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Il y a 25 ans, le réveil démocratique birman

Il y a 25 ans, le réveil démocratique birman

Des milliers de personnes se sont réunies jeudi à Rangoon, à Myanmar, pour célébrer le 25e anniversaire du soulèvement de 1988, qui avait été réprimé dans le sang. Il s'agit d'un nouveau signe que les autorités birmanes, qui ont longtemps maintenu le pays sous une chape de plomb, jettent du lest sur le chemin des réformes.

Le 8 août 1988, des milliers d'étudiants étaient descendus dans les rues pour dénoncer les conditions économiques et réclamer une ouverture démocratique. Cette manifestation, qui constituait le point culminant de diverses protestations ayant eu cours depuis des mois, a pris une tournure tragique lorsque les forces de l'ordre ont ouvert le feu.

Cette répression a entraîné un véritablement soulèvement populaire, des centaines de milliers de personnes descendant dans les rues de plusieurs villes du pays. Le pouvoir, qui avait vacillé, avait néanmoins poursuivi sa violente répression. Six semaines après la manifestation du 8 août, au moins 3000 personnes avaient été tuées.

Le soulèvement de 1988 a marqué la naissance du mouvement prodémocratique birman et poussé à l'avant-scène Aung San Suu Kyi, fille du général Aung San, héros de l'indépendance nationale birmane. Saisie par la tournure des évènements, elle réclamera des élections libres dans un premier discours public, prononcé devant une foule monstre le 26 août 1988.

Vingt-cinq ans plus tard, cette même Aung San Suu Kyi a profité de cette première commémoration publique pour appeler le Myanmar à poursuivre sur la voie des réformes. Elle a souligné qu'il restait encore beaucoup de chemin à parcourir avant la mise en place d'un véritable état de droit et a plaidé pour la réforme de la Constitution de 2008.

« Le temps ne nous attend pas. Nous devons aller de l'avant », a déclaré la présidente de la Ligue nationale pour la démocratie, qui a été assignée à résidence pendant un total de 15 ans après les manifestations de 1988. La commémoration en cours, a-t-elle souligné, constitue « un bon signe ».

Ces propos ont été tenus devant quelque 5000 personnes réunies au centre des congrès de la capitale. Des représentants de l'opposition et du parti au pouvoir, des diplomates et des moines bouddhistes, qui disposent d'une grande influence dans ce pays, étaient présents. Des milliers de personnes qui n'ont pu accéder au centre ont pu suivre l'hommage rendu aux victimes sur des écrans géants.

Ko Ko Gyi, un des leaders étudiants du mouvement de 1988, a souligné pour sa part qu'il importe de continuer à faire vivre « l'esprit » de ce soulèvement. « Nous ne pouvons pas effacer l'Histoire. La situation d'aujourd'hui est le résultat du mouvement populaire de 1988. Même si nous n'avons pas atteint notre objectif, nous arrivons au début du chemin. »

La Constitution de 2008 octroie de très importants pouvoirs à l'armée et empêche Mme Suu Kyi de devenir présidente, puisqu'elle a déjà été condamnée par la justice birmane. La Prix Nobel de la paix 1991 a cependant été élu députée à la chambre basse du parlement birman au printemps 2012.

Elle a cependant ouvert la voie à l'élection d'un gouvernement constitué d'ex-militaires, qui ont entrepris de réelles réformes politiques et économiques : libération de prisonniers politiques, négociations de paix avec des groupes ethniques minoritaires, diminution de la censure imposée des médias, etc.

Ces mesures, conjuguées à la réintégration d'Aun San Suu Kyi dans le jeu politique, ont permis au Myanmar de briser son isolement. Les sanctions adoptées contre lui par les pays occidentaux ont été en bonne partie levées.

Les libertés fondamentales demeurent cependant fragiles. Jeudi matin, une cinquantaine de personnes ont défilé pour la première fois sur les lieux de la répression sanglante de 1988 à Rangoon, sous l'étroite surveillance de la police.

« Nous marchons sur le chemin de la démocratie grâce à la révolution de 1988. La transition est la conséquence de la révolution de 1988 », a déclaré l'un des participants, Tun Tun Oo, 49 ans, ancien leader étudiant. Mais « nous n'avons pas encore la démocratie ».

Un autre groupe d'une cinquantaine de militants a déposé des fleurs en forme de « 8 » dans le centre-ville. « Nous voulions montrer notre chagrin pour les morts et montrer que nous poursuivons l'objectif de la démocratie », a déclaré Win Min, 46 ans, ancien étudiant ayant participé au soulèvement. « Nous leur avons promis de continuer ».

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