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A la frontière russe, onze Ukrainiennes bloquées par le convoi humanitaire

A la frontière russe, onze Ukrainiennes bloquées par le convoi humanitaire

"Vous savez pas quand il passe, le convoi? Tant qu'il ne passe pas, on ne nous laissera pas passer". Depuis cinq jours, Olga et dix autres Ukrainiennes attendent que leur car, stationné à deux pas du poste-frontière russe de Donetsk, puisse rejoindre leur ville natale, Lougansk.

"Nous aussi on est un convoi humanitaire. On apporte du pain, du lait, des médicaments à nos familles qui sont sous les bombes", explique Irina, la cadette du groupe, qui s'est donné pour mission de retrouver ses grands-mères dont elle n'a pas eu de nouvelles depuis un mois.

Parti mercredi soir de Moscou, le car des onze femmes devait rejoindre jeudi soir Lougansk, bastion des séparatistes prorusses encerclé par l'armée ukrainienne, mais il n'a pas pu aller plus loin que Krasnodon, ville de la région de Lougansk à une vingtaine de km de la frontière.

"Nous entendions des tirs d'artillerie de plus en plus distinctement. Des rebelles ont arrêté notre car, et quand ils ont vu que nous n'étions que des femmes, des civils, ils nous ont forcées à retourner en Russie car la zone était trop dangereuse", explique Olga.

"Ils avaient peut-être peur que notre car (blanc, ndlr) soit confondu avec un des camions (blancs aussi) du convoi humanitaire russe et soit pris pour cible par l'armée ukrainienne", avance-t-elle.

Les quelque 300 camions russes, porteurs de 1.800 tonnes d'aide aux populations de l'est de l'Ukraine ravagé par les combats, sont bloqués depuis jeudi à une trentaine de km du poste-frontière russe de Donetsk, dans la localité de Kamensk-Chakhtinski.

Assises sur des petits tabourets en bois, les onze Ukrainiennes regardent leurs compatriotes qui fuient les combats traverser le poste-frontière russe de Donetsk. "Eux ils partent, et nous notre rêve c'est de revenir", murmure Olga, essuyant quelques larmes sur ses joues.

Toutes affirment qu'elles n'ont pas peur de traverser la zone de combats pour rejoindre Lougansk. "L'important c'est qu'on y arrive. Je suis prête à rester ici un mois s'il le faut mais il faut que je sache si mes enfants sont vivants", raconte Liouba, tandis que les deux conducteurs du car, Ukrainiens eux aussi, lui promettent qu'ils l'amèneront à Lougansk "coûte que coûte".

En attendant, leur car a été transformé en un mini-camp: les toilettes font office de cuisine, les sièges ont été transformés en lit et les bagages en coussin.

Mais le confort est loin d'être au rendez-vous, surtout pour les plus âgées du groupe: "Essayez donc de dormir cinq nuits d'affilée sur des sièges de bus quand vous avez 57 ans et qu'il fait plus de 30 degrés: c'est un enfer", confie Olga en coupant une pastèque. "Quatre jours sans douches, sans vraies toilettes... C'est dur, mais c'est ce que vivent nos proches depuis deux semaines", rappelle Tatiana, 51 ans, à ses camarades.

Lougansk se trouve en proie à de violents combats à l'arme lourde depuis des semaines et les autorités locales ont multiplié les appels au secours face à une situation "critique" alors qu'eau, électricité, communications et approvisionnement sont coupés depuis deux semaines et les accès de la ville fermés.

Si certaines vivent en Russie depuis plusieurs années, d'autres ont quitté Lougansk il n'y a que quelques mois pour échapper aux combats. C'est lorsque les télévisions russes ont enchaîné les reportages montrant "la catastrophe humanitaire" dans leur ville, qu'elles ont décidé de revenir.

"A Moscou, je pleurais tous les jours devant la télévision. Ca me rendait folle de ne pas pouvoir aider ma famille, il fallait que je revienne et que je les convainque de se réfugier en Russie", explique Tatiana.

Liouba assure au contraire qu'une fois arrivée à Lougansk, elle ne le quittera plus.

"Nous reconstruirons ce qui a été détruit par Kiev, et nous aurons une nouvelle vie avec Moscou", estime-t-elle. "On sera des citoyens russes, et non plus ukrainiens".

all/neo/ml

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