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Ukraine: pas de regrets pour Ianoukovitch dans sa région natale

Ukraine: pas de regrets pour Ianoukovitch dans sa région natale

"Traître" pour les uns, "trop faible" pour d'autres, les habitants de la région natale de Viktor Ianoukovitch, dans l'Est russophone de l'Ukraine, n'éprouvent guère de regrets après sa destitution, tout en se demandant qui serait désormais le mieux à même de les défendre.

Destitué par le Parlement, renié par son parti, introuvable depuis samedi, recherché pour "meurtres de masse", Viktor Ianoukovitch est abandonné jusque dans son fief de Donetsk, la région où il est né en 1950, dans l'est industriel de l'Ukraine, qu'il aurait vainement tenté de fuir la semaine dernière en avion.

"Les gens d'ici ont été déçus par Ianoukovitch", confie Tatiana, une jeune employée, à Donetsk, dans le bassin houiller du Donbass, où sa destitution surprise n'a pas suscité de mobilisation hostile au nouveau pouvoir qui se met en place à Kiev.

Viktor Ianoukovitch a été "trop faible" à l'égard du mouvement de contestation qui a fini par l'emporter, estime, de son côté, un chauffeur de taxi, en dépit des 82 tués en trois jours à Kiev la semaine dernière.

Sur l'immense place Lénine balayée par un vent glacial, une poignée de militants communistes ou d'autres organisations ayant en leur temps soutenu Viktor Ianoukovitch tentent depuis quelques jours de se regrouper au sein d'un "Front de l'Est" favorable à la création d'une fédération en Ukraine et donc à une large autonomie.

Mais même eux n'ont pas de mots assez durs à l'encontre de l'ancien chef d'Etat.

"Il a trahi", disent ainsi à l'unisson plusieurs d'entre eux, pour la plupart des retraités nostalgiques de l'Union soviétique et proches de la Russie, qui jugent, à l'instar de Viktor Afinogueev, un ancien du bâtiment, que les nouvelles autorités ukrainiennes sont "vendues aux Européens et aux Américains".

Avec ses camarades, ils ont dressé, au pied d'une imposante statue de Lénine, quatre petites tentes rouges ornées d'un marteau et d'une faucille, symboles de la défunte URSS.

Mais rien à voir avec le Maïdan, la place de l'Indépendance à Kiev, ses allures de camp retranché et ses immenses foules : ils ne sont en effet qu'une vingtaine à haranguer les rares badauds, sous le regard peu intéressé de deux policiers transis de froid, tandis que Donetsk, qui compte un peu plus d'un million d'âmes, semble presque endormie.

Plusieurs habitants notaient toutefois que Ianoukovitch, qui fut vice-gouverneur, puis, de 1997 à 2002, gouverneur de la province de Donetsk, a été "légitimement élu" à la tête de l'Etat début 2010 pour un mandat de cinq ans. Mais ils confient, dépités, ne voir "personne d'autre" en mesure de le remplacer, surtout pas Ioulia Timochenko, égérie de la Révolution orange, ex-Premier ministre libérée samedi de prison.

"Tout le potentiel industriel du pays se trouve ici", souligne Nina Alexandrovna, 72 ans, un sac plastique à la main, dans la plus pure tradition soviétique.

Toutefois, s'empresse-t-elle d'affirmer, "on peut vivre ensemble" avec la partie occidentale de l'Ukraine : "Les gens de l'Ouest sont des gens comme nous, seuls leurs leaders politiques sont des extrémistes".

Raïssa Andreevna, 77 ans, ne partage pas cette méfiance envers le nouveau pouvoir.

"Ce sera désormais formidable ici en Ukraine", proclame-t-elle, en venant se recueillir devant les photos de manifestants tués dans les violences dans la capitale, lorsque la police a ouvert le feu à balles réelles, près de la statue du grand poète Taras Chevtchenko, héraut du patriotisme ukrainien au XIXe siècle.

La vieille femme écarte d'un revers de la main tout risque d'éclatement du pays entre l'Est russophone et russophile, majoritaire, et l'Ouest nationaliste et ukrainophone.

"A Donetsk comme dans le reste de l'Est, nous sommes avant tout des Ukrainiens", assure-t-elle.

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