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Roumanie: scandales dans la famille du président, la justice fait ses preuves

Roumanie: scandales dans la famille du président, la justice fait ses preuves

Le frère du président roumain Traian Basescu arrêté pour trafic d'influence, le gendre poursuivi pour faux: deux scandales retentissants témoignent d'une société minée par la corruption mais aussi d'une justice qui ne craint plus de toucher au sommet de l'Etat.

Vendredi, le frère de M. Basescu, Mircea, était placé en détention provisoire suspecté d'avoir accepté 250.000 euros de pots-de-vin pour intervenir en faveur d'une figure du milieu criminel, Sandu Anghel, accusé de tentative de meurtre.

Mardi, les procureurs ont confirmé que l'un des deux gendres du président est poursuivi pour "faux et escroquerie" dans une affaire de restitution de biens confisqués sous le communisme.

L'avocat Radu Pricop, époux de Ioana, fille aînée de M. Basescu, et son associé auraient empoché 10 millions d'euros après avoir utilisé de faux documents pour étayer une demande de dédommagement pour une propriété saisie par les communistes.

Le chef de l'Etat, qui a fait de la lutte contre la corruption son principal cheval de bataille depuis son arrivée au pouvoir fin 2004, est monté à deux reprises au créneau pour se défendre, assurant n'avoir rien à se reprocher.

Il a appelé les magistrats à faire leur devoir et accusé la coalition de centre gauche au pouvoir de vouloir "faire main basse sur la justice".

Selon les procureurs et des enregistrements vidéo diffusés par les médias, Mircea Basescu avait fait valoir sa qualité de frère du président pour faire croire qu'il avait de l'influence sur les magistrats afin que Sandu Anghel soit condamné à une peine plus légère.

Ce dernier a toutefois été condamné en mai à huit ans et neuf mois de prison.

Mais des questions demeurent alors que les relations --y compris de parenté par alliance-- entre Mircea Basescu et M. Anghel, visé par une centaine de dossiers notamment d'évasion fiscale, étaient connues depuis plusieurs années.

"Ce qui m'inquiète c'est de voir l'étendue des liens entre des clans mafieux et des hommes politiques ou proches de la sphère politique", indique à l'AFP Laura Stefan, experte anticorruption du groupe de réflexion ExpertForum.

Une enquête sur ce supposé trafic d'influence avait été lancée en 2011 mais n'avait pas avancé jusqu'à ce que le frère du président porte plainte contre la famille Anghel pour "chantage", le mois dernier. Plusieurs membres de ce "clan" ont depuis été mis en prison.

Qu'il s'agisse de figures du milieu ou d'hommes politiques, les analystes soulignent que la justice roumaine, soumise à une stricte surveillance de Bruxelles, est de plus en plus décomplexée, ses enquêtes visant aussi bien la majorité de centre gauche que le centre droit proche de M. Basescu.

Depuis deux ans, un ancien Premier ministre et plusieurs ministres reconnus coupables de corruption ont été condamnés à de lourdes peines de prison ferme. Plusieurs sont actuellement derrière les barreaux, ce qui était "inimaginable il y a à peine cinq ans", confient de nombreux Roumains.

Selon un bilan officiel, 1.051 personnes ont été condamnées définitivement pour corruption de haut niveau en 2013, soit 41% de plus qu'en 2012.

Avec l'arrestation du frère du président, "la justice a montré qu'elle est capable d'enquêter sur n'importe qui, même au sommet du pouvoir", souligne Mme Stefan, faisant état de son "optimisme" à cet égard.

Autre effet de ces scandales, "les hommes politiques condamnés pour corruption ne peuvent plus invoquer la thèse selon laquelle la justice est contrôlée par le président", écrit Rodica Ciobanu, éditorialiste du quotidien en ligne Gandul.info.

M. Basescu a notamment été à l'origine de la nomination de l'ancien et de l'actuel chef du Parquet anticorruption (DNA), ce qui a incité ses adversaires à accuser les procureurs de "répondre à ses ordres".

Mais les rapports de Bruxelles sur la réforme de la justice ont systématiquement loué l'activité "efficace" et sans parti pris du DNA.

D'autre part, souligne Gandul, "le discours anticorruption de M. Basescu aura désormais du mal à convaincre (...) alors que deux membres de sa famille sont poursuivis".

Pour l'éditorialiste, tout ce qu'on peut espérer est que "la justice ait créé suffisamment d'anticorps pour faire guérir la société, même si la classe politique reste infectée".

mr/iw/bir

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