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"La Grande Bellezza", ode cinéphile à une Rome décadente

"La Grande Bellezza", ode cinéphile à une Rome décadente

"La Grande Bellezza" du réalisateur italien Paolo Sorrentino, lauréat dimanche de l'Oscar du meilleur film étranger, est une ode à la beauté de Rome et à une certaine décadence.

Le film, qui avait reçu de nombreux prix avant l'Oscar (Golden Globe, Bafta, meilleur film européen), a été préféré à "La chasse" (Danemark), "Alabama Monroe" (Belgique), "L'image manquante" (Cambodge) et "Omar" (Palestine).

Vendredi soir, à deux jours de la cérémonie, Paolo Sorrentino confiait à l'AFP que l'Oscar était "vraiment un rêve. Quand vous commencez à faire ce travail, vous voyez l'Oscar comme le rêve impossible".

"Un festival, vous ne comprenez que plus tard l'importance que cela peut revêtir", ajoutait-il. "Mais quand vous avez 18 ans, l'Oscar est un rêve. Et c'est très bizarre pour moi de faire partie de tout cela".

A travers les doutes existentiels du roi mondain Jep Gambardella, joué par un brillant Toni Servillo, Paolo Sorrentino livre un regard sur la décadence morale d'une certaine Italie doublé d'un hommage à la splendeur de Rome, dans un film aux accents felliniens.

Fêtes orgiaques, dilemme entre aspirations littéraires et déchéance: bien que Sorrentino s'en défende, les références à "La Dolce Vita" de Federico Fellini (1960) sont nombreuses.

Génial écrivain dans sa jeunesse devenu journaliste dandy, Jep Gambardella est de toutes les soirées, véritable idole mondaine à Rome. Mais dans ce tourbillon de superficialités, l'homme, qui souffre de se voir vieillir, commence à s'interroger: lui faut-il reprendre l'écriture, et ainsi donner du sens à cette vie décadente, cette comédie du néant?

Jep cache son dégoût de lui-même et des autres derrière une attitude désabusée et cynique. Son cas de conscience: depuis son premier roman, couronné par un prix dans les années 70, ce sexagénaire séduisant n'a jamais transformé l'essai, renonçant à poursuivre ses ambitions littéraires.

Malgré sa quête de sens, il continue de fréquenter les fêtes romaines, excentriques et colorées, ponctuées de performances artistiques étranges, qu'il organise parfois lui-même sur sa superbe terrasse dominant le Colisée.

Lors de ces soirées, des bourgeoises botoxées dissertent sur le jazz éthiopien, une fillette jette en pleurant des pots de peinture sur une toile géante pour en faire un tableau.

"Le film tente d'exprimer une pauvreté autre que matérielle, une pauvreté d'un autre genre. Je n'ai pas tenté d'exprimer un avis négatif vis-à-vis de ces gens-là mais simplement de représenter ce qu'ils sont, ce qui symbolise notre pays", avait souligné Paolo Sorrentino à Cannes.

Avec ce film à la photo époustouflante, le réalisateur italien, prix du Jury du festival de Cannes en 2008 pour "Il Divo", un film sur l'ancien président du conseil italien Giulio Andreotti, avait reçu un excellent accueil sur la Croisette en mai dernier.

"La Grande Bellezza" ("La grande beauté") est un film "totalement débiteur du grand cinéma italien, Scola, Fellini, Ferreri, Monicelli...", expliquait alors le réalisateur.

Mais dans un entretien à l'AFP au moment de la sortie américaine du film, le cinéaste précisait cependant qu'il avait essayé d'oublier les grands maîtres pour filmer la Ville Eternelle. "J'essaie d'imaginer que c'est le premier film tourné dans cette ville et dans cet environnement, ou sur ces gens", expliquait le cinéaste. "Etre cinéphile peut être très dangereux: si vous passez trop de temps à penser aux films qui ont déjà été faits, cela peut devenir très paralysant, car vous avez tout le temps des références en tête".

"C'est très important de faire croire que c'est la seule et unique fois que cela a été fait. Donc j'ai évité de regarder d'autres films ou d'autres façons dont la ville a été représentée", ajoutait-il.

bur-lrb/rr/mdm

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