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Omnipotent, omniprésent, l’image de l’Empereur Napoléon décortiquée au MBAM

Les Français ont beau avoir guillotiné leur monarchie, Napoléon 1er et son empire continu d’être célébré en Hexagone.
Musée des beaux-arts de Montréal

Les Français ont beau avoir guillotiné leur monarchie, Napoléon 1er et son empire continuent d'être célébrés en Hexagone à travers plusieurs expositions d'envergure. De l'autre côté de l'Atlantique, chez nous, le Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM) dévoile à partir du 3 février des pièces uniques au temps où Bonaparte rendait son faste à la cour royale.

Comme son titre l'indique, l'expo Napoléon: Art et vie de cour au palais impérial met en valeur l'intérieur des résidences et le personnel de l'empereur et de sa famille. Car quoi qu'on en pense, le souverain ne s'est pas fait tout seul. Autour de lui, artistes et grand chambellan sont à son service.

Six grands officiers de la Couronne, établis dans cinq châteaux – autrefois lieux d'habitation des illustres rois français – vont échafauder une nouvelle étiquette de cour exclusivement consacrée à la figure bonapartienne magnifiquement illustrée par le Portrait de Napoléon en grand habillement de François-Pascal Simon Gérard, premier tableau qui accueille le visiteur de l'exposition. Ensuite, Napoléon sous toutes les coutures et dans toutes les postures, tantôt guerrier sur un cheval, tantôt romantique, à l'allure postrévolutionnaire, les cheveux au vent, le visage sublimé.

«Napoléon a fait preuve d'une incroyable modernité, raconte en entrevue Nathalie Bondil, directrice du MBAM. Contrairement à une monarchie française comme celle millénaire des Bourbons qui finalement évoluait dans une sacralité instaurée dans la psyché collective, Napoléon a très bien compris la force de la communication. Il a été un grand maître de la propagande. Au musée, on découvre le faste, l'apparat d'une machinerie idéologique et politique faite pour marquer la venue d'une nouvelle dynastie.»

Même si le MBAM bénéficie d'une collection sur Napoléon déjà exceptionnelle grâce au don du philanthrope montréalais Ben Weider, dont le fameux bicorne de l'empereur, plus de 400 œuvres et objets d'arts, provenant de quelque 50 prêteurs, constituent le corps de cette exposition inédite revenant sur le rôle de la Maison de l'Empereur (3500 employés) durant le règne de Napoléon, depuis son couronnement en 1804 jusqu'à son exil sur le roc de Sainte-Hélène en 1815.

«L'objectif d'une telle exposition, c'est de montrer l'excellence des artistes et des artisans qui travaillent au service du corps impérial. Là, on est à un summum des manufactures françaises avec des prêts inouïs. La plupart des objets sont d'ailleurs présentés pour la première fois en Amérique du Nord.»

Le mythe napoléonien

Le trône de l'Empereur provenant du palais de Monte Cavallo, à Rome, les sièges et les tabourets protocolaires, les superbes tapisseries illustrant les parties du monde, signées François Dubois, tout évoque la magnificence. Les visiteurs suivent un parcours composé de multiples trésors comme la table dite «des palais impériaux», sortie tout droit de la célèbre manufacture de Sèvres.

L'Empereur, ancien révolutionnaire qui dormait peu et pas très friand des mondanités, va pourtant organiser, avant l'heure, une véritable campagne de relation publique composée, entre autres, de fêtes somptueuses à l'intérieur de palais aux décors luxueux. «Personne aujourd'hui ne pense à défendre le régime dictatorial napoléonien et pourtant il existe toujours cette marque qui s'impose, cette fascination envers l'image d'une personne qui a bouleversé le champ de la politique dans sa représentation morale», précise Nathalie Bondil.

Napoléon Bonaparte (1769-1821) prend le pouvoir quelques années seulement après la Révolution française qui met fin à l'Ancien Régime. Mais comment ce général, parti de rien, réussit-il à se faire sacrer empereur? Par un coup d'État certes, mais l'important n'est pas l'accès au trône, mais sa pérennité. Sous la lettre «N», le nouvel homme fort va s'évertuer à immortaliser sa présence «providentielle» tout en faisant trembler l'Europe entière. Il y parviendra en seulement dix ans de règne jusqu'à l'exil forcé sur un îlot perdu au milieu de l'Atlantique.

«Malgré une fin abrupte, le mythe perdure. Tout titre impérial lui sera refusé par ses geôliers anglais lors de son dernier exil à Sainte-Hélène. Il va toutefois s'entêter à maintenir un certain apparat avec ses proches et ses anciens maîtres de cérémonie. Pour lui, ce n'est pas le général déchu, le tyran corse ou l'usurpateur envoyé sur une île, mais bel et bien l'Empereur, toujours l'Empereur! Ce n'est pas pour rien que des présidents français comme De Gaule ou aujourd'hui Macron, se réfèrent encore à cet imaginaire napoléonien», conclu la directrice.

Napoléon: Art et vie de cour au palais impérial – Musée des beaux-arts de Montréal – Du 3 février au 6 mai 2018.

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