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Crise financière des organismes communautaires: le gouvernement doit prendre des engagements

Le financement à la pièce n'est pas acceptable et le mouvement de l’action communautaire autonome en a assez d’attendre et de se faire offrir les fonds de tiroir des ministères.
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À la lumière de ce récent sondage, il est maintenant évident qu’un engagement pour le communautaire serait perçu très positivement par la population.
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À la lumière de ce récent sondage, il est maintenant évident qu’un engagement pour le communautaire serait perçu très positivement par la population.

Dans la foulée des activités entourant la Semaine nationale de l'action communautaire autonome, qui se tient du 22 au 28 octobre, le Réseau québécois de l'action communautaire autonome (RQ-ACA) a publié les résultats d'un sondage sur la perception de la population à l'égard des organismes communautaires. Les résultats sont concluants et le communautaire passe haut la main le test de l'opinion publique. Est-ce étonnant? Pas vraiment. Après tout, les organismes ne sont-ils pas le reflet des gens de la communauté?

Un mouvement bien ancré dans les communautés

La bonne nouvelle c'est que le mouvement de l'action communautaire autonome n'est pas désincarné de ses origines et de son approche citoyenne. Une grande partie de la population, soit sept personnes sur dix, a déjà eu des contacts directs avec des organismes soit comme travailleur ou travailleuse, soit comme bénévole, soit en bénéficiant de leurs services. Ces résultats nous démontrent qu'à travers leurs 50 ans d'histoire, les organismes d'action communautaire autonome ont su garder le cap sur leurs pratiques citoyennes et qu'ils sont toujours connectés aux communautés.

L'autre bonne nouvelle, c'est que la population sait exactement en quoi consiste notre travail de transformation sociale. Elle sait que nous donnons une voix aux personnes généralement exclues des débats publics, que nous les aidons à améliorer leurs conditions de vie et que nous les amenons à se mettre ensemble pour défendre leurs droits. Elle reconnait même que notre action à un impact sur l'amélioration des lois et des politiques publiques. C'est une tape dans le dos qui tombe à point, particulièrement dans un contexte où l'État s'intéresse beaucoup plus à notre offre de services qu'à notre action sociale ou politique.

Le mouvement de l'action communautaire autonome emploie beaucoup de monde, 58 000 au total, en plus des 424 000 bénévoles.

De plus, la population reconnait volontiers que nos organismes ont un impact économique important au Québec. Après tout, le mouvement de l'action communautaire autonome emploie beaucoup de monde, 58 000 au total, en plus des 424 000 bénévoles.

Conséquemment, 84% des Québécois et des Québécoises souhaitent que les organismes soient financés adéquatement pour le travail qu'ils font et les services qu'ils rendent à la société. Un soutien inespéré en cette période de crise financière qui perdure depuis des années.

Manque d'argent ou manque de volonté?

Pourtant, le gouvernement se targue d'investir 1 milliard de dollars dans les organismes communautaires. N'est-ce pas un financement adéquat? Bien sûr que non! Cela fait plus de 15 ans que le financement stagne. Que l'indexation, quand il y en a, n'est pas à la hauteur de l'augmentation des coûts de fonctionnement. Le taux horaire moyen des travailleurs et des travailleuses du communautaire est de 18,71$ alors que la moyenne au Québec est de 24,23$. Les organismes sont obligés de réduire les heures d'ouverture, de réduire leurs services à la population, de faire des mises à pied et, pour plusieurs, de fermer leur porte pendant plusieurs mois voire, dans certains cas, définitivement. Tout ça dans un contexte où la population fait de plus en plus appel à eux pour obtenir des services. Résultat: les listes d'attente augmentent et le personnel épuisé s'en va travailler ailleurs. Qui en souffre le plus? La population qui a désespérément besoin d'aide.

Si la population du Québec reconnait notre contribution positive à la société québécoise, pourquoi le gouvernement ne s'engage-t-il pas à financer adéquatement les organismes d'action communautaire autonome?

Si la population du Québec reconnait notre contribution positive à la société québécoise, pourquoi le gouvernement ne s'engage-t-il pas à financer adéquatement les organismes d'action communautaire autonome?

Serait-ce parce qu'il n'est pas au courant de la situation? Bien sûr que non. Le mouvement communautaire rencontre régulièrement les ministres et les élus à ce sujet et mène depuis des années des campagnes de lettres, fait signer des pétitions, organise des manifestations et même des journées de grève.

Serait-ce parce que l'État manque d'argent? La population et les organismes ne sont pas dupes. Des surplus, il y en a pour 4,5 milliards de dollars si on compte l'argent versé au Fonds des générations qui sert à payer une dette que le gouvernement a créée de toute pièce en se privant de l'impôt des grandes entreprises et des plus riches.

Une autonomie chère payée

Le sous-financement des organismes s'expliquerait-il par le fait que les organismes luttent contre une vision utilitariste de leur travail? Parce qu'ils refusent d'être réduits à la simple fonction de prestataires de services? Il y a fort à parier que si les organismes d'action communautaire autonome acceptaient de laisser tomber leur travail de transformation sociale pour se consacrer entièrement à la prestation de service, le gouvernement s'empresserait de sortir le chéquier.

Serait-ce parce que les organismes se battent pour préserver leur autonomie? Notre action repose essentiellement sur la reprise du pouvoir individuel et collectif des gens vivant diverses formes de difficultés. Elle s'appuie sur la capacité des citoyens et des citoyennes à identifier les problèmes présents sur leur territoire et à trouver des solutions originales et adaptées pour y faire face. L'autonomie des communautés fait-elle toujours partie des valeurs du gouvernement? Pourquoi celui-ci ne fait-il pas plus confiance aux gens de la communauté et ne leur donne-t-il pas les moyens adéquats, via les organismes d'action communautaire autonome, d'agir sur les problèmes sociaux qui les touchent, de près ou de loin?

Le financement à la pièce n'est pas acceptable et le mouvement de l'action communautaire autonome en a assez d'attendre et de se faire offrir les fonds de tiroir des ministères.

À la lumière de ce récent sondage, il est maintenant évident qu'un engagement pour le communautaire serait perçu très positivement par la population. Qu'attend le gouvernement pour prendre des engagements significatifs, cohérents et concertés dans l'ensemble des ministères? Le financement à la pièce n'est pas acceptable et le mouvement de l'action communautaire autonome en a assez d'attendre et de se faire offrir les fonds de tiroir des ministères. L'action communautaire autonome, c'est un mouvement citoyen composé d'organismes qui se connaissent, qui se respectent et qui travaillent côte à côte pour résoudre des problèmes sociaux de plus en plus complexes et interreliés. Un mouvement qui est plus mobilisé et plus solidaire que jamais. Et surtout, un mouvement bien déterminé à obtenir des engagements financiers à la hauteur des services qu'il rend à la population et à la société.

Avril 2018

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