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La course vers le bas

Je me suis assis pour la première fois avec Barack Obama dans son bureau au Sénat, inondé de soleil. Il s'est avancé avec son grand sourire, sa cravate desserrée, s'est assis dans un profond fauteuil, en posant les pieds sur la table basse. J'ai été saisi par son assurance, son talent, sa façon de s'emparer des problèmes et son charme enjoué: le vrai Obama. C'était début 2007. Plus tard cette année-là, je me suis assis avec Mitt Romney lors de la tournée électorale des primaires républicaines.
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Republican presidential candidate, former Massachusetts Gov. Mitt Romney and President Barack Obama walks past each other on stage at the end of the last debate at Lynn University, Monday, Oct. 22, 2012, in Boca Raton, Fla. (AP Photo/Pablo Martinez Monsivais)
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Republican presidential candidate, former Massachusetts Gov. Mitt Romney and President Barack Obama walks past each other on stage at the end of the last debate at Lynn University, Monday, Oct. 22, 2012, in Boca Raton, Fla. (AP Photo/Pablo Martinez Monsivais)

Je me suis assis pour la première fois avec Barack Obama dans son bureau au Sénat, inondé de soleil. Il s'est avancé avec son grand sourire, sa cravate desserrée, s'est assis dans un profond fauteuil, en posant les pieds sur la table basse. J'ai été saisi par son assurance, son talent, sa façon de s'emparer des problèmes et son charme enjoué : le vrai Obama.

C'était début 2007.

Plus tard cette année-là, je me suis assis avec Mitt Romney lors de la tournée électorale des primaires républicaines. Je l'avais interviewé des années auparavant, dans sa maison de la banlieue bostonienne. Il n'avait pas changé d'un iota : sourire froid, sur ses gardes mais courtois, bien informé, un mixte entre un état d'esprit d'acier, une ambition féroce, et la bonne volonté sincère mormone : la grande classe.

Aujourd'hui je me demande : où sont passés ces deux hommes ? Etaient-ils des mirages ? La façon dont les deux ont fait campagne cette année me laisse perplexe. Y a-t-il quelque chose dans la présidence - ou sa poursuite - qui attaque la personnalité des hommes et des femmes tombés sous son charme ?

Je le demande parce que cette campagne n'a été ni inspirante ni exaltante - comme par exemple en 1984, quand les électeurs étaient sincèrement d'accord avec le Président Ronald Reagan pour dire que "c'était un nouveau jour pour l'Amérique" ; ou en 2008, quand la victoire d'Obama a été, sinon la réalité, l'affirmation d'un idéal de justice raciale en Amérique.

Pas cette année. Cette campagne n'a été qu'une morne entreprise d'accusations et de récriminations dans une triste époque, quand ce qui se passe n'est pas à la hauteur de nos attentes, mais où les électeurs se méfient des alternatives et sont eux-mêmes cyniques vis-à-vis de la politique.

Les opposants de 2012 affirment qu'ils se sont préoccupés des grandes idées, mais ils ne l'ont pas fait en réalité ; ils soutiennent qu'ils ont agi au grand jour, mais ils ont la plupart du temps travaillé en coulisses ; ils affirment parler du futur alors qu'ils se sont la plupart du temps disputés autour du passé. Cela aurait dû être une occasion pour entendre la voix du peuple, mais cela a souvent viré à la guerre de propagande entre milliardaires tout puissants, leurs publicités soi-disant indépendantes, les réseaux sociaux et l'argent.

Quant à l'honnêteté, il n'y a pas de fausse équivalence. Le président a fait des raccourcis, mais Mitt était de loin le plus menteur des deux. Autrefois un gouverneur modéré, il a soutenu tout au long des primaires républicaines qu'il était "sérieusement conservateur", pour enfin redresser la barre lors des débats nationaux contre le Président.

Les retournements idéologiques lui ont demandé de devenir - ou de se révéler comme - un homme n'ayant aucun scrupule à ignorer ou à réécrire les faits de sa carrière politique et professionnelle, qu'il s'agisse de ce qu'il avait ou pas soutenu en tant que gouverneur ; de ce qu'il avait fait ou pas à Bain Capital ; et de ce qu'il avait dit, ou pas, en public.

Le Président est difficilement sans reproche dans cette campagne lamentable. Il a fait campagne sur la peur, pas sur l'espoir ; il s'est surtout présenté sans nouvel agenda politique et a dépensé la plupart de son temps et de ses dollars de campagne dans une tentative malveillante - et au final sans succès - de faire passer Romney pour une combinaison méphistophélique entre Gordon Gekko (le personnage principal du film Wall Street, NdT), Donald Trump et l'homme portant des guêtres sur la boîte du Monopoly.

Ce n'est pas une approche digne d'Obama, ou de qui il était. Mais lui et son équipe ont décidé que c'était la seule façon de l'emporter.

L'image qui restera de la campagne 2012 vient du deuxième débat à Long Island, où les deux hommes sur scène ont tourné l'un autour de l'autre, ont lutté corps à corps et se sont coupé sans cesse la parole : deux diplômés de la Harvard Law School agissant comme des apprentis catcheurs.

Pour donner une certaine noblesse à ce qui s'apparentait pour l'essentiel à une guerre de terrain, les deux hommes ont présenté leur conflit comme une question de haute philosophie : entre Jefferson (Romney) et Hamilton (Obama) ; entre le libre marché et l'idée d'un gouvernement fédéral.

La vérité est que tous les deux - et la plupart des électeurs - savaient que le conflit était surtout une question de maths : comment couper le gâteau fédéral. Ca s'est révélé une bonne vieille guéguerre américaine pour savoir qui prendrait quoi. Et les deux bords savaient ce sur quoi elle finirait par s'achever : une sorte de compromis sur les impôts, les dépenses et les subventions pour montrer au monde que nous étions engagés de façon plausible à gérer nos finances.

Le Président a exprimé son désir de passer un marché de 4 milliards de dollars de réduction de la dette sur dix ans (avec un ratio de 2,5 milliards en réductions de dépenses, y compris Medicare, et de 1 milliard en nouveaux impôts sur le revenu). Les républicains ne voulaient pas céder donc Obama a reculé. En tournée électorale, Romney a rejoint les "conservateurs sérieux" et a refusé de soutenir un marché même à 10 milliards de réductions contre 1 milliard d'impôts. Cela n'a pas été un grand moment de bravoure à la Kennedy.

Les démocrates doutent qu'un Président Romney essaiera de changer le cours des choses, sans parler de se confronter au Tea Party. Mais l'homme est adepte des tableaux Excel et sait que "l'affaire Amérique" ne se fera pas sans nouvelles sources de revenus.

Pendant ce temps, lui et le président auront passé les frénétiques derniers jours de la campagne 2012 à s'insulter autour et dans l'Ohio : quelque chose à propos de Jeeps, et de qui disait la vérité, et de là où ces voitures étaient fabriquées - la réponse : pas Romney. Cela semble être la finale qui convient à une course présidentielle qui n'a jamais pris de la hauteur.

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