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Condamnation à mort: l'Egypte dans une guerre juridique contre les islamistes

Condamnation à mort: l'Egypte dans une guerre juridique contre les islamistes

La condamnation à mort de 529 personnes pour des violences en Egypte a remis sur le devant de la scène l'implacable campagne de répression des autorités dirigées par l'armée contre les islamistes, emprisonnés par milliers et condamnés lors de procès expéditifs de masse.

Une fois jetés en prison, comme cela est arrivé à plus de 15.000 personnes en huit mois selon des responsables de la police, nombreux sont ceux qui croupissent dans des cellules insalubres sans avoir été notifiés de quelque accusation que ce soit, affirment des avocats.

Et pour ceux qui sont effectivement présentés à la justice, généralement pour les violences qui ont suivi la destitution début juillet du président islamiste Mohamed Morsi par l'armée, ce sont souvent des procès rapidement conclus qui les attendent. Et après ces verdicts rendus dans la précipitation, les experts affirment que viendront de longs et laborieux procès en appel.

Lundi, 529 personnes ont ainsi été condamnées à la peine capitale pour, entre autres, meurtres et tentative de meurtres sur des policiers. Mais avec un tel verdict, sans précédent dans l'histoire récente selon l'ONU, rendu lors de la seconde audience d'un procès au cours duquel la cour ne s'est même pas, selon la défense, assurée de la présence de tous les accusés, la peine sera très probablement revue.

Depuis décembre, au moins 822 personnes ont été condamnées à des peines allant de six mois de prison à la perpétuité lors de procès comptant au moins 10 accusés. Dans d'autres affaires, des dizaines de prévenus ont été acquittés.

Dans ce contexte, Sarah Leah Whitson, directrice de Human Rights Watch pour le Moyen Orient, a estimé que le procès de lundi n'était "qu'un procès parmi les dizaines de procès de masse qui ont lieu chaque jour en Egypte, criblés de violations graves des procédures".

Le gouvernement mis en place par l'armée après l'éviction de M. Morsi a tenu à réaffirmer que l'institution judiciaire était indépendante et que le tribunal avait prononcé les peines capitales après "un examen attentif de l'affaire".

De son côté, la police a assuré n'avoir arrêté, sur ordre du parquet, que des personnes suspectées d'être impliquées dans des manifestations violentes ou illégales ou dans des attaques contre les forces de l'ordre.

Depuis que l'armée a évincé M. Morsi, au moins 1.400 personnes ont été tuées dans la répression, tandis que les attaques contre les forces de l'ordre ont fait plus de 200 morts.

L'ampleur des arrestations et des procès, qui visent également des journalistes, ont provoqué une onde de choc au sein de la petite mais active opposition, qui rayonne au-delà des cercles islamistes.

Car si les présidents qui se sont succédé à la tête de l'Egypte ont tous durement réprimé les islamistes, l'échelle et la vitesse des procès actuels sont sans précédent.

"Le recours massif à des procès à travers le pays est quelque chose de nouveau", note Ahmed Seif, célèbre avocat des droits de l'Homme. Cela permet à "l'Etat d'utiliser des méthodes +douces+ pour contrôler la société sans mettre en place de mesures exceptionnelles".

Le propre fils d'Ahmed Seif, le militant de gauche Alaa Abdel Fattah, est poursuivi pour des violences lors d'une manifestation illégale. Libéré sous caution dimanche après quatre quatre mois de détention préventive, il risque jusqu'à cinq ans de prison.

Le 25 janvier, alors que des heurts entre manifestants islamistes et forces de l'ordre éclataient dans tout le pays, les policiers ont dispersé un cortège, modeste, de militants laïques protestant contre l'armée.

Vingt personnes ont été arrêtées et les militants --fervents opposants des Frères musulmans-- ont été poursuivis pour appartenance à la confrérie déclarée "terroriste" en Egypte. Ils ont finalement été condamnés à des peines de prison ou à de lourdes amendes pour rassemblement illégal.

"Moi, je suis capable de prouver que je ne suis pas membre des Frères musulmans. Mais il y a actuellement des milliers de gens en prison qui ne peuvent pas le prouver", a raconté Nazly Hussein, l'un des militants condamnés.

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