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Syrie : dans les rues et sur le net, la campagne de l'opposition contre l'"élection du sang"

Syrie : dans les rues et sur le net, la campagne de l'opposition contre l'"élection du sang"

Entre humour et dénonciation féroce, l'opposition syrienne mène campagne dans la rue et sur la toile contre l'"élection du sang" imminente que Bachar al-Assad est assuré de remporter après trois ans d'un conflit meurtrier.

Dans un quartier rebelle d'Alep (nord) des bennes à ordure ont été peintes en blanc et transformées en urnes électorales factices et gigantesques, symboles d'une élection jouée d'avance, dénoncée comme une "farce" par l'opposition et ses alliés occidentaux.

Les rebelles divisés assistent, incrédules et impuissants, aux derniers préparatifs de l'élection de mardi, qui se déroulera uniquement dans les zones contrôlées par Damas, et selon une loi excluant de facto toute candidature dissidente.

Il ne leur reste que l'humour, l'indignation, et internet.

"Déposez votre vote ici", a écrit en grand et en couleurs vives le jeune artiste Jumaa sur les bennes devenues parodies d'urnes.

"Nous te jetons à la poubelle, Bachar", "Bachar, ta place est ici", écrit-il sur d'autres bennes, alors que les habitants du quartier, au passage, y jettent leurs ordures.

Jumaa fait partie d'un groupe qui veut peindre des bennes dans tous les quartiers rebelles d'Alep afin que, au jour de l'élection, "Bachar puisse vraiment se rendre compte de son succès", plaisante-t-il.

Les habitants des quartiers rebelles d'Alep, où des raids quasi-quotidiens de l'armée aux barils d'explosifs ont fait près de 2.000 morts depuis janvier, accueillent favorablement le projet.

"C'est une vérité qui doit être connue: la place du meurtrier criminel Bachar, qui s'est auto-proclamé président de ce pays... est dans cette poubelle", déclare Bakri, religieux sunnite vêtu de la traditionnelle robe blanche.

D'autres campagnes ont été lancées pour dénoncer le scrutin, certaines devenant virales sur internet.

L'une d'elles est intitulée "Les élections du sang". Son logo montre une main déposant un bulletin de vote dans un baril d'explosif débordant de sang et flanqué du symbole des armes chimiques.

Trois ans d'un conflit meurtrier ont déjà fait plus de 162.000 morts en Syrie, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), et Damas a été accusé à plusieurs reprises d'utiliser des armes chimiques.

"Assad a tué tellement de gens qu'il n'y a aucune logique à ce qu'il demeure président", déclare Susan Ahmad, une des organisatrices de la campagne "Les élections du sang".

"Nous avons créé cette campagne parce que nous ne pouvons vraiment pas rester silencieux pendant que les médias officiels se servent de l'élection comme d'un grand exercice de propagande pour donner une apparence de légitimité au régime", a-t-elle expliqué à l'AFP par internet.

Cette campagne a débordé des zones tenues par les rebelles, et des militants ont pris d'énormes risques en distribuant des tracts dans des parties de Damas et Hama (centre) contrôlées par le régime, a-t-elle ajouté.

Une vidéo amateur sensée avoir été tournée à Hama montre une jeune femme voilée, de dos, en train de déposer sur les pas des portes et les pare-brise des voitures des tracts arborant le logo rouge et jaune de la campagne.

"Chaque jour, des gens dans toute la Syrie et dans d'autres pays envoient leurs propres vidéos et contributions", a déclaré Mme Ahmad.

D'autres militants font aussi passer leur message en vidéo. Dayaa al-Tase, un groupe dont le nom signifie "une situation folle", a réalisé un court-métrage partagé plusieurs milliers de fois sur Youtube.

Le scrutin, que M. Assad est assuré de remporter face à deux candidats inconnus servant de faire-valoir, vise surtout à renforcer sa position dans cette guerre qu'il veut gagner à tout prix.

Alors que la rébellion a appelé au boycott du scrutin, le régime a déjà réussi une partie de sa démonstration de force en mobilisant le 28 mai des milliers de Syriens expatriés ou réfugiés, qui ont voté dans 43 ambassades, en particulier au Liban voisin.

Le régime continue à surpasser en puissance de feu la rébellion, fragmentée et en guerre contre des jihadistes radicaux, grâce à son aviation, aux supplétifs syriens et aux combattants aguerris du mouvement chiite libanais Hezbollah.

str-ser/emb/sw

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