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Procès Kurniawan à New York: des éléments à charge accablants

Procès Kurniawan à New York: des éléments à charge accablants

Cahier remplis de formules, emails, bouteilles annotées, factures, photos: l'accusation a continué mercredi à accumuler les éléments accablants contre le collectionneur de vins Rudy Kurniawan, jugé à New York pour contrefaçon de grands crus français.

Le témoignage très attendu du viticulteur de Bourgogne Laurent Ponsot, l'une des victimes de Kurniawan, prévu dans la journée, a finalement été repoussé à jeudi, certaines interventions ayant été plus longues que prévu.

Kurniawan, 37 ans, Indonésien d'origine chinoise, encore considéré il y a quelques années comme l'un des cinq plus grands collectionneurs de vins au monde, est accusé d'avoir installé chez lui en Californie un véritable laboratoire de contrefaçon.

"Sa maison entière était une cave, une usine de vins", a témoigné jeudi l'agent du FBI James Wynne, qui avait effectué la perquisition lors de son arrestation le 8 mars 2012 en Californie. La température y était maintenue très basse et une des pièces était réfrigérée, a-t-il précisé.

Il a raconté une cuisine laboratoire, avec des bouteilles partout, certaines attendant d'être étiquetées, des tiroirs pleins de bouchons, étiquettes et capsules, une salle à manger remplie de caisses de vin, et un espace spécialement aménagé au-dessus d'une étagère à vins, pour faire des photos des bouteilles qu'il voulait vendre.

Les jurés ont pu voir brandis à l'audience une demi-douzaine de gros cahiers, dans lesquels Kurniawan consignait remarques sur les vins et formules de mélange.

Costume gris et allure juvénile, l'accusé est resté impassible toute la journée.

Tous les experts ont confirmé qu'il avait un palais exceptionnel pour identifier et mémoriser les grands vins.

Le procureur Jason Hernandez a montré des centaines d'étiquettes de grands crus -fausses ou vraies-, Romanée-Conti 1906, Domaine Ponsot, Musigny 1978, Château Latour 1909, Château Cheval Blanc 1921... rangées dans des sacs transparents.

Marchant devant les jurés, il leur a également montré des bouteilles avec des formules écrites à la main en tout petit sur le côté, tel ce "40-50 DRC" sur un Pinot noir 2006 de Californie, laissant penser que Kurniawan l'utilisait pour de faux Romanée-Conti des années 40-50.

Le Romanée-Conti est le plus réputé des vins de Bourgogne, et une bouteille ancienne peut atteindre des dizaines de milliers de dollars aux enchères. Kurniawan l'appréciait particulièrement et y avait gagné le surnom de "Docteur Conti".

Le procureur a aussi montré sur grand écran des emails de Kurniawan demandant à ce qu'on lui renvoie les bouteilles vides de grands crus consommés dans un restaurant new-yorkais. "Ne les lavez pas, j'ai besoin qu'elles semblent d'époque pour une séance de photos", écrit-il le 23 octobre 2006.

Quelques jours plus tard, il s'insurge que "toutes sauf deux" soient arrivées cassées en Californie.

Dans un autre mail d'avril 2008, il demande à la maison d'enchères avec laquelle il travaille à New York si elle peut lui trouver "100 à 200 caisses de Bordeaux bon marché des années 80, 81 à 88". Il affirme que c'est pour son frère, Dar.

Une fois terminés ses mélanges, il les mettait en bouteille, ajoutait bouchons et étiquettes, et les vendait, le plus souvent dans des lots aux enchères, aux côtés de grands crus authentiques.

A l'époque, propulsé au sommet par son palais extraordinaire et une générosité sans limites, il achète et revend des milliers de bouteilles de vin par an, dépense sans compter. Plus de 6 millions de dollars sur une seule carte bancaire en 2007, dont 208.908 dollars chez Hermès. Plus de 2,4 millions en 2008, dont 366.683 dollars chez Hermès, selon James Wynne.

Mais le doute s'installe en 2008, avec la suspension d'une vente aux enchères à New York, où il voulait vendre des vins du Domaine Ponsot, presque tous contrefaits.

Outre Laurent Ponsot, deux autres représentants de grands domaines français de Bourgogne, Laurent Roumier et Aubert de Villaine (Romanée-Conti) doivent aussi témoigner au procès.

Kurniawan risque jusqu'à 40 ans de prison.

bd/are

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