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La pédagogie de l'indépendance: cette histoire de famille

Pourquoi les médias ne parlent-ils pas d'indépendance? Voilà une discussion que l'on peut avoir souvent lorsque l'on échange avec des indépendantistes. Ces discussions sont souvent suivies de conclusions un peu trop simples: «Les médias ne sont pas notre bord»; «C'est parce qu'il s'agit de Gesca». Loin de moi l'idée de nier la forte influence politique de plusieurs médias. Cela dit, il me semble que la question est légèrement plus complexe qu'on veut le croire.
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Pourquoi les médias ne parlent-ils pas d'indépendance? Pourquoi ne traitent-ils pas d'une déclaration ou d'une autre de nos représentants concernant directement cet enjeu crucial? Pourquoi choisissent-ils de passer sous silence ou de mentionner rapidement des éléments qui sont, pour certains, essentiels?

Voilà une discussion que l'on peut avoir souvent lorsque l'on échange avec des gens qui s'impliquent dans le mouvement indépendantiste de manière régulière. Ces discussions sont souvent suivies de conclusions un peu trop simples, mais combien réconfortantes : «Les médias ne sont pas notre bord»; «C'est parce qu'il s'agit de Gesca»; «C'est parce que le beau-frère du journaliste est fédéraliste», etc.

Loin de moi l'idée de nier la forte influence politique de plusieurs médias. Cela dit, il me semble que la question est légèrement plus complexe qu'on veut le croire.

La dernière conversation que j'ai eue à ce sujet portait sur le lancement de la campagne du Bloc québécois. On me décrivait, emballé, un excellent discours de Gilles Duceppe dans lequel celui-ci mettait de l'avant les avantages d'un Québec souverain pendant de longues minutes. Or, un bref coup d'œil à la couverture médiatique a suffi pour constater que cette partie du discours, qui enflamme de nombreux militants, était passée sous le radar, à l'exception d'une brève mention dans La Presse (ironiquement!). Pourquoi me direz-vous? Et surtout, comment va-t-on convaincre les gens des avantages de l'indépendance si ceux-ci ne sont pas largement diffusés?

Imaginons que vous racontiez vos histoires de famille à une vague connaissance que cela ne concerne pas. Votre interlocuteur vous écoutera probablement poliment, mais je doute fort qu'il en parle à son entourage avec autant d'énergie que vous, et même qu'il se souvienne des détails de votre récit le lendemain. Par contre, il n'en sera sûrement pas de même si vous en parlez à votre sœur, votre mère ou votre père qui, étant impliqués dans l'histoire, voient des répercussions concrètes dans leur vie.

C'est exactement ce à quoi on assiste lorsque les indépendantistes s'adonnent à la fameuse «pédagogie de l'indépendance» sans qu'il y ait de prise dans le réel sous la forme d'un engagement concret et clair: les indépendantistes sont heureux, en discutent entre eux, mais on peut légitimement se demander pourquoi les journalistes, au même titre que la population, tendraient l'oreille et diffuseraient avec enthousiasme le contenu de discours qui ne reposent sur aucune proposition concrète.

Ainsi, une pédagogie efficace et utile devrait être accompagnée d'un engagement clair et sans équivoque plaçant la population devant un choix et les journalistes devant un fait d'actualité. Sans cela, je vois difficilement comment on peut blâmer les journalistes de n'y voir ni plus ni moins qu'un moment dédié aux partisans pour maintenir la flamme pendant que l'on parle «des vraies affaires» à la population.

D'ailleurs, dès le lendemain de son lancement de campagne, Gilles Duceppe revenait déjà au discours traditionnel du Bloc, qui fait peu de place à l'indépendance, et beaucoup aux simples revendications provinciales. À cet égard, on peut difficilement exiger davantage du chef bloquiste, qui, alors qu'un référendum sur l'indépendance ne demeure qu'une lointaine hypothèse, se voit confiné au seul rôle qui s'offre à lui : celui de chef d'un parti fédéral dont les députés seront, dès le lendemain de l'élection, sollicités quotidiennement sur des enjeux qui ont bien peu à voir avec l'indépendance.

Fait intéressant, dans les derniers jours, Pierre-Karl Péladeau déclarait qu'il entendait désormais afficher clairement la volonté de son parti de réaliser la souveraineté du Québec (Radio-Canada). Si cette sortie a percé davantage le mur des médias que la pédagogie indépendantiste de Gilles Duceppe, c'est parce qu'elle peut avoir des répercussions politiques tangibles. Il est à espérer que le chef péquiste continuera dans cette voie afin que les discours portant sur les bienfaits de l'indépendance intéressent connaissances, amis, collègues... et pas seulement la famille indépendantiste qui, depuis trop longtemps, se ressasse les mêmes vieilles histoires au lieu d'en écrire de nouvelles.

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