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Propos haineux: un projet de loi qui sert l'islamisme

L'islam serait-il devenu un sujet si tabou que toute critique à son endroit doive être forcément vue comme discriminatoire?
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D'entrée de jeu, nous voulons exprimer notre profond désaccord face à ce projet de loi. À l'instar de la majorité des commentateurs qui se sont exprimés aussi bien devant cette Commission que dans les médias, nous considérons que le projet de loi 59 risque d'entraver dangereusement la liberté d'expression au Québec. En matière religieuse, si ce projet de loi était adopté, la Commission des droits de la personne se transformerait en un tribunal de la bonne conscience rappelant celui de l'Inquisition.

La libre communication des idées et des opinions est la première liberté fondamentale dont dépend l'exercice de toutes les autres libertés. Elle est à la base de la démocratie. C'est d'ailleurs le premier droit que les régimes totalitaires ou théocratiques s'empressent d'abolir.

Pour qu'elle prenne tout son sens et qu'elle soit pleinement effective, la liberté d'expression doit être la plus large possible et ne doit être limitée que dans des cas extrêmes. Elle doit toucher tous les sujets, sans qu'aucun ne soit tabou. Elle doit soulever la polémique et provoquer la contestation au risque de choquer. La liberté d'opinion peut même braver la bienséance et les convenances, comme en témoigne la littérature satirique et pamphlétaire.

Sur le plan religieux, la liberté d'expression est liée au droit au blasphème, c'est-à-dire au droit de critiquer les religions, leurs dogmes et leurs pratiques. Les religions peuvent et doivent être critiquées, d'autant que les croyances religieuses sont fondées sur l'irrationnel.

Le projet de loi 59 va à l'encontre du droit au blasphème, car il reprend certaines résolutions adoptées par des instances des Nations unies sous l'influence de l'Organisation de la coopération islamique.

Afin de réprimer toute critique de l'islam, les pays musulmans membres de cette association essaient sans relâche de faire rétablir à l'échelle mondiale le délit de blasphème, qu'ils camouflent sous l'euphémisme de diffamation des religions.

Au fil du temps, on est passé subrepticement de délit de blasphème à diffamation des religions, selon la terminologie de l'Organisation de la coopération islamique, puis à discours haineux contre la religion, selon la terminologie du projet de loi 59.

Les États musulmans se distinguent par leur hostilité à toute contestation de l'islam et de son fondateur, le prophète Mahomet. Ils disposent de lois sévères qui pénalisent la critique de leur religion ou sa dérision. Les sanctions varient de l'emprisonnement à la peine de mort. C'est pour avoir tenu des propos jugés blasphématoires que le blogueur saoudien Raif Badawi a été condamné à 1 000 coups de fouet et à 10 ans d'emprisonnement, et ce sont de simples caricatures de Mahomet qui ont été à l'origine du massacre de Charlie Hebdo.

Dans les pays occidentaux comme le nôtre, les militants musulmans, afin d'empêcher la critique de leur religion, brandissent le terme d'islamophobie comme une marque de racisme, alors que ce mot désigne proprement la crainte ou le rejet de l'islam en tant que religion. C'est ce qui explique qu'une personne soit accusée de racisme dès qu'elle remet en cause les dogmes et les pratiques de l'islam.

Le projet de loi 59 accentuera cette chasse arbitraire à la critique de l'islam et contribuera à donner une sorte d'immunité à cette religion, pourtant si rétrograde, notamment sur le plan de l'égalité homme-femme et sur celui de la séparation de l'État et de la religion.

Dans notre mémoire écrit, nous avons souligné 8 principaux défauts du projet de loi 59, mais, compte tenu du temps limité dont nous disposons, nous en mentionnerons seulement 4 dans notre présentation orale.

1- Le projet de loi 59 propose un régime judiciaire axé sur l'humiliation en prévoyant la publication d'une liste des contrevenants. L'opprobre social qui sera attaché à cette liste de la honte risquera d'empoisonner la vie de ceux et celles dont les noms y seront inscrits et même de ruiner leur carrière.

Comment peut-on justifier, en 2015, ce genre de mesure d'humiliation qui nous ramène au puritanisme d'antan, à l'époque de la liste noire de Séraphin?

2- En incitant les gens à dénoncer les autres, le projet de loi 59 instaurera une culture de la délation, où les citoyens n'oseront plus discuter de sujets controversés. La crainte d'être poursuivis pour des propos susceptibles d'être perçus comme offensants les incitera à brider leur liberté d'expression.

Le climat de méfiance généralisé qu'entraînera cette culture de la délation favorisera la mise en place d'une société conformiste où les gens, dans la crainte du jugement des autres, s'efforceront de penser et de se comporter servilement d'après les conventions de l'ordre établi. Le projet de loi 59 renforcera en fait le règne de la bien-pensance plutôt que d'enrayer les discours et les actes agressifs.

Voulons-nous vraiment que le Québec devienne une société conformiste et suspicieuse comme à l'époque du soviétisme?

3- Le projet de loi 59 consolidera le traitement de faveur déjà consenti aux religions par le Code criminel du Canada, dont l'article 319, paragraphe 3b, garantit l'impunité aux croyants pour tout propos haineux qu'ils tiendraient sur la base de leurs convictions religieuses.

Ce projet de loi sera foncièrement injuste envers les non-croyants. Sur le plan de la foi, le seul motif de discrimination retenu explicitement dans la Charte des droits et libertés de la personne est la religion.

L'incroyance n'y étant pas reconnue comme telle, les droits des personnes qui n'ont aucune conviction religieuse ne pourront pas être défendus par la Commission des droits de la personne. Pourtant, les incroyants peuvent, eux aussi, être l'objet de haine ou de violence de la part d'adeptes d'une confession donnée.

Or, la liberté de religion implique non seulement le droit de croire, mais aussi celui de ne pas croire; non seulement le droit de choisir et de pratiquer une religion, mais aussi celui de n'en choisir, ni de n'en pratiquer aucune.

Comment la Commission des droits de la personne pourra-t-elle inculper des croyants qui auraient exprimé des «propos haineux ou incitant à la violence», alors que le Code criminel du Canada leur garantit l'immunité? Ne risque-t-on pas de maintenir deux catégories de citoyens devant la loi?

4- Le projet de loi 59 a été présenté comme faisant partie d'un ensemble de mesures «visant à prévenir la radicalisation». Le gouvernement parle souvent de radicalisation, mais sans jamais en préciser la nature.

La radicalisation qui sévit aujourd'hui, ici comme ailleurs, émane du fondamentalisme islamique. La très grande majorité des actes de terrorisme qui ensanglantent le monde actuellement sont commis par des fanatiques musulmans qui, au nom d'Allah, mènent la guerre sainte, le djihad, dans le but d'imposer l'islam à toute l'humanité.

Pour enrayer cette radicalisation islamique, il vaudrait mieux cibler ce courant en tant que tel, en cerner les fondements idéologiques et en débusquer les différents rouages, plutôt que de chercher à entraver la liberté d'expression.

Pourquoi n'identifie-t-on pas clairement le radicalisme islamique et pourquoi refuse-t-on de le nommer?L'islam serait-il devenu un sujet si tabou que toute critique à son endroit doive être forcément vue comme discriminatoire?

En conclusion, si le projet de loi 59 vise réellement l'éradication des discours haineux et incitant à la violence, un incroyant pourra-t-il compter sur la Commission des droits de la personne pour faire interdire les versets du Coran aussi violents que ceux-ci:

• Sourate 4, verset 34: «Les hommes ont autorité sur les femmes, en raison des faveurs qu'Allah leur accorde sur elles [...]. Quant à celles dont vous craignez la désobéissance, réprimandez-les, éloignez-vous d'elles dans leurs lits et frappez-les.»

• Sourate 5, verset 33: «La punition de ceux qui font la guerre contre Allah et Son messager [...], c'est qu'ils soient tués, ou crucifiés, ou que soient coupées leur main et leur jambe [...], ou qu'ils soient expulsés du pays.»

L'islam, pas plus que les autres religions, ne doit jouir d'aucune protection particulière. Le gouvernement, dans son intention de lutter contre l'islamophobie, servira en fait l'islamisme en brimant le droit de critiquer les religions.

Comme l'a écrit le journaliste Brian Myles:

«Une société qui interdit de rire des religions et de les critiquer n'est plus une société libre et démocratique. C'est une société marquée par l'emprise du sacré sur le profane. Une société où le fait religieux et ses défendeurs ont préséance sur les individus. Le Québec a connu cette noirceur, il ne faut pas y retourner.»

Merci de votre attention.

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Mai 2017

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