Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Le succès discret d'un embryon de la défense européenne

Le succès discret d'un embryon de la défense européenne

Un embryon de l'Europe de la Défense prospère très discrètement sur une base aérienne des Pays-Bas, où des militaires venus d'Allemagne, de France et du Benelux coordonnent des milliers de missions aériennes chaque année.

"Small is beautiful" ("Ce qui est petit est beau") pourrait être la devise du Commandement européen de transport aérien (EATC), implanté sur la base aérienne d'Eindhoven (sud).

Il a été lancé en 2010 à l'initiative des états-majors français et allemand, qui cherchaient depuis le début des années 2000 à collaborer davantage dans le transport aérien. Les deux pays ont ensuite été rejoints par les Pays-Bas, la Belgique et le Luxembourg.

"L'EATC est une structure militaire unique en Europe. Elle fonctionne sur le principe du covoiturage en mode permanent", explique son commandant, le général français Pascal Valentin.

Son objectif est de "maximiser" l'emploi des moyens aériens de transport militaire, alors que ces derniers se raréfient dans le contexte "critique" de la crise économique et de la baisse des budgets militaires.

Par exemple, si un appareil allemand se rend en Afghanistan, l'EATC fait en sorte qu'il puisse partir et revenir à plein, en transportant des soldats néerlandais ou du fret français. "Un peu comme le font les alliances de compagnies aériennes civiles", de type Skyteam ou Star Alliance, souligne le lieutenant-colonel allemand Ralf Gerard.

Cette approche est nouvelle pour les armées nationales qui, jusqu'à présent, collaboraient au coup par coup, selon les missions.

La primauté de la notion de "souveraineté nationale" est d'ailleurs l'un des principaux freins à l'avènement d'une Europe de la Défense, un dossier que vont tenter de réveiller les chefs d'Etat et de gouvernement de l'UE jeudi et vendredi prochains à Bruxelles.

L'EATC illustre le pragmatisme promu par les pays les plus volontaristes. Le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, vante ainsi les initiatives concrètes prises par quelques pays et non par l'ensemble des 28 de l'UE. Il s'agit, selon lui, de poser "des briques qui contribueront à créer la maison" de la défense européenne, en évitant les discussions sans fin sur son bien-fondé.

De fait, la structure de l'EATC se veut extrêmement flexible. Les cinq pays membres lui délèguent le contrôle opérationnel (Opcon) des avions qu'elles placent sous son commandement. Mais elles gardent le droit de les retirer temporairement, notamment pour les utiliser pour des missions nationales.

"En conservant le contrôle de leurs actifs, les pays ne se sentent pas prisonniers de l'EATC. C'est une des raisons qui expliquent son succès", affirme le général Valentin.

A Eindhoven, les 170 militaires de l'EATC gèrent à distance une flotte diversifiée de plusieurs dizaines d'appareils stationnés dans leur pays respectif. Il compte des avions de transport tactique de type Hercules C-130, Transall ou Casa, et stratégique de type Airbus A 330 et 340.

Ces appareils ont mené 7.682 missions en 2012, acheminant troupes et matériels en Afghanistan, en République démocratique du Congo pour la mission de l'ONU ou au large de la Libye lors de l'intervention internationale. Depuis le début de l'année, plus de 200 missions ont été menées vers le Mali dans le cadre de l'opération française Serval, ce qui a permis à la France d'économiser l'équivalent de deux à trois vols de Transall par jour.

"Notre défi est de répondre à la hausse de la demande dans un contexte de baisse et de vieillissement de la flotte", explique le général Valentin. L'EATC attend donc avec impatience l'arrivée, prévue en 2014 après des années de retard, de l'Airbus A400M, l'avion polyvalent de nouvelle génération capable de transporter jusqu'à 37 tonnes sur 3.300 km.

L'autre priorité de l'EATC est de combler la criante lacune des Européens en avions ravitailleurs en vol. Il a été chargé de proposer des projets pour ces appareils "très onéreux mais dont tous les pays ont besoin", selon le commandant.

En attendant, l'EATC va continuer à grandir avec l'adhésion attendue de l'Espagne, qui pourrait être suivie par l'Italie, le Royaume-Uni et la Pologne.

jri/jlb/tj

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.