Je n'ai pas coutume de raconter des histoires sans nommer ou préciser, mais cette fois, comme il y a toujours des procédures en cour, une certaine discrétion s'impose.
Par un bel après-midi de juin, un enquêteur à la retraite reçoit l'appel d'une mère dévastée par la trahison d'un ami. Un jeune homme charmant, un peu gauche et si vulnérable, s'est insidieusement immiscé dans la vie de cette famille sans histoire. Le hic, il est pédophile!
Sans s'en rendre compte, elle a aidé le monstre à tisser sa toile, l'introduisant dans plusieurs organismes communautaires, sur quelques réseaux sociaux et son cercle d'amis. La jeune mère se sent maintenant trahie et humiliée. Apprenant qu'une autre mère a porté plainte à la police, l'ex- flic se dit qu'une enquête sera faite et tant mieux.
Malheureusement, malgré la preuve, la victime n'arrive pas à se faire entendre. Le sergent-détective de ce corps de police se traine délibérément les pieds.
Alors, le retraité commence à s'intéresser à l'affaire et retrace rapidement une trentaine de victimes potentielles, dont treize dans une métropole. Croyant avoir encore quelques amis dans son ancienne boîte, il fait quelques téléphones. Mauvaise surprise! Trop occupés, pas de notre ressort. Bref, arrange-toi avec ça.
C'est donc avec une petite équipe toute dévouée qu'il passe plus de trois mois à élaborer un dossier béton. Rejoignant plus de 500 personnes, écrivant des dizaines de déclarations, collectant des rapports de police de quelques villes. Pourtant, certaines victimes ne seront pas prises au sérieux.
En enquêteur chevronné, l'ex-flic file et fait arrêter le suspect pour bris de conditions, le jeune homme n'ayant pas le droit d'être dans un parc en compagnie d'enfants.
À la cour, un jeune avocaillon de la Couronne fera une boulette. Les nouvelles conditions ne sont pas claires. Alors, réponse du fautif...: «Je ne suis plus au dossier.» Et paf! Pas d'excuses, pas d'explications. Par chance, quelques policiers lui viennent en aide. Juste assez pour que l'on porte attention à la cause.
Finalement, plus de trois mois plus tard, c'est avec un dossier étoffé et des preuves béton qu'il rencontre des policières d'un corps de police national. Ces enquêteuses prendront le dossier en main pour arrêter et accuser le jeune pédophile. Ça, c'est l'histoire de l'enquête.
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Mais, il y a d'autres dimensions. Premièrement, la manipulation malsaine et destructive. Ce jeune homme aura démoli sans remords, sans soucis, sans vergogne, la vie de dizaines de personnes. Des mères lui faisant confiance, prenant ce jeune homme sous leurs ailes, croyant aux histoires tristes d'un jeune abusé par un père drogué, une mère alcoolique, une sœur dépravée. Un jeune homme tentant difficilement de s'en sortir, acceptant de l'argent pour ses fins de mois difficiles, des victuailles, des meubles. En fait, un fraudeur, menteur, manipulateur qui finalement se révèle pédophile. C'est pour ces mères, la trahison ultime.
Deuxièmement, il faut souligner l'insouciance et le manque d'empathie flagrant de certains enquêteurs de section et de policiers peu enclins à servir et protéger. Se faire dire par un policier qu'il est trop tard pour porter plainte; qu'il n'y a pas matière à prendre un rapport; qu'il s'agit d'hystériques que le crime n'est pas si grave; que vous pourriez être complice. J'en passe.
Ceci revient à dire que si ce vieil enquêteur ne reprend pas son bâton de pèlerin, s'il ne frappe pas à toutes les portes, si avec son équipe toute dévouée il ne monte pas de dossier, ce jeune homme continuerait à détruire émotivement et physiquement des enfants, des mères, des couples et sa propre famille.
Faut-il maintenant se monter des enquêtes IKEA?
