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Après la destruction de l'avion malaisien, la crise ukrainienne prend une nouvelle ampleur

Après la destruction de l'avion malaisien, la crise ukrainienne prend une nouvelle ampleur

Un avion de ligne vraisemblablement abattu par un missile, près de 300 victimes sans aucun rapport avec le conflit : la crise ukrainienne prend brutalement une nouvelle dimension qui va mettre tous les protagonistes, en premier lieu les Russes, sous forte pression, estiment vendredi des analystes.

L'ampleur du drame et son caractère inattendu (les précédents d'avions de ligne abattus en survolant une zone de conflit sont rares) ont une première conséquence : prouver s'il en était besoin que "ce qui se passe dans l'est de l'Ukraine est bien une sorte de guerre, on n'est plus dans un contexte de conflit local", selon Camille Grand, directeur de la Fondation pour la Recherche stratégique (FRS).

"Après le crash d'un vol Amsterdam-Kuala Lumpur dans la région du Donbass (est de l'Ukraine), le conflit va probablement apparaître moins lointain aux populations en Europe et au-delà", renchérit l'analyste allemand Holger Schmieding, tandis que Thomas Gomart, de l'Institut français des relations internationales (IFRI), estime que "l'est de l'Ukraine est devenu un cancer pour la sécurité européenne".

L'avion, avec à son bord 298 personnes de toutes nationalités, dont une centaine de spécialistes du sida se rendant en Australie pour la conférence mondiale AIDS 2014, a vraisemblablement été détruit en vol par un missile sol-air, disent des experts américains.

Russes et rebelles prorusses d'une part, Ukrainiens d'autre part, ont continué vendredi à se rejeter la responsabilité du tir fatal.

"Mais si l'hypothèse la plus vraisemblable est confirmée, c'est-à-dire un tir des séparatistes, cela va encore durcir les relations entre Occidentaux et Russes. Car les séparatistes ne se sont pas armés tout seuls", souligne M. Grand, pour qui "les gouvernements occidentaux ne peuvent pas rester les bras croisés face à un événement d'une telle ampleur".

Depuis le début de la crise ukrainienne, il y a plus de quatre mois, Américains, Européens, ainsi que les autorités de Kiev, accusent Moscou de laisser passer armes et matériel destinés aux rebelles séparatistes à travers la frontière.

Si un tir en provenance des groupes rebelles est confirmé, la Russie va être de nouveau sommée de se dissocier des clairement des séparatistes et de contrôler sa frontière avec l'Ukraine, estime à Moscou Chris Weafer, analyste au sein du groupe de consultants économiques Macro Advisory.

Faute de mesures tangibles de la part de la Russie, "la pression politique occidentale s'intensifiera, et, avec elle, le risque d'entrer en phase 3 des sanctions", à savoir l'adoption de mesures susceptibles d'affecter gravement l'économie russe, ajoute cet analyste.

"Nous estimions jusqu'à présent que ces sanctions étaient improbables, mais la tragédie de l'avion malaisien peut potentiellement changer la donne", ajoute-t-il.

Avant même cette catastrophe aérienne, les Etats-Unis avaient annoncé mercredi un durcissement des sanctions économiques qu'ils imposent à la Russie, visant notamment le géant russe des hydrocarbures Rosneft, et la banque de la compagnie du gaz Gazprom.

Selon les experts, il est probable que Washington intensifie ses pressions sur les Européens pour qu'ils montent d'un cran dans les sanctions, jusque-là limitées, qu'ils ont prises contre Moscou.

Les mesures dites de niveau 3 qu'ont toujours agitées les Européens mais qu'ils sont -pour certains pays- très réticents à prendre, touchent au coeur de leurs relations économiques avec la Russie : activités financières des oligarques russes à la City de Londres, contrat des navires de guerre Mistral entre la France et Moscou, entreprises allemandes très implantées en Russie, etc.

Au-delà du débat sur les sanctions, les pressions vont aussi s'exercer sur Kiev et en particulier sur le président ukrainien Petro Porochenko, qui a relancé l'offensive militaire pour reconquérir les régions de l'est aux mains des séparatistes. "La tragédie de l'avion braque les projecteurs internationaux sur l'attitude de chacun dans ce conflit", résume l'Allemand Holger Schmieding.

Le président russe Vladimir Poutine a rejeté la responsabilité du drame sur l'Ukraine, considérant qu'il "n'aurait pas eu lieu si les opérations militaires n'avaient pas repris" à l'initiative de Kiev.

Un scénario moins pessimiste suggère que la destruction du Boeing va pousser les belligérants à trouver une solution négociée. "Le seul rayon d'espoir de ce terrible crash est qu'il puisse servir de catalyseur en vue de sérieuses négociations", selon une note publiée sur le site internet de Carnegie Europe.

Mais la plupart des analystes soulignent l'impossibilité de prévoir les réactions de Vladimir Poutine et ses plans à long terme pour l'Ukraine.

Et à Kiev, le politologue indépendant Volodymy Fessenko juge que "l'incident aura un impact sur l'opinion publique en Ukraine et rendra impossible toute négociation avec les séparatistes à l'avenir".

bur-cf/thm/bds

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