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Egypte: peines de prison sévères pour 3 journalistes, tollé à l'étranger

Egypte: peines de prison sévères pour 3 journalistes, tollé à l'étranger

Un tribunal égyptien a condamné lundi à des peines de 7 à 10 ans de prison trois journalistes d'Al-Jazeera accusés de soutien aux islamistes, un verdict qui a suscité une levée de boucliers à l'étranger, Washington exhortant Le Caire à les gracier.

Cette affaire est vue comme un test pour les autorités égyptiennes après la destitution il y a près d'un an du président islamiste Mohamed Morsi par l'armée, et pour le système judiciaire qui vient de condamner à mort 183 islamistes présumés.

Une campagne de mobilisation internationale sous le slogan "le journalisme n'est pas un crime" a été lancée, et les proches des journalistes espéraient un acquittement au lendemain de la visite au Caire du secrétaire d'Etat américain John Kerry.

L'Australien Peter Greste et l'Egypto-canadien Mohamed Fadel Fahmy, chef du bureau de la chaîne qatarie avant qu'elle ne soit interdite en Egypte, ont été condamnés à sept ans de prison, et l'Egyptien Baher Mohamed a écopé de 10 ans. Parmi leurs co-accusés, deux journalistes britanniques et une néerlandaise ont été condamnés à dix ans de prison par contumace.

Au total, 20 personnes comparaissaient dans cette affaire: 16 Egyptiens accusés d'appartenance à une "organisation terroriste" -les Frères musulmans- et d'avoir cherché à "nuire à l'image de l'Egypte" et quatre étrangers d'avoir diffusé "de fausses nouvelles" en vue de soutenir la confrérie.

A l'annonce du verdict, M. Fadel Fahmy s'est écrié "Ils vont payer pour ça, ils vont payer pour ça! Je le jure!"

"Nous sommes dévastés, c'est dur de trouver les mots pour décrire ce que nous ressentons. Ce n'est vraiment pas ce que nous attendions, nous espérions un acquittement", a dit à l'AFP Andrew Greste, dont le frère a reçu plusieurs prix prestigieux. "Nous continuerons à nous battre pour sa libération".

Pour Chaabane Saïd, avocat de la défense, "tous les journalistes devraient désormais s'inquiéter: il n'y a pas de justice, c'est la politique qui fait loi".

Al-Jazeera, que l'Egypte considère comme le porte-voix du Qatar auquel elle reproche son soutien aux Frères musulmans, a qualifié le verdict d'"injuste".

"Il n'y a aucune justification à la détention de nos trois collègues. Les avoir gardés en détention 177 jours est une honte. Les condamner défie la logique, le bon sens et toute apparence de justice", a réagi la chaîne.

Sur les neuf qui étaient détenus, outre MM. Fahmy, Greste et Baher, deux ont été acquittés et quatre ont écopé de sept ans. Huit autres accusés jugés en leur absence ont écopé de 10 ans de prison.

Au lendemain de sa rencontre au Caire avec le nouveau président égyptien Abdel Fattah al-Sissi, M. Kerry a dénoncé un verdict "effrayant et draconien".

"Nous appelons le gouvernement égyptien à gracier ces personnes ou à commuer leurs peines afin qu'elles puissent être libérées immédiatement, et à accorder la clémence à toutes les personnes condamnées pour des raisons politiques", a déclaré de son côté la Maison Blanche.

Plus tôt, un responsable à la présidence égyptienne a expliqué qu'aucune grâce ne peut intervenir avant qu'une cour d'appel n'ait statué.

L'Australie s'est dite "consternée", et les Pays-Bas et le Royaume-Uni ont convoqué les ambassadeurs d'Egypte. L représentante de l'ONU pour les droits de l'Homme, Navi Pillay, s'est dite "choquée et très alarmée"

Ce verdict est "un jour noir pour la liberté de la presse en Egypte", a estimé Amnesty International.

Ce verdict intervient deux semaines après l'élection à la présidence de l'ex-chef de l'armée Abdel Fattah al-Sissi, qui dirigeait déjà de facto le pays depuis la destitution et l'arrestation de M. Morsi le 3 juillet 2013.

Depuis, soldats et policiers ont tué plus de 1.400 manifestants pro-Morsi, arrêté plus de 15.000 personnes, dont des centaines ont été condamnées à mort ou à la perpétuité dans des procès expéditifs.

Alors qu'ils couvraient ces événements, MM. Greste et Fahmy avaient été arrêtés le 29 décembre dans une chambre d'hôtel transformée en bureau au Caire, où ils travaillaient sans l'accréditation obligatoire pour tous les médias.

Pour Human Rights Watch, ce verdict montre "comment les juges égyptiens ont été pris dans l'hystérie anti-Frères musulmans encouragée par Sissi".

Il y a près d'une semaine, un journaliste de l'antenne arabophone d'Al-Jazeera, Abdallah ElShamy, a en revanche été libéré pour raisons de santé, après cinq mois de grève de la faim.

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