Pauline Marois n'a pas connu le genre de débat qui lui aurait permis de freiner l'élan de son principal adversaire, Philippe Couillard. Si on ne peut identifier de vainqueur très net dans le premier de ces deux débats des chefs, la première ministre sortante n' a pas, à mon sens, emporté un seul des quatre segments: économie, filet social, gouvernance et identité.
Philippe Couillard avait le ton rassurant qui lui sied si bien, François Legault a été très agressif et Françoise David a bien fait dans son rôle nous-on-n'est-pas-comme-les-autres.
Obligée de défendre le bilan, assez décevant, de ses 18 mois de gouvernement , la chef du Parti québécois a donné, à plusieurs reprises, des signes d'exaspération. Deux bons crochets de sa part quand elle a dit au sujet du salaire des médecins que «(Yves) Bolduc a donné la caisse» et quand elle a rétorqué que la seule musulmane congédiée en raison de la Charte, c'est la députée Fatima Houda-Pepin. La stratégie de Pauline Marois a en effet consisté à ramener la Charte des valeurs dans le débat et à dénoncer le retour de ce qu'elle décrit comme la vieille équipe libérale.
Économie
Segment dominé par Couillard et surtout Legault, dont c'est le terrain de prédilection et qui a rappelé qu'il était « le seul ici à avoir créé des emplois». Le chef de la CAQ a décontenancé Mme Marois en lui agitant sous le nez le fait qu'aucun emploi n'a été créé au Québec cette année. Au cours d'une passe d'armes sur la cimenterie de Port-Daniel, il a lancé «J'aime les Gaspésiens, pas le gaspillage». Mme Marois a quant à elle reproché au PLQ de copier le modèle de Jean Charest.
Filet social
Trois anciens ministres de la Santé qui se confrontent. Legault veut éliminer commissions scolaires et agences de santé. Couillard rappelle qu'il a eu le courage de diminuer le nombre d'accréditations syndicales. C'est dans ce segment que Mme Marois a reproché au PLQ d'avoir tout donné aux médecins. Et c'est cette partie du débat qui aurait dû avantager la co-chef de Québec solidaire.
Gouvernance
Pour la première ministre, les 2 milliards de dollars d'annonces qui ont précédé les élections sont des «investissements», et non des dépenses. Échange assez vif Legault-Couillard sur le financement de la santé. David résume le mieux le débat sur le conflit d'intérêts que pose le recrutement de PKP en disant que le risque est d'«une évidence crasse».
Surprenant d'entendre la première ministre affirmer que si le chef libéral est élu, ce sera la «décote immédiate du Québec». C'est gros. Sur la défensive après s'être trompée sur la hauteur de la péréquation, elle est obligée de dire: «Je sais compter»..
Identité
Charte et référendum. Pauline Marois répète à satiété qu'il n'y aura pas de référendum... sauf si les Québécois en veulent un. C'est son ancien collègue Legault qui la pousse dans les câbles sur cet enjeu et Mme Marois laisse tomber un «Calmons-nous».
Très bonne question de Couillard qui demande «combien de femmes êtes-vous prête à congédier dans les hôpitaux». Excellente réplique de la chef péquiste qui lui parle de Fatima.
Françoise David fait mal quand elle accrédite le fait que la Charte aurait pu être adoptée par tous les partis avant les élections, mais qu'elle a été utilisée à des fins électorales.
Somme toute, performance insuffisante de Mme Marois; bonne prestance de Couillard, vulnérable toutefois sur certains enjeux; belle combativité de Legault; et David qui à l'aisance de celle qui ne risque rien.
En tapant constamment sur les «années libérales», le PQ donne l'impression de faire la campagne de 2012!
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