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La Birmanie plonge dans le grand bain international, à la tête de l'Asean

La Birmanie plonge dans le grand bain international, à la tête de l'Asean

Après un demi-siècle d'isolement, la Birmanie embarque cette semaine pour sa première grande aventure diplomatique internationale en prenant la tête de l'Association des Nations d'Asie du sud-est (Asean), mais les experts mettent en garde contre les attentes démesurées placées dans cette présidence.

Près de trois ans après la dissolution de la junte, le pays accueillera à partir de vendredi les ministres des Affaires étrangères du bloc régional à Bagan, première réunion majeure de sa présidence tournante.

Longtemps au ban des nations, la Birmanie a entrepris des réformes politiques et économiques spectaculaires depuis que la junte a transféré en mars 2011 ses pouvoirs à un régime quasi-civil, permettant la levée de presque toutes les sanctions occidentales.

Fortes de l'organisation en 2013 du Forum économique mondial pour l'Asie de l'est et des Jeux d'Asie du sud-est (SEA Games), les autorités abordent ce nouveau défi logistique et diplomatique avec confiance, malgré des infrastructures limitées.

"La Birmanie est prête", a ainsi assuré Than Htut, haut responsable au ministère du Plan. "L'Asean est une étoile montante dans l'économie et la politique mondiales. Nous espérons que notre présidence soutiendra cela".

Alors que le bloc régional a souvent été embarrassé par l'image désastreuse de la Birmanie après son adhésion en 1997, le pays "promet désormais d'apporter une contribution positive", a commenté Sean Turnell, de l'université australienne Macquarie.

"Le plus grand danger pour la Birmanie (...) pourrait être les attentes excessives", a-t-il ajouté, notant que l'organisation réussie des SEA Games en décembre avait pu faire naître trop d'espoirs quant à ses capacités à s'attaquer à des questions stratégiques majeures.

"La communauté internationale n'avait pas beaucoup d'attentes pour le Laos ou le Cambodge, alors ces pays ont facilement dépassé ces attentes. Cela pourrait ne pas être le cas pour la Birmanie".

En 2006, sous le feu des critiques concernant les violations des droits de l'Homme, la Birmanie avait dû renoncé à prendre la présidence tournante.

Mais les temps ont changé et l'impatience du nouveau régime à assumer ce rôle, en prenant le tour du Laos, est un signe que le gouvernement veut désormais "accélérer le processus d'ouverture à la région et au monde extérieur", selon Carl Thayer, expert de l'Asie du sud-est.

Et le programme de l'Asean étant pré-établi, la Birmanie ne devrait pas être "dépassée", a-t-il ajouté.

Le bloc régional (Thaïlande, Malaisie, Singapour, Indonésie, Philippines, Brunei, Vietnam, Laos, Birmanie et Cambodge) fait face à des problèmes complexes, en particulier un projet d'intégration économique prévu pour 2015 ainsi que des différends territoriaux en mer de Chine méridionale entre plusieurs de ses membres et Pékin.

Les relations entre la Birmanie et son allié de longue date chinois risquent d'ailleurs de la mettre dans une situation délicate lors des discussions sur ces eaux disputées.

En 2012, le Cambodge, également proche de Pékin, avait essuyé de vives critiques en faisant obstacle, lors de sa présidence, à l'adoption d'une position commune ferme du bloc face aux revendications chinoises.

"Les diplomates birmans disent en privé qu'ils reflèteront le consensus de l'Asean sur la mer de Chine méridionale, tout en s'attendant à de fortes pressions de la Chine sur la question", a expliqué Thayer.

Naypyidaw devra également organiser le Sommet d'Asie de l'Est, qui inclut notamment la Chine, les Etats-Unis et la Russie.

Cette présidence devrait être "une occasion pour le gouvernement d'améliorer la situation des droits de l'Homme et de montrer qu'il est sérieux dans sa volonté d'organiser la transition d'un régime militaire à un véritable régime civil", a commenté David Mathieson, de Human Rights Watch, soulignant qu'il avait encore beaucoup à faire pour convaincre.

Depuis 2011, la Birmanie a notamment permis le retour de la chef de l'opposition Aung San Suu Kyi au coeur du jeu politique légal et libéré des centaines de prisonniers politiques.

Mais des inquiétudes persistent sur les nouvelles arrestations de militants ou sur les chances de parvenir à de véritables accords de paix avec les groupes rebelles de minorités ethniques.

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