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Darfour, Occitans, Araméens: l'autre Coupe du monde, en Suède

Darfour, Occitans, Araméens: l'autre Coupe du monde, en Suède

Darfour, Ossétie du Sud, Occitans ou encore Araméens: loin de l'agitation du Mondial brésilien, douze équipes de football de nations en quête de reconnaissance se sont donné rendez-vous en Suède pour disputer leur Coupe du monde.

Darfour United représente ce territoire soudanais en proie à la guerre civile et la famine. Et le gardien de but savoure sa présence à Ostersund, au coeur de la Suède, malgré les nombreux buts encaissés.

"Le football nous aide (...). Sinon, personne n'entendrait parler de nous", confie à l'AFP Ismail Gamaradin, alors que son équipe vient d'essuyer un 19-0 contre l'Ossétie du Sud, au premier tour de la Coupe du monde de la Confédération indépendante de football (CONIFA). Cette petite république, qui a proclamé son indépendance vis-à-vis de la Géorgie en 1992, est reconnue par la Russie.

La veille, Darfour United avait perdu 20-0 contre la Padanie, qui représente les aspirations autonomistes du nord de l'Italie.

Ismail avait à peine 11 ans quand la milice Janjaweed a abattu son père sous ses yeux, le forçant à fuir avec sa mère et sept autres membres de sa famille vers les camps de réfugiés, à trois jours de marche.

Là-bas, "il n'y a pas de nourriture, de médicaments ou d'éducation et les Nations unies nous disent qu'on doit retourner au Darfour l'année prochaine", s'alarme t-il. "Mais il y a toujours des massacres et des viols partout. On ne croit pas à la paix de sitôt".

Darfour United est composée de survivants d'un conflit qui ensanglante son pays depuis 2003 et qui a déjà fait des centaines de milliers de morts selon certaines estimations.

L'équipe s'est rendue en Suède grâce à l'association californienne i-Act, qui aide plus de 300.000 personnes dans les camps du sud du Tchad.

En 2005, l'association a apporté des ballons de foot dans les camps pour redonner une lueur d'espoir aux réfugiés. Depuis, le football est devenu un moyen de rappeler au monde une crise tombée dans l'oubli, alors que les projecteurs sont désormais braqués sur la Syrie et le Sud-Soudan.

Le football est l'une des seules choses qu'il leur reste, souligne le fondateur de l'association, Gabriel Stauring. "Si ces hommes ne jouent pas au football, ils se tournent vers les armes", déplore t-il.

D'autres peuples à l'histoire douloureuse sont représentés, comme les Kurdes, les Araméens-Syriaques et les Tamouls. Tous aspirent à la même chose: jouer au football pour refaire exister leur nation sur la carte du monde.

"Je suis vraiment honoré de porter le maillot de l'Eelam Tamoul", se réjouit un étudiant de 21 ans venu de Toronto (Canada), Umaesh Sundaralingam. Lui et les autres joueurs, venus aussi de France, d'Allemagne ou du Royaume-Uni, se sont rencontrés pour la première fois au tournoi.

Les rebelles du Tigre Tamoul ont combattu 37 ans les forces gouvernementales pour le contrôle d'une partie du nord du Sri Lanka. Bilan: 100.000 morts.

En Europe, des footballeurs soucieux de continuer à faire vivre leur patrimoine historique tiennent à participer à l'événement.

"Ils viennent ici pour la culture, pas pour le football", souligne Didier Amiel, l'entraîneur de l'équipe d'Occitanie (sud-ouest de la France). Lui assure que sa formation ne veut pas faire de politique, simplement témoigner d'une culture.

Une autre équipe française a fait le voyage, le Comté de Nice, ou plutôt Countea de Nissa comme le dit le programme officiel.

Malgré la volonté commune à toutes ces équipes de toucher un large public, les tribunes du stade d'Östersund sont restées vides pour la plupart des matchs.

Le président de la Confédération indépendante de football (CONIFA), Per-Anders Blind, juge qu'il faudra du temps pour que l'organisation, fondée il y a moins d'un an, se fasse connaître. Mais les rediffusions payantes de précédents matchs amicaux, vues d'après lui par plus d'un million de personnes, démontreraient l'intérêt du public.

Il espère que la finale dimanche non seulement battra des scores d'audience sur internet, mais attirera la population locale, sensible aux questions de défense du patrimoine culturel.

M. Blind, aux origines lapones, voudrait en effet qu'on cesse de parler d'une Coupe du monde des "minorités" ethniques, comme l'ont fait les médias suédois. "Ça me rend fou quand j'entends ça ! Regardez les Kurdes, même s'ils sont une minorité de 130.000 personnes en Suède, ils sont 40 millions dans le monde".

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