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Des fourmis, des hommes et leurs jambes

Le syndrome des jambes sans repos serait dû à une anomalie génétique du métabolisme de la dopamine dans le cerveau.
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Il arrive que vous vous sentiez comme si vous aviez des fourmis dans les jambes et vous avez l'impression que vos jambes ne veulent pas s'arrêter de marcher, de taper du pied, etc. Vous souffrez peut-être du syndrome des jambes sans repos mieux connu sous son acronyme : SJSR ou en anglais RLS (restless-legs-syndrome). Fort heureusement, dans la grande majorité des cas, le problème est d'intensité légère. Mais dans d'autres cas, il pourrait entraîner des troubles d'insomnies graves. Les symptômes internationalement reconnus du SJSR sont :

  1. Fort besoin de bouger les membres, besoin souvent associé à des paresthésies (sensation de picotement ou de fourmillement) ou dysesthésies (autres sensations sensorielles anormales).
  2. Agitation motrice.
  3. Ces problèmes s'aggravent au repos, mais sont passagèrement soulagés en bougeant.
  4. Ces problèmes sont plus graves le soir ou la nuit.
  5. Insomnies.
  6. Mouvements périodiques des extrémités durant le sommeil. Ou mouvements involontaires des extrémités (pieds ou mains) durant l'éveil ou au repos.
  7. Pas d'atteintes neurologiques.
  8. Tendance à s'aggraver avec l'âge.
  9. Cas semblables dans la famille.

Les quatre premiers symptômes sont obligatoires pour identifier un SJSR, les autres sont facultatifs. Le SJSR toucherait globalement 5% de la population mondiale. Les Canadiens (13%) et les Québécois (20%) en seraient plus souvent victimes (Réf. : Calado P.F., Le syndrome des jambes sans repos, Pharmactuel, Vol. 34 No. 3, Mai-Juin 2001 p.65). Les femmes en sont plus souvent atteintes que les hommes. La maladie est héréditaire dans la moitié des cas. Ainsi chez douze paires de jumeaux identiques, dix présentaient une symptomatologie de SJSR ( Réf. : Mathis J., Grandjean Ph., Le Restless-Legs-Syndrome en pratique, Forum Médical Suisse, No 4, 23 janvier 2002 p.68). La paresthésie se ferait surtout sentir dans les membres inférieurs (80%), mais elle peut aussi atteindre les membres supérieurs. Les personnes atteintes se plaignent de fourmillements et de picotements. Chez les vieillards, principalement chez ceux qui ne peuvent pas bouger les jambes, le tout peut être accompagné de douleurs. Si ces sensations disparaissent ou s'atténuent fortement quand la personne bouge, il est alors quasiment certain qu'il s'agit du SJSR.

Dans la plupart des cas, la personne atteinte du SJSR aura aussi des mouvements périodiques des jambes durant le sommeil (PLMS : periodic legs movement syndrome). On peut s'en rendre compte en passant une polysomnographie (enregistrement sur un polygraphe des mouvements en état de sommeil), mais dans bien des cas, c'est le conjoint qui remarque ces mouvements qui peuvent aller d'un discret mouvement du gros orteil jusqu'à des coups de pieds violents. Il peut aussi ne s'agir que d'un balancement rythmé d'un pied. Mais une personne peut avoir un PLMS sans souffrir du SJSR et vice versa. La fréquence du SJSR augmente chez les personnes souffrant d'urémie (taux d'urée anormalement élevé dans le sang), de diabète ou d'arthrite rhumatoïde.

Il est important de consulter pour savoir si une cause neurologique sous jacente peut exister surtout quand aucun autre membre de la famille n'en est atteint, si le SJSR provoque des insomnies graves, quand les premiers symptômes sont apparus après la quarantaine ou encore si le SJSR est douloureux ou s'il n'est pas contrôlé par les traitements prescrits. Une polysomnographie est réalisée pour vérifier si nous ne sommes pas en présence d'apnées du sommeil (arrêts involontaires de la respiration durant le sommeil).

Le syndrome des jambes sans repos serait dû à une anomalie génétique du métabolisme de la dopamine dans le cerveau.

Le syndrome des jambes sans repos serait dû à une anomalie génétique du métabolisme de la dopamine dans le cerveau. Cette substance est un neurotransmetteur fortement impliqué dans les fonctions sommeil-éveil du cerveau. Une déficience en fer dans le cerveau pourrait aussi jouer un rôle important dans l'émergence du syndrome.

Le SJSR ne se guérit pas, mais un bon traitement améliore de beaucoup la situation. Quand les symptômes sont légers, des massages des jambes ou des endroits où sont ressentis les malaises, des bains chauds ou au contraire des douches froides peuvent s'avérer efficaces. Marcher ou faire des exercices stationnaires sont aussi des alternatives bénéfiques. Il est aussi recommandé alors d'éviter la caféine, la nicotine et les abus d'alcool. Toutes ces substances sont en effet susceptibles d'exacerber le SJSR. Certains médicaments peuvent aussi en favoriser l'apparition ou l'intensité. Parmi ces médicaments se retrouvent les neuroleptiques, le lithium, les béta-bloqueurs, les antidépresseurs tricycliques, les anticonvulsivants, les anti-H2 (un antihistaminique) et la paroxétine.

Lorsque les symptômes sont plus sévères ou encore s'ils provoquent des insomnies incontrôlables, il convient d'intervenir avec des médicaments.

Lorsque les symptômes sont plus sévères ou encore s'ils provoquent des insomnies incontrôlables, il convient d'intervenir avec des médicaments. Dans un premier temps, on vérifiera par une prise de sang le taux de fer dans le sang. Si celui-ci est plus bas que 50 µg/l, un supplément en fer sera prescrit. Finalement, certains médicaments pourront être utilisés. La personne souffrant de SJSR doit savoir qu'en général plusieurs visites chez son médecin sont à prévoir dans le but de trouver spécifiquement quel médicament lui convient le mieux et dans quel dosage. Chez 50% à 80% des individus, le problème semblera se déplacer. Alors qu'il survenait avant le sommeil, en fin de soirée, avant le traitement, il se produit maintenant en fin d'après-midi ou en début de soirée. Un changement de médicaments ou un ajustement incluant d'autres médicaments règle habituellement ce problème.

Plusieurs types ou classes de médicaments peuvent être utiles incluant : 1) les agents dopaminergiques (influant sur la synthèse ou l'utilisation de la dopamine; ex. le lévodopa); 2) les benzodiazépines (ex : le clonazépam); 3) les opiacés (ex. : les narcotiques) et 4) les anticonvulsivants (ex : carbamazépine). Habituellement, les traitements commenceront par les agents dopaminergiques, si ceux-ci ne procurent pas les résultats escomptés ou encore s'ils provoquent des effets secondaires trop dérangeants, ils seront remplacés par les benzodiazépines, puis, si ceux-ci n'apportent pas d'améliorations, on se rabattra sur les opiacés et finalement les anticonvulsivants. Habituellement, on teste le médicament pour une période de 30 jours. S'il n'a pas bien répondu, on passe à un autre dosage ou à un autre médicament de la même famille ou carrément à un médicament de la famille suivante comme nous l'avons expliqué.

Pour bien des personnes, le syndrome des jambes sans repos n'est qu'un malaise bénin qu'ils peuvent corriger par des mesures simples comme éliminer la nicotine de leur vie, diminuer la caféine et la consommation d'alcool ou faire un peu d'exercice avant d'aller au lit. À l'autre bout du spectre, existent malheureusement des gens chez qui le RLS est synonyme d'insomnies sévères qui vont favoriser des dépressions majeures. Quelques très rares cas de suicide sont même survenus.

Pour tous ceux qui se situent entre ces deux limites, il existe des traitements pharmacologiques adaptés à leur situation. Mais il leur faudra peut-être user d'un peu de patience avant de trouver le meilleur agent avec la meilleure dose. Chaque individu est différent, on ne doit jamais l'oublier en médecine. Dans le cas du SJSR, cette règle est tout particulièrement indiquée.

Avril 2018

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