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Jeu et alcool : une association, mais pas de lien direct

Jeu et alcool : une association, mais pas de lien direct

Pendant que le gouvernement du Québec s'apprête à permettre la vente d'alcool dans les aires de jeu des casinos, une enquête commandée par le ministère de la Santé montre des associations entre la consommation d'alcool et les problèmes de jeux pathologiques, mais ne conclut pas clairement à un lien direct.

Dans le rapport d'enquête, on peut lire notamment que les joueurs à risque modéré et les joueurs pathologiques « sont proportionnellement plus nombreux à consommer de l'alcool de façon problématique et à être possiblement dépendants à l'alcool ».

Louise Nadeau, une des deux chercheuses qui ont réalisé l'enquête, explique que « les joueurs pathologiques et les joueurs à risque sont tous de grands consommateurs d'alcool ». Elle ajoute que, d'après des études expérimentales, des joueurs qui consomment de l'alcool ont tendance à augmenter le montant des mises ainsi que la durée du jeu.

« Il y a de nombreuses études qui signalent que lorsqu'on boit en concomitance avec jouer, ça augmente la prise de risque. [...] Par ailleurs, il faut dire aussi que beaucoup de gens qui jouent au poker le samedi soir chez eux, pour deux dollars avec une consommation, ça n'en fait pas des joueurs pathologiques. C'est toute la difficulté à l'heure actuelle de faire le lien entre cette situation de l'alcool au casino et de comprendre le sens de cela en terme de l'impact tant sur les joueurs pathologiques, les joueurs à risque et les joueurs qui jouent sans problème », nuance Mme Nadeau.

Elle convient toutefois que « la prise d'alcool augmente la prise de risque. Les meilleures données, c'est celles de l'alcool au volant : plus l'alcoolémie augmente, plus il y a prise de risque ».

Faut-il pour autant faire un lien direct entre le jeu et la consommation d'alcool? Louise Nadeau est nuancée : « [...] Les joueurs pathologiques et les joueurs à risque sont tous de grands consommateurs d'alcool. Mais on n'a pas attendu l'alcool au casino pour que ça soit la situation et on n'a pas attendu non plus que les joueurs pathologiques ou à risque aillent dans les bars et jouent avec les appareils de loto vidéo. D'où mon incapacité ^[de dire] si oui il va y avoir augmentation [du jeu avec l'arrivée de l'alcool dans les aires de jeu], parce que déjà, c'est là. Est-ce que ça va être plus, est-ce que ça va être moins? Je ne peux que vous dire que ce sont deux facteurs associés. »

Plus d'argent dans la prévention

Les auteures de l'étude souhaitent que Loto-Québec investisse davantage dans la compréhension et la prévention du jeu pathologique.

« On a mis 300 millions de dollars pour rénover le casino, on aurait pu au moins mettre 1 million pour voir quelles sont les stratégies pour prévenir chez les joueurs à risque - ou le passage d'un joueur non problématique à risque - et de comprendre si oui ou non nos joueurs pathologiques vont être affectés », souligne Mme Nadeau.

Le cas de Mathieu

Mathieu est un ancien joueur compulsif qui désire garder l'anonymat. Pour lui, le jeu et les casinos étaient une passion. « Ça commence avec une petite mise, puis ça monte. C'est une escalade qui finit par détruire ta vie au complet », témoigne-t-il.

En cinq ans, Mathieu s'est presque retrouvé à la rue. Il a perdu 250 000 $ dans les machines à sous, notamment au casino. « C'est beaucoup d'argent. C'est des placements, c'est mes REER, c'est ma voiture, c'est mes maisons. Tout y passe ».

La décision de Loto-Québec de servir de l'alcool dans les aires de jeux est un cocktail dangereux, selon Mathieu. « Ça vient souvent de paire : le jeu, la drogue, l'alcool », dit-il, ajoutant que c'est « très stratégique de leur part pour augmenter les revenus des casinos parce que quand tu bois, tu penses moins à tes pertes ».

Avec les informations de Jean-Philippe Robillard

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