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La Corée du Nord, royaume de l'absurde et du surréalisme

La Corée du Nord, royaume de l'absurde et du surréalisme

Démêler le vrai du faux à propos de la Corée du Nord est une tâche ardue: dans ce pays secret et isolé, dirigé d'une main de fer depuis trois générations par les Kim, les rumeurs les plus surréalistes paraissent presque crédibles.

Par exemple, quel est le plus vraisemblable des articles parus dans la presse ces derniers jours à propos du jeune dirigeant du pays, Kim Jong-Un?

Qu'il a exécuté son oncle en le livrant nu à une meute de chiens affamés ou qu'il a fêté son anniversaire à Pyongyang avec une ancienne star du basket américain, réputée pour ses tatouages, ses piercings et son goût pour le déguisement et le catch ?

Une vidéo sur YouTube montre l'ancien défenseur des Chicago Bulls, Dennis Rodman, entonnant "Happy birthday" avant un match de basket à Pyongyang, devant Kim Jong-Un qui fêtait ce jour-là ses 30, 31 ou 32 ans. Le jour et le mois de sa naissance sont connus, mais pas l'année. Les experts sud-coréens lui donnent une trentaine d'années.

L'histoire de la mort de l'oncle dans la gueule de molosses, rapportée par plusieurs médias internationaux, a vraisemblablement pour origine un tweet satirique posté sur un site chinois.

L'"info" a été reprise par un journal chinois, Wen Wei Po, avant d'engendrer des articles effarés dans des médias occidentaux.

Différencier les faits de la fiction est quasi-impossible à propos de la Corée du Nord, dont le régime verrouille tous les canaux d'information et de communication, rendant difficile la vérification des rumeurs.

Parallèlement, l'intérêt de la presse internationale est énorme, surtout lorsqu'il s'agit d'histoires à sensations qui confortent le public dans sa perception de la Corée du Nord comme un pays étrange, brutal et arriéré.

Les médias étrangers peuvent ainsi amalgamer plusieurs bribes de rumeurs, autour d'un fait avéré, comme ce fut par exemple le cas avec l'exécution de l'oncle du dirigeant nord-coréen, annoncée en décembre par Pyongyang.

La version la plus spectaculaire véhiculée par la presse étrangère était la suivante: Kim Jong-Un a fait jeter en pâture à 120 chiens affamés son oncle, nu, qui avait eu une liaison avec la jeune épouse du dirigeant. La femme de l'oncle, victime d'une attaque cardiaque consécutive au choc émotionnel, est dans le coma.

Seuls l'arrestation, le procès express et l'exécution ont été annoncés officiellement par le régime nord-coréen.

Le reste provient, en bonne partie, de sites internet opérés par des Nord-coréens réfugiés au Sud et de médias sud-coréens, qui, notent les analystes, ont intérêt à dresser un portrait le plus noir possible du régime des Kim.

"Les nouvelles provenant d'un pays aussi fermé que la Corée du Nord restent très limitées (...), nourrissant ainsi tout un tas de rumeurs non confirmées pour remplir le vide", note Choi Jung-Hoon, directeur de la radio Free North Korea à Séoul.

"Les gens imaginent ce qui peut se passer en Corée du Nord: un endroit bizarre et sauvage où tout peut arriver", ajoute Choi, qui a fui son pays natal en 2007. "Parfois, le portrait qu'ils en font est grotesque, très différent du pays où j'ai vécu et que je connais".

Outre le blocus presque total sur les informations, le culte de la personnalité autour de la dynastie des Kim et le langage belliqueux usité à l'égard du voisin et frère ennemi du sud donnent l'impression à l'étranger que le pays est aux mains d'une clique paranoïaque.

Ainsi, la presse officielle nord-coréenne a accusé Jang Song-Thaek d'être un coureur de jupons, un drogué décadent, "un débris humain méprisable, pire qu'un chien".

Le régime de Pyongyang est coutumier de ce type d'hyperboles, un élément de la propagande destinée à sa population.

Le refus de la Corée du Nord de confirmer ou démentir les "informations" extérieures ne fait qu'alimenter le moulin à rumeurs. Le régime n'admet pas cependant certains articles (dans la presse étrangère) peu flatteurs sur son dirigeant.

Les médias officiels ont ainsi qualifié d'"actes criminels hideux" les allégations sur une opération chirurgicale qu'aurait subie Kim Jong-Un pour ressembler à son grand-père, Kim Il-Sung, fondateur de la Corée du Nord.

Kang Chan-Ho, journaliste et spécialiste du Nord au quotidien Hankyoreh, note que plusieurs histoires sont concoctées par les critiques les plus acerbes du pays.

"Certains réfugiés tendent à laisser leurs sentiments personnels vis-à-vis de Pyongyang prendre le dessus et à (amplifier) des rumeurs qui sont invérifiables", souligne-t-il.

jhw/gh/fmp/gab/ros

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