Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Fatigué, mais fatigué de la langue de bois

À force de ne plus dire les vraies choses, il devient évident que nous allons vers une société aseptisée, sans couilles, sans pensée individuelle, sans saveur, inodore et incolore.
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.

Cette semaine je lisais dans un quotidien : Selon les relations publiques du SPVM, la victime fut blessée gravement au haut du corps. Tiens donc, on croirait entendre un entraineur de hockey ne voulant pas divulguer la blessure d'un de ses joueurs. Les policiers se sont sûrement dit «On va déjouer l'agresseur, on ne va pas lui dire où il l'a frappé».

Alors, pourquoi nous donner la nouvelle? La prochaine étape c'est quoi?

L'homme fut tiré juste au-dessus des épaules... Non, c'est trop précis. L'homme fut atteint entre les orteils et les oreilles. Soyons flous, ne disons rien, tout en étant crédibles. Oui, crédibles n'avons nous pas une belle police bien habillée, pour nous endormir.

Autre bel exemple: Cette malheureuse histoire «Samantha Higgins». À la radio du 98.5 fm, un journaliste décrit l'endroit et les faits à Monsieur Jean Pagé. Il mentionne les sacs, le ponceau, le hameau. Pour faire bonne mesure, Monsieur Pagé fait une entrevue avec l'agente des relations publiques de la S.Q. Résultat : Peux pas vous dire pour les sacs, peux pas vous dire pour le ponceau, peux pas vous dire pour le sexe, mais je peux vous dire qu'il y a de l'eau pas loin. Wow! Trois longues minutes d'antenne pour en apprendre moins que ce que la radio nous raconte.

Qui n'a pas entendu ce classique : Une personne est décédée, c'est sous enquête, on ne peut rien dévoiler. Un homme, une femme, sais pas... Bien oui, on paye une personne des relations publiques pour nous dire ça. En fait, c'est tout simplement cette personne qui sert de tampon entre les enquêteurs, qui à mon sens, à part faire les enquêtes, sont tellement stupides, épais, caves, sans génies, qu'ils pourraient dire des choses comme : Oui, il y a un cadavre, oui ça ressemble à un meurtre, non, on a pas encore de suspect. Ça se faisait avant et je ne me souviens pas que la police ait perdu une cause à la cour pour ça.

En 1998, lors de l'enquête sur la piste cyclable, trois personnes avaient été gravement blessées. J'avais laissé partir une petite phrase: Ce sont des barbares, des voyous de la pire espèce et je vais les retrouver, promis. Les journalistes attendaient avec impatience les arrestations. Par la suite, mes patrons de l'époque sont accourus pour m'interdire de parler aux médias. Ce que je n'ai pas fait bien sur, mais au prix d'une guerre épique et de belles engueulades.

À force de ne plus dire les vraies choses, il devient évident que nous allons vers une société aseptisée, sans couilles, sans pensée individuelle, sans saveur, inodore et incolore. Mais rassurons-nous, il y a les programmes et les films américains, qui se remplissent de gros mots. Dans la vraie vie, ce n'est plus permis.

VOIR AUSSI SUR LE HUFFPOST

Avril 2018

Les billets de blogue les plus lus sur le HuffPost

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.