Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Venezuela : le dialogue gouvernement-opposition tourne à l'échange de reproches

Venezuela : le dialogue gouvernement-opposition tourne à l'échange de reproches

La première session du dialogue entre gouvernement et opposition au Venezuela, après plus de deux mois de protestations antigouvernementales parfois meurtrières, s'est limitée dans la nuit de jeudi à vendredi à six heures d'échanges de reproches des deux côtés.

Le président socialiste Nicolas Maduro, dauphin du charismatique Hugo Chavez, a reçu avec sa garde rapprochée au palais présidentiel de Miraflores les principaux dirigeants modérés de la coalition d'opposition de la Table de l'Unité démocratique (MUD), dont sa principale figure, le gouverneur et deux fois candidat à la présidentielle Henrique Capriles.

Arraché par l'Union des nations sud-américaines (Unasur), ce dialogue inédit depuis l'accession au pouvoir de M. Maduro en avril 2013 vise à mettre un terme à plus de deux mois de protestations d'étudiants et d'opposants concernant l'insécurité, la vie chère, l'inflation et la répression policière dans ce pays disposant des plus importantes réserves de pétrole au monde.

Les violences en marge des mobilisations ont fait officiellement 39 morts, la majorité par armes à feu, plus de 600 blessés et quasiment une centaine d'enquêtes ont été ouvertes contre des membres des forces de l'ordre soupçonnés d'atteintes aux droits de l'homme.

En présence d'une délégation de trois ministres des Affaires étrangères de l'Unasur (Brésil, Colombie, Equateur) et du nonce apostolique au Venezuela, la réunion avait débuté avec plusieurs heures de retard, peu avant 01H00 GMT.

Les échanges, retransmis en direct sur toutes les radios et télévisions du pays, ont montré que personne ne semblait prêt à faire la moindre concession, comme de coutume dans ce pays extrêmement polarisé entre partisans et opposants du modèle "chaviste".

Et pourtant, il manquait l'aile la plus radicale de l'opposition, le parti de droite Voluntad Popular, dont deux maires et le dirigeant, Leopoldo Lopez, accusés notamment d'attiser les violences, sont détenus depuis plusieurs semaines, et qui avait donc refusé de participer à la rencontre.

Le président Maduro a très vite rejeté catégoriquement les principales demandes de l'opposition, l'amnistie pour les personnes emprisonnées depuis le début des violences, et le désarmement des "collectifs", des groupes de civils armés proches du "chavisme".

"Il y a un temps pour la justice et un temps pour le pardon. Pour l'instant, c'est le temps de la justice", a-t-il déclaré à propos d'une éventuelle amnistie, avant de qualifier les collectifs de "simples groupes de travail social".

"Les collectifs sont en fait des organisations dont les traits de paramilitarisme sont évidents", a lancé de son côté le secrétaire général de la MUD, Ramon Aveledo.

Après avoir refusé ces deux demandes de l'opposition, M. Maduro a proposé que celle-ci participe à des commissions de discussion, et a convoqué une nouvelle rencontre pour mardi.

Le président "laisse passer une belle occasion de céder de façon stratégique à l'opposition pour augmenter l'espoir (de la population) en ce dialogue", a estimé vendredi le politologue Luis Vicente Leon, directeur de l'entreprise Datanalisis.

Et, alors que M. Maduro ne cessait de fustiger les "fascistes" et les "pustchistes", le député d'opposition Julio Borges a estimé que "maintenant plus que jamais, les manifestations pacifiques et constitutionnelles sont nécessaires pour faire pression pour parvenir à un changement radical et démocratique".

"Un des facteurs qui a incité (le gouvernement) à entamer un dialogue à tout prix" est "probablement la pression internationale" due à "la mauvaise image croissante (des autorités) générée par la répression des manifestations", estimait pour l'AFP avant le début de la réunionle politologue John Magdaleno.

En effet, promis depuis des semaines par les autorités, ce "dialogue" n'avait jamais pris forme, l'opposition refusant notamment de participer à "une farce" et "un monologue" tandis que Nicolas Maduro, faisant mine de tendre la main d'un côté, emprisonnait des opposants de l'autre.

"Nous ne croyons pas en un +dialogue+ où le régime fait un show politique en se servant des ministres de l'Unasur comme interlocuteurs", avait prévenu mardi Volonté Populaire.

Bien que la légitimité de l'Unasur ait été remise en question par des membres de l'opposition radicale, qui lui reproche une trop grande proximité avec Caracas, le chef de la diplomatie chilienne Heraldo Muñoz a estimé au contraire ces derniers jours que "ce sont les amis extérieurs qui peuvent contribuer" à apaiser la situation dans "un pays frère".

L'issue de ce "dialogue" laisse toutefois "sceptique" l'analyste John Magdaleno, pour qui tout dépendra de la capacité des parties à s'accorder pour le moins sur l'agenda des discussions.

mb/pc/ra/ia/jh

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.