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Le Québec a besoin d'une stratégie économique d'ensemble

TEXTE COLLECTIF - Toutes les économies dans le monde sont présentement confrontées à des changements majeurs: appels au protectionnisme, développement rapide du commerce électronique, robotisation, taux de croissance anémiques, etc. Dans le cas du Québec, les défis d'adaptation à ces changements sont d'autant plus grands que persistent certains problèmes chroniques.
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Ce billet de blogue est un texte collectif des membres du Comité des politiques publiques de l'association des économistes québécois.

Toutes les économies dans le monde sont présentement confrontées à des degrés divers à plusieurs changements majeurs : appels au protectionnisme, développement rapide du commerce électronique, robotisation, taux de croissance anémiques, etc. Dans le cas du Québec, les défis d'adaptation à ces changements sont d'autant plus grands que persistent certains problèmes chroniques, tels une croissance insuffisante de la productivité, l'érosion du secteur manufacturier, des infrastructures déficientes, des carences en innovation, un entrepreneuriat timoré et des investissements privés léthargiques. La diminution du nombre de personnes âgées de 15-64 ans représente aussi une difficulté étant donné que cette cohorte est celle qui alimente principalement la main-d'œuvre, l'entrepreneuriat et la demande de biens et de services.

Au cours des deux dernières années, le gouvernement du Québec a mis sur pied ou annoncé plusieurs mesures visant à rehausser le potentiel de l'économie québécoise. Cependant, en l'absence d'une stratégie d'ensemble, il y a un risque que ces mesures n'aient pas toute l'efficacité voulue et que certains enjeux majeurs ne reçoivent pas l'attention appropriée.

Nécessité d'une stratégie économique d'ensemble

Le gouvernement du Québec dispose de leviers importants pour influencer l'évolution de l'économie. À cet égard, il suffit de constater que 17 membres du Conseil des ministres sur 27, soit plus de la moitié, peuvent agir sur l'évolution de l'économie québécoise par leurs orientations et leurs actions dans des domaines aussi variés que les ressources naturelles, l'énergie, l'agroalimentaire, le tourisme, la fiscalité, la réglementation, l'immigration, l'enseignement supérieur, le développement durable, etc.

Cependant, la variété et l'importance de ces mandats ministériels peuvent faire illusion. La dispersion des moyens d'action dans un grand nombre de ministères et d'organismes ayant chacun à desservir leur clientèle propre peut empêcher l'action gouvernementale d'avoir toute la cohérence et l'efficacité nécessaires pour mobiliser et inciter les citoyens, les entreprises et l'ensemble des forces vives desquelles dépendent la créativité, le dynamisme et la productivité de l'économie québécoise.

L'action gouvernementale en vue du développement de l'économie sera plus efficace si elle procède d'une stratégie d'ensemble tenant compte des occasions favorables et des défis auxquels les agents économiques québécois seront confrontés au cours des prochaines années. Tout laisse présager en effet que tant les changements internes que les chocs extérieurs feront en sorte que, pour prospérer, l'économie québécoise devra être très différente dans 10 ans de ce qu'elle est présentement.

Cette stratégie d'ensemble devrait d'abord s'appuyer sur une orientation claire quant au rôle qu'entend jouer le gouvernement à l'égard du développement économique : se veut-il résolument proactif ou souhaite-t-il se limiter à maintenir un environnement d'affaires le plus favorable possible ?

Compte tenu de ses ressources humaines et budgétaires limitées, le gouvernement devrait aussi arrêter des priorités sur lesquelles concentrer son attention et guider l'action de ses ministères et organismes. En outre, il devrait se pencher sur l'efficacité des instruments à sa disposition. En effet, il est loin d'être évident que les mesures, principalement fiscales et financières, adoptées dans le passé ont eu les effets escomptés sur l'investissement privé, le développement régional, la productivité, l'exportation et l'innovation.

La stratégie devrait aussi prendre acte de ce que le gouvernement n'est pas le seul acteur pouvant influencer le devenir de l'économie québécoise. Le gouvernement fédéral, les instances municipales et régionales, les associations, les institutions, les réseaux de l'éducation et de l'enseignement supérieur, les instituts et des centres de recherche ont aussi des responsabilités, des moyens et des expertises pouvant et devant être mis à contribution.

Enfin, la stratégie devrait nettement viser un horizon qui dépasse les calendriers budgétaires ou électoraux. Aussi, l'adoption d'une stratégie économique engageant clairement le gouvernement plutôt que l'un ou l'autre de ses ministres aiderait à éviter les réorientations ou les abandons de programmes qui surviennent trop souvent à l'occasion d'un changement de ministres ou de l'adoption d'un nouveau budget.

Quelques pistes

Dans un ouvrage récent (Maximiser le potentiel économique du Québec, PUL, 2016), le Comité des politiques publiques de l'Association des économistes québécois a proposé un certain nombre de pistes et de moyens d'action qui pourraient être examinés au moment de l'élaboration d'une stratégie de développement économique. Ces pistes consistent, entre autres, à augmenter la productivité, à mieux intégrer les immigrants, à faire les bons investissements dans les infrastructures, à instaurer un régime fiscal plus incitatif, à développer l'entrepreneuriat, à favoriser une plus grande concurrence au sein des secteurs réglementés, et à donner aux municipalités, notamment à Montréal, les moyens nécessaires pour assumer adéquatement leurs responsabilités en matière de développement économique.

L'ouvrage du Comité des politiques publiques comporte aussi une recommandation à l'effet d'assurer une meilleure distribution des revenus et ce, non seulement pour des raisons d'équité sociale, mais aussi parce qu'il en résulterait une augmentation du potentiel économique du Québec du fait d'une plus grande participation des Québécois au marché du travail. Dans le même esprit, ajoutons que des mesures telles la hausse du salaire minimum ou l'instauration d'un revenu minimum garanti doivent être considérées non seulement sous l'angle de l'équité sociale, mais aussi en tant qu'instruments de croissance et de développement de l'économie.

Conclusion

Nous croyons que le gouvernement du Québec devrait se doter d'une stratégie d'ensemble qui établisse les objectifs qui guideront son action en matière économique. Ces objectifs devront être clairs, réalistes et mesurables et toucher, entre autres, la hausse de la productivité, la croissance des exportations, la numérisation des entreprises et l'entrepreneuriat. La stratégie devrait aussi préciser les orientations que le gouvernement entend suivre pour atteindre ces objectifs.

Ce billet de blogue est cosigné par Mario Lefebvre, président, Jean-Claude Cloutier, François Delorme, Thérèse Laflèche, Jean-Luc Landry et Carole Vincent.

Note : Ce texte s'appuie sur un document plus complet disponible ici.

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