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Parce que nos profs méritent mieux et nos stagiaires aussi

Si vous voulez valoriser la profession enseignante, il faut valoriser le statut des stagiaires en enseignement.
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Lettre ouverte destinée à Mme Hélève David, ministre de l'enseignement supérieur, de la part d'Antoine Côté, étudiant en enseignement secondaire et porte-parole de la CRAIES

Mme David,

En cette période de l'année, comme vous le savez probablement, des milliers d'étudiantes et d'étudiants en quatrième année en enseignement s'apprêtent à commencer leur stage final. Planification, prestation d'enseignement, correction, suivi avec les parents ou les autres professionnels de l'éducation, rencontres de toutes sortes : ces stagiaires prendront toutes les responsabilités d'un enseignant à temps plein pour les mois à venir. Laissez-moi vous parler de l'état d'esprit qui règne actuellement dans les facultés des sciences de l'éducation au Québec.

Si la majorité des étudiantes et étudiants en enseignement sont fébriles à l'idée d'entamer l'étape finale de leur formation, les stagiaires appréhendent aussi la précarité financière et le stress qui l'accompagnent. La problématique n'est pas que statistique : elle a plusieurs noms, plusieurs visages. En voici un.

Le 22 janvier dernier, Annie-Claude Lamarche a commencé son stage de prise en charge totale dans un collège privé de l'Île de Montréal. Tous les jours, elle doit passer deux heures dans les transports en commun. Elle fait l'aller-retour de Verdun, où se trouve son appartement, jusqu'à son école de stage, où elle doit être présente minimalement de 8h à 15h du lundi au vendredi. Sur place, elle prend en charge les classes entières d'une enseignante et participe, en parallèle, aux diverses activités pédagogiques de l'école. Au retour à la maison, le travail n'est pas terminé : elle travaille durement pour respecter les exigences spécifiques de l'université tout en étant cohérente avec la planification initiale de son enseignante associée. Sa vie chargée de stagiaire n'efface pas ses obligations universitaires : en plus de la planification et de la correction, elle doit compléter les entrées de son journal de bord, ses réflexions de stage, préparer ses supervisions et participer à six séminaires, qui ont lieu les soirs entre 18h et 21h.

Cette double charge de travail, étudiante et professionnelle, n'est ni reconnue ni valorisée : alors que sa nouvelle vie ne lui permet pas de s'investir dans un emploi à temps partiel à la hauteur de ses besoins monétaires, la jeune femme ne reçoit aucune compensation financière.

Cette expérience, enrichissante, mais très éprouvante, se poursuivra jusqu'en avril, car le stage d'Annie-Claude est d'une durée de 14 semaines. Cette double charge de travail, étudiante et professionnelle, n'est ni reconnue ni valorisée : alors que sa nouvelle vie ne lui permet pas de s'investir dans un emploi à temps partiel à la hauteur de ses besoins monétaires, la jeune femme ne reçoit aucune compensation financière.Pourtant, elle a dû se procurer du nouveau matériel scolaire et de nouveaux vêtements qui respectent le code vestimentaire en vigueur dans son école de stage. Comment fait-elle pour continuer à payer son loyer, sa nourriture, ses frais de scolarité ? Doit-elle continuer à travailler, malgré les consignes claires de son université, quitte à négliger sa réussite scolaire ? Est-ce là le seul choix qui s'offre à elle ?

Il faut offrir à ces stagiaires un autre choix, une autre option. Ce passage obligé dans la précarité financière est inacceptable. Le surmenage et la détresse psychologique qui en découlent sont intolérables. À l'aube de la rentrée parlementaire, je vous demande d'offrir aux stagiaires comme Annie-Claude une compensation financière, une aide qui leur permettra de respirer et de se concentrer pleinement sur leur stage final, une étape cruciale de leur formation qui mérite toute leur attention.

Si vous voulez valoriser la profession enseignante, il faut valoriser le statut des stagiaires en enseignement. Il est temps de prendre des engagements structurants pour l'éducation au Québec. Mme la ministre, il est temps d'agir. Parce que nos profs méritent mieux et nos stagiaires aussi.

Avril 2018

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