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J'affectionne particulièrement le slam, un mode d'expression avec lequel j'expérimente depuis déjà quelques années.
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brazzo via Getty Images

La vérité, c'est que nul ne peut vraiment employer le mot «slam» en étant particulièrement catégorique. Lorsqu'il précède «dunk», les prouesses de Michael Jordan vous viennent peut-être à l'esprit, mais on entend parfois des adeptes européens de musique métal qui l'emploient pour parler de la bousculade amicale qui prévaut au sein du traditionnel «mosh pit». Cependant, c'est pour désigner une forme de poésie qu'on l'utilise le plus souvent de nos jours. Justement, jasons slam.

C'est Mark Smith, un poète de Chicago qui en a pensé la formule en 1984. Rien de très compliqué : 3 minutes max, aucun accessoire et il faut être l'auteur de son propre texte. Siffle, récite, scande, rime, vocifère, fais de l'humour ou entonne un air si ça te chante, mais fais-le en 3 minutes. Les cinq juges sont choisis au hasard dans la foule et donne des notes sur 10 selon leurs propres critères, aussi personnels et arbitraires soient-ils. Juste assez compétitif pour que ce soit un peu excitant, juste assez informel pour éviter que les poètes se prennent trop au sérieux. Juste, point final.

Cette formule est observée partout dans le monde, dans les multiples contrées où quelqu'un a simplement décidé de le faire. Montréal n'y fait pas exception, grâce aux efforts d'Ivy et Sabine (je les salue bien bas), qui ont d'ailleurs propagé l'idée partout au Québec. Ainsi, Gatineau, Saguenay, Québec, Sherbrooke et l'Est-du-Québec ont eux aussi leur propre scène de slam. Il existe également des compétitions internationales, dont la Coupe du monde de slam de poésie à Paris, où le gagnant de la Ligue québécoise ira représenter le Québec au printemps prochain.

J'adore ces soirées où les styles, les générations, les humeurs, les accents se mélangent pour former une mosaïque qui ne manque jamais d'être inspirante.

J'affectionne particulièrement ce mode d'expression avec lequel j'expérimente depuis déjà quelques années. En effet, je suis de ceux et celles qui se pâment devant la verve des slameurs et qui ne peuvent résister à l'envie de prendre part au festin lyrique. J'adore ces soirées où les styles, les générations, les humeurs, les accents se mélangent pour former une mosaïque qui ne manque jamais d'être inspirante.

La variété y est vraiment explosive. Certaines pièces émeuvent les foules, alors que d'autres les plongent dans la réflexion absorbée. Un soir, une poétesse parviendra à dérider tout un public, et le soir suivant, un poète titillera les cordes sensibles d'un autre. On entend fables et fabulations, rimes et assonances, ballades et complaintes. Naturellement, l'humour s'invite souvent. L'amour aussi.

Il arrive qu'on me demande comment je conçois le slam et si ma manière d'écrire est influencée par la fameuse formule de Smith. Dans une certaine mesure, oui. Principalement en ce qui a trait à l'oralité de la chose. Étant friand de rimes, je sculpte les sons, les accents toniques et les contractions dans mes textes en considérant toujours que ce sera moi qui livrerai le tout devant public. Autrement dit, je sais que ces poèmes ne seront pas lus, mais bien entendus. Certes, même la poésie classique est souvent récitée. Cependant, il est rare que l'on ne l'écrive que pour cet usage exclusif. Or, personnellement, lorsque je rédige des poèmes destinés aux slams, je les conçois uniquement dans leur forme orale. C'est la performance qui mène le bal, et non la lecture. Évidemment, il existe autant d'approches qu'il existe de slameurs, mais telle est ma manière de voir les choses. Une poésie purement performative, qui s'exprime de manière hautement personnelle, à coups de 3 minutes.

Je conseille à tout le monde dont la curiosité est piquée en ce moment à tenter l'expérience.

En terminant, il faut le reconnaître d'emblée : on s'est perdu quelque part dans le processus de définition de ce mouvement poétique un peu singulier. À la base, un «slam», c'est un événement. Une soirée poésie, en quelque sorte. Je crois qu'on a commencé à parler «du slam» suivant le succès de Grand Corps Malade, qui parlait du truc non pas comme d'un événement, mais comme d'une sorte de discipline (comme «du rap» ou «du chant»).

Mon intuition me dit qu'il s'agit d'une erreur d'adaptation linguistique. En effet, les slams de poésie nous viennent de milieux anglophones, où on parle de «slam poetry» comme on dirait «winter boots». Le sens serait donc «type de poésie qu'on entend dans un événement nommé "slam"», au même titre que «winter boots» signifie «type de bottes qu'on porte en hiver». Ainsi, «slam poetry» engloberait tout écrit, de n'importe quelle nature (tant qu'il dure 3 minutes), qu'on réciterait dans un slam. «Poésie de slam», si on veut.

Or, j'imagine qu'un francophone a entendu «slam poetry» en comprenant «poésie de type slam», comme s'il s'agissait d'une catégorie en soi. La nuance s'étant perdue en chemin, nous voilà maintenant avec un mot fourre-tout au sens plutôt confus. En effet, «slam» semble parfois désigner un événement (slam de poésie), parfois une catégorie (du slam), parfois un seul poème (un slam).

C'est le premier qui est techniquement exact, mais au fond, est-ce vraiment si important? Le but, c'est de baigner dans ce lyrisme libéré, dans ces images éclatées, dans les univers déjantés de ceux et celles qu'un slameur français dont le nom m'échappe appelait «les aristocrasseux».

À surveiller

J'invite les poètes de partout au Québec à consulter les pages de leur région respective (voir liens plus haut) pour connaître les dates des prochains slams.

NousTv Rimouski procède également à une diffusion sporadique des prestations du dernier Grand Slam. Je fais d'ailleurs partie du lot.

Dernièrement, pour ceux et celles qui habitent Montréal, la championne du monde 2016, l'époustouflante Amélie Prévost, convie tous les adeptes de slam à une compétition internationale multilingue à la fin mars. Tous les textes en langues étrangères seront surtitrés.

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