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Benjamin Lawsky, l'homme qui fait trembler BNP Paribas

Benjamin Lawsky, l'homme qui fait trembler BNP Paribas

Benjamin Lawsky, le régulateur bancaire de l'Etat de New York qui fait trembler BNP Paribas, est un ancien procureur ambitieux qui peut se targuer d'avoir fait plier plusieurs grandes banques mondiales mais dont les méthodes à la hussarde sont parfois décriées.

Ce grand brun de 44 ans, toujours rasé de près et à l'élégance froide, se fait connaître en août 2012 lorsqu'il menace de retirer la licence bancaire à la banque Standard Chartered, qu'il accuse de violation d'embargos américains.

Il crée alors la surprise en lançant des accusations circonstanciées contre cet honorable établissement britannique, alors que les enquêteurs fédéraux piétinent depuis plusieurs mois.

Une dizaine de jours plus tard, Standard Chartered passe un accord à l'amiable et garde sa licence, après avoir accepté de verser 340 millions de dollars.

La réputation de Benjamin Lawsky est née: "Loup solitaire" et franc-tireur pour les uns, courageux et fougueux pour les autres.

Deux ans plus tard, il veut frapper BNP Paribas, première banque française et première banque européenne en termes d'actifs, forte de 185.000 salariés et 38,82 milliards d'euros de chiffre d'affaires.

Associé aux autorités fédérales, il lui réclame selon les médias américains 10 milliards de dollars, menaçant, faute d'accord, de suspendre sa licence bancaire à New York, première place financière mondiale.

La plupart des personnes contactées par l'AFP pour parler de lui ont requis l'anonymat, invoquant la tournure diplomatique et politique du dossier BNP.

Lui-même s'excuse de ne pouvoir répondre aux sollicitations de l'AFP: "Ce n'est pas le bon moment car nous sommes en pleine discussions avec BNP", fait-il dire par ses services.

Né en Californie, marié à une procureure et père de deux enfants, Benjamin Lawsky est diplômé en droit de la prestigieuse Université de Columbia. Il fait ses premiers pas comme procureur à Manhattan où il est repéré par le sénateur démocrate Chuck Schumer, membre de la puissante commission des affaires judiciaires au Congrès américain.

C'est le gouverneur actuel de l'Etat de New York Andrew Cuomo, un démocrate pourfendeur de la corruption, qui en fait son protégé.

En 2011, l'Etat de New York fusionne les régulateurs du secteur bancaire et de l'assurance et crée le Department of Financial Services (DFS). Benjamin Lawsky est propulsé à la tête de cet organisme qui dispose d'un pouvoir de vie et de mort (octroi et retrait de licence) sur 4.400 banques et assureurs basés à New York.

Outre Standard Chartered, il peut se targuer d'avoir épinglé en trois ans des noms prestigieux comme la Bank of Tokyo-Mitsubishi UFJ, le cabinet Deloitte ou encore Credit Suisse.

Cette gloire a été forgée au prix de frictions et d'une rivalité inédite avec les autorités fédérales. En 2012, il n'a ainsi informé le Trésor, lui aussi compétent en matière d'embargo, de ses intentions contre Standard Chartered que quelques heures avant de les rendre publiques. Au Trésor comme au département de la Justice (DoJ), la plaie reste ouverte, selon plusieurs sources contactées par l'AFP.

Il revendique ce côté franc-tireur: "une dose de rivalité saine entre les régulateurs est nécessaire pour maintenir la stabilité de notre système financier", se défend-il dans un discours en avril 2013.

"Il écrit ses propres règles de jeu", confie un ancien collègue. "Il n'a pas peur de s'attaquer aux grosses banques là où les enquêteurs fédéraux soupèsent les conséquences politiques ou économiques et l'impact pour leur carrière", note pour sa part Michael Greenberger, ancien responsable du régulateur des marchés de matières premières.

Les pressions de la France dans le dossier BNP-Paribas semblent le laisser de marbre. "Il représente un Etat fédéré et non les Etats-Unis, ce qui le rend peu sensible aux pressions internationales", explique un collègue.

D'aucuns lui prêtent des ambitions politiques. On le voit succéder à son mentor au poste de gouverneur de New York. Dans cette perspective, accrocher BNP Paribas à sa liste de trophées serait un fait d'arme retentissant.

"Les Américains veulent que les banques paient pour tout ce qu'elles ont fait pendant la crise. S'il y arrive, nul doute que sa carrière politique est toute tracée", dit Michael Greenberger.

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