent aux affaires le font après des décennies d'exil ou de clandestinité. Ils sont peu ou pas préparés à gouverner. L'inexpérience, la soif de revanche d'une partie des dirigeants, provoquent rapidement des tensions avec la société. Moins de deux ans après leur accession aux affaires, l'échec est là, terrible, et débouche sur des violences et un climat insurrectionnel.
Deux peuples
Malgré les tensions, les deux peuples, à nouveau réunis, ont la force de se mobiliser, de s'indigner, de manifester. C'est encourageant et rassurant. La liberté de parole acquise ne peut-être reprise. La violence n'est pas une fatalité. Et puis, parmi toutes les similitudes il y en a une qui est particulièrement frappante dans ce contexte. L'appel à l'armée, notamment en Egypte, celle qui a été le bras armé du régime, celle qui réprime. Cette armée retrouve sa place au cœur du jeu politique. La Tunisie est une exception dans le monde arabe, l'armée n'y joue aucun rôle, jusque-là. Les choses vont-elles changer?
Un seul choix
Les deux pays sont aujourd'hui fragilisés par la violence. Une autre voie est possible, l'emprunter suppose la volonté des responsables politiques, surtout ceux qui gouvernent, d'ouvrir le dialogue et de composer un large consensus. C'est le seul choix, l'autre mène à l'abîme.