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La corruption est un cancer, au cœur d'innombrables problèmes dans le monde entier

Réduire la corruption ne serait-ce que de 10% pourrait faire gagner 380 milliards de dollars par an - soit beaucoup plus que les gains espérés pour le cycle de négociations de Doha. La corruption coûte chaque année à la seule Union européenne 165 milliards de dollars.
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La quinzaine qui vient de s'écouler a révélé les vérités crues de la FIFA. L'organe qui préside à ce jeu si cher à tant de personnes dans le monde entier a été l'objet d'allégations épouvantables, qui laissent entrevoir qu'il est gangrené par la corruption. La démission de Blatter cette semaine n'est que la première étape d'une longue série de réformes, et nous ferons tout ce que nous pourrons, avec nos partenaires internationaux, pour contribuer à identifier et à poursuivre tous ceux qui se sont rendus coupables de ces méfaits, et pour faire le ménage dans ce sport que nous aimons.

Mais les leçons à tirer de la FIFA en matière de lutte contre la corruption sont bien plus profondes. La corruption au sein de la FIFA n'est pas une surprise. Depuis des années, ce système a rempli les poches des plus impliqués, sans susciter chez les autres plus qu'un soupir réticent. Le monde a tout fait pour éviter de s'emparer du problème, jusqu'au jour où des journalistes britanniques et des avocats américains courageux ont fait la preuve que les choses pouvaient vraiment changer.

Et il en va de même pour la corruption dans le reste du monde. Tout comme pour la FIFA, nous savons que le problème est là, mais il existe comme un tabou international qui empêche de pointer du doigt et de susciter un intérêt pour ces questions. Lors des sommets internationaux, les dirigeants se rencontrent pour discuter des programmes d'aide, de la croissance et de la sécurité. Mais nous ne parlons pas assez de la corruption. Ça doit changer.

La corruption est un cancer sous-jacent à de très nombreux problèmes auxquels nous sommes confrontés dans le monde actuel. Les migrants qui se noient en Méditerranée fuient des États africains corrompus. Nos efforts pour lutter contre la pauvreté à l'échelle mondiale sont trop souvent sapés par des gouvernements corrompus, qui empêchent les citoyens de percevoir les revenus et les fruits de la croissance auxquels ils peuvent prétendre. Et au-delà, la corruption mine aussi l'économie mondiale. Le Forum économique mondial estime que la corruption accroît les coûts de 10% à l'échelle mondiale, tandis que la Banque mondiale avance que le cumul des dessous de table versés chaque année dans le monde s'élève à 1000 milliards de dollars.

Réduire la corruption ne serait-ce que de 10% pourrait faire gagner 380 milliards de dollar par an - soit beaucoup plus que les gains espérés pour le cycle de négociations de Doha. La corruption coûte chaque année à la seule Union européenne 120 milliards d'euros.

Ce phénomène ne se contente pas de mettre notre prospérité en danger, elle sape également notre sécurité. Qu'il s'agisse de l'enlèvement d'écolières au Nigéria ou du recrutement de combattants par les talibans ou l'État islamique, de nombreux citoyens ordinaires sont attirés dans des groupes extrémistes en partie en réaction à l'oppression et à la corruption de leurs gouvernements.

Les dirigeants du monde entier ne peuvent plus esquiver ce problème

Nous devons faire preuve du même courage qui a révélé les pratiques de la FIFA et briser le tabou de la corruption. Je commencerai dès demain lors du G7 en Allemagne et je placerai ces questions au cœur de mon programme aux Nations unies en septembre et au G20 en Turquie, pour terminer par un grand sommet anti-corruption à Londres l'année prochaine.

Bien entendu, les sceptiques diront que les difficultés sont trop grandes. Mais nous devrions être confiants, au vu du travail déjà accompli. Lorsque nous avons lancé le Partenariat pour un gouvernement ouvert, bien des gens doutaient qu'il ait un impact notable. Mais à ce jour, 65 pays ont déclaré plus de 2000 engagements en termes d'ouverture et de transparence - du lancement de budgets citoyens au Libéria à l'audit des grands projets gouvernementaux par la société civile aux Philippines.

Lorsque j'ai inscrit la fiscalité, les échanges et la transparence au programme du G8 de Lough Erne il y a deux ans, certains ont affirmé que nous ne trouverions certainement pas d'accord sur un système mondial d'échange de fichiers fiscaux. Mais à ce jour, plus de 90 pays se sont accordés pour partager leurs informations fiscales de manière automatisée d'ici la fin 2018, ce qui obligera plus de personnes à payer les impôts qu'ils doivent.

Même s'il faut encore faire plus, la Grande Bretagne a déjà pris des mesures notables pour mettre en pratique ce que nous prêchons. En décembre dernier, nous avons publié notre premier Plan global anti-corruption national, qu'Eric Pickles contribuera à mettre en œuvre, dans le rôle de champion anti-corruption que je lui ai assigné. Nous sommes en train de mettre sur pieds une équipe dédiée d'enquêteurs de la National Crime Agency afin d'investiguer les cas de corruption à l'étranger, et nous renforçons notre capacité à poursuivre les conseillers professionnels qui facilitent la corruption. L'OCDE nous a récemment classés parmi les 4 seuls pays du monde qui prennent effectivement des mesures contre la corruption d'agents publics étrangers. Nous continuons à mener la marche mondiale en matière d'accès aux données et de transparence, et nous serons l'année prochaine le premier des grands pays à ouvrir un répertoire central public des détenteurs réels des entreprises. Il s'agit d'une innovation majeure dans la lutte contre le blanchiment d'argent et la corruption - et je continuerai à mettre la pression sur nos territoires d'outre-mer et sur les dépendances de la couronne pour qu'ils suivent notre exemple.

Voici donc venu le temps de bâtir sur ces fondations. De la même manière que nous avons mis la lutte contre la corruption au cœur des discussions internationales, nous devons placer ce combat au cœur des institutions internationales. Il nous faut trouver des manières de mieux soutenir et encourager ceux qui, dans les milieux des affaires, dans la société civile et dans les médias, travaillent à cette lutte contre la corruption - notamment en étendant l'accès aux données ouvertes dans le monde entier, ce qui pourrait jouer un rôle crucial dans l'assainissement du football. Nous devons faire plus pour que l'environnement économique mondial soit plus hostile à la corruption et apporte son soutien aux enquêteurs et aux ministères publics qui peuvent amener les responsables de ces actes devant la justice.

Nous devons aussi remettre en cause notre approche de la lutte contre la pauvreté à l'échelle mondiale. En tant que coprésident du Panel de haut niveau des Nations unies, je me suis battu pour mettre la bonne gouvernance au cœur du programme qui succèdera les Objectifs du millénaire pour le développement. Les négociations ont duré des mois, mais il existe aujourd'hui un consensus international clair sur un objectif explicite de réduction de la corruption. Si nous parvenons à mobiliser le monde entier pour atteindre cet objectif, nous pouvons tout à fait envisager de réaliser notre ambition d'éliminer la pauvreté à l'horizon 2030.

Le monde du football entame une longue route pour se débarrasser de la corruption, et il faudra du temps, du courage et de l'abnégation pour voir naître les réformes dont la FIFA a besoin. Je crois que les dirigeants mondiaux doivent faire preuve du même courage et de la même détermination pour commencer la longue bataille contre cette corruption qui menace notre sécurité et notre prospérité partout dans le monde. Telle sera ma mission demain lors du G7 et au cours des mois et des années à venir.

Ce blogue, publié à l'origine sur le Huffington Post UK, a été traduit de l'anglais par Mathieu Bouquet.

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Avril 2018

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