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Ukraine : référendum séparatiste dans l'Est, une "farce criminelle" pour Kiev

Ukraine : référendum séparatiste dans l'Est, une "farce criminelle" pour Kiev

Des milliers d'Ukrainiens de l'Est se sont pressés dimanche dans les bureaux de vote pour un référendum séparatiste jugé "illégal" par Kiev et l'Occident, mais qui pourrait déboucher de facto sur une nouvelle partition de l'Ukraine, déjà privée depuis mars de la Crimée.

Les insurgés armés pro-russes, qui contrôlent les principales villes du bassin du Donbass, frontalier de la Russie, ont convoqué la population locale (7,3 millions de personnes) pour valider leur projet d'"indépendance" des "républiques populaires" autoproclamées de Donetsk et de Lougansk.

Ils revendiquaient une participation de près de 70% vers 16H00 (13H00 GMT) et se disent certains d'obtenir un soutien massif.

A Kiev, le ministère des Affaires étrangères a qualifié dimanche la consultation de "farce criminelle" financée par la Russie. "Le référendum (...) est juridiquement nul et n'aura aucune conséquence juridique pour l'intégrité territoriale de l'Ukraine", estime le ministère.

Les autorités ukrainiennes sont déterminées à mener à bien le scrutin présidentiel anticipé prévu le 25 mai, qu'elles accusent la Russie de vouloir faire capoter. Les insurgés ne veulent pas de cette élection et traitent de "fasciste" le gouvernement provisoire au pouvoir depuis la chute du président Viktor Ianoukovitch fin février.

Le référendum, commencé dans le calme dimanche matin, a attiré une foule conséquente, qui ne craignait pas de passer au milieu d'hommes armés à l'entrée des bureaux de vote. Un certain enthousiasme était même apparent parmi les votants en dépit de la confusion autour des listes électorales et d'une attente parfois longue en raison du nombre réduit de bureaux de vote.

Après cette longue journée de vote - les bureaux sont ouverts jusqu'à 22H00 (23H00 à Lougansk), l'annonce des résultats a été reportée à lundi, a indiqué Roman Liaguine, chef de la commission électorale. Après le référendum "viendra le temps de la négociation avec les autorités de Kiev", a-t-il ajouté.

Dans le bastion rebelle de Slaviansk, le taux de participation est de 80%, a déclaré le maire autoproclamé Viatcheslav Ponomarev, qui s'est déclaré "satisfait".

Selon Irina Markina, membre de la commission électorale locale, "pratiquement toutes les circonscriptions" ont voté massivement pour le "oui" à l'indépendance.

Jusqu'ici le scrutin a semblé peu perturbé. Toutefois, selon un habitant de Krasnoarmiïsk, une ville de 65.000 habitants située à l'ouest de Donetsk dont le nom signifie "Armée rouge", des hommes armés ont fait irruption dans les bâtiments officiels où se déroulait le référendum et l'ont interrompu.

A Marioupol, (sud-est), ville où de violents affrontements entre forces ukrainiennes et pro-russes ont fait plusieurs morts cette semaine, des centaines de personnes ont fait la queue dans la rue pour voter. "Je suis prête à rester ici jusqu'à 20H00 pour voter si nécessaire", a déclaré l'une d'elles, Lioudmila Chvedova.

Dans cette ville d'un demi-million d'habitants, seule une poignée de bureaux de vote étaient ouverts en raison des problèmes de sécurité, ont admis les organisateurs.

A Slaviansk, des insurgés postés sur les check-points chargés de protéger la ville d'un assaut de l'armée ukrainienne ont eu la mauvaise surprise de ne pas pouvoir voter faute de papiers d'identité.

Un bureau de vote avait également été installé à Moscou à l'intention des habitants de Lougansk et Donetsk résidant en Russie et a attiré plusieurs milliers de votants, ont rapporté les agences de presse russes, sans que l'on sache qui avait organisé l'événement.

En revanche, sans la ville de Svatove (20.000 habitants), proche de Lougansk, le maire Evguen Rybalko a refusé d'organiser le référendum, bien que des dizaines d'hommes armés lui aient rendu visite à deux reprises pour tenter de l'en convaincre.

"Mon devoir est de faire respecter la loi ukrainienne. La population doit exprimer son opinion dans un cadre légal. Ce n'est pas le cas pour ce +référendum+", a-t-il expliqué à l'AFP.

Le ministère ukrainien des Affaires étrangères a rappelé dimanche que, selon un récent sondage de l'institut Pew Research Center, 70% des habitants de l'Est étaient favorables à l'unité de l'Ukraine.

"Le problème est que la grande majorité des vrais patriotes ukrainiens et des partisans d'une Ukraine unie font l'objet d'intimidations de la part des groupes terroristes pro-russes et, leur vie étant menacée, ont peur d'exprimer publiquement leur opposition aux bandits", souligne-t-il.

"Les résultats des référendums factices dans l'est de l'Ukraine seront probablement faux. On n'a même aucun moyen d'en vérifier la participation", a renchéri le ministre suédois des Affaires étrangères, Carl Bildt sur Twitter.

La crainte de Kiev et des Occidentaux face à ce scrutin est de voir se reproduire un scénario similaire à celui qui a abouti en mars au rattachement de la Crimée à la Russie, plongeant l'Occident et la Russie dans leur pire crise depuis la fin de la Guerre froide.

Les grandes puissances ont déjà adopté ces dernières semaines des sanctions contre la Russie et menacent de les étendre si la présidentielle n'a pas lieu.

Les "prétendus référendums étaient illégaux et nous ne reconnaissons pas leurs résultats", a fait savoir dimanche la porte-parole du chef de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, à la veille d'une visite à Kiev du président du Conseil européen, Herman Van Rompuy.

Le président français François Hollande a lui aussi rejeté les "vraies-fausses" consultations des rebelles. "Ce qui va compter à mes yeux, la seule élection qui vaudra, c'est celle du 25 mai, l'élection qui va permettre de désigner le président de toute l'Ukraine" qui "sera la seule autorité légitime", a-t-il ajouté.

Selon le secrétaire américain à la Défense, Chuck Hagel, la Russie n'a toujours pas retiré ses troupes massées à la frontière avec l'Ukraine en dépit de promesses en ce sens.

Les affrontements armés dans l'est et le sud de l'Ukraine ont fait des dizaines de morts ces deux dernières semaines.

bur-ahe/neo/sym

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