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Comment le PQ va-t-il remonter la pente en 2018?
LA PRESSE CANADIENNE

MONTRÉAL – Jean-François Lisée est convaincu que les dix prochains mois ressembleront à sa dernière course à la direction du Parti québécois (PQ).

Attablé dans un café de la rue Masson à Montréal, celui qui a promis de paver le « chemin des victoires » reconnaît qu'il a des difficultés à s'imposer dans le climat politique actuel. Non seulement son parti est troisième dans les sondages, mais une minorité de Québécois croient qu'il ferait un bon premier ministre.

« Je trouve que la situation est semblable à celle que j'avais au début de ma course au leadership. On disait : bah, c'est intéressant, mais ça ne se peut pas que ça marche! »

« C'est clair que les quelque 50 000 membres du Parti québécois qui ont voté avaient la même perception, ou presque, que le reste des Québécois. Et là, ils m'ont beaucoup vu. On a fait le tour des régions, on a fait plusieurs débats, puis ce n'est pas juste mes idées qu'ils ont adoptées, ils ont dit : finalement, on va voter pour lui. »

Après le départ du chef Pierre Karl Péladeau, en mai 2016, les députés Alexandre Cloutier et Véronique Hivon étaient vus comme les meneurs. La majorité du caucus a fini par se rallier au jeune député de Saint-Jean, qui avait causé la surprise de la dernière course à la direction en finissant deuxième. Il allait de soi, presque, que le PQ allait vivre son « moment Cloutier ».

La candidature de M. Lisée, qu'il a officialisée en juin 2016, faisait hausser les sourcils. Non seulement il avait abandonné la dernière course à la direction, mais il faisait campagne en promettant de reporter la tenue d'un référendum à un deuxième mandat d'un gouvernement péquiste majoritaire.

Le vent a commencé à tourner pour lui après le retrait de Véronique Hivon. Les quatre députés qui appuyaient la députée de Joliette lui ont donné leur appui. M. Lisée a croisé le fer avec M. Cloutier dans les débats avec des échanges acrimonieux sur l'identité. En parallèle, l'élu de Rosemont avait déjà entrepris de montrer son côté « givré » aux militants pour se défaire de son image d'intellectuel.

Ça fait partie de mon vécu politique, de sortir la difficulté et de monter.

Le 8 octobre 2016, contre toute attente, M. Lisée a obtenu 50,63% des voix au terme de deux tours de scrutin, devenant ainsi le neuvième chef du Parti québécois.

Incarner le changement

M. Lisée dit avoir la « même conviction » pour les élections de 2018. D'ici au 1 octobre prochain, il fait le « pari » que la population va, petit à petit, se rendre compte que la Coalition avenir Québec (CAQ) n'est pas la voie du changement espéré au Québec.

« En ce moment, il y a une montée de la CAQ. Je la vois, je suis lucide, admet-il. Puis, je me dis : très bien. C'est une occasion de mettre en lumière ses propositions et de débattre de ses propositions. Et je pense que plus elles seront connues, plus elles seront rejetées. Je serais beaucoup plus inquiet s'ils avaient de très bonnes propositions. Ça se pourrait! Mais ce n'est pas le cas. »

La lutte politique, ces jours-ci, écarte presque complètement l'opposition officielle. En fin d'année, le Parti québécois a fait les manchettes pour le débat entourant le « Bonjour-Hi » - un « piège » dont s'est vanté l'ancien stratège des premiers ministres Jacques Parizeau et Lucien Bouchard, après coup.

M. Lisée compte-t-il se fier uniquement sur des stratégies du genre pour faire mal à ses adversaires et espérer tirer son épingle du jeu politique?

« Ça fait partie de mon vécu politique, de sortir la difficulté et de monter, martèle-t-il. Si je n'avais pas la conviction que ce qu'on propose pour les Québécois est au diapason aux besoins et que ce que proposent nos adversaires est vraiment mauvais, je serais moins confiant que je le suis. »

«Oui, je vais utiliser des phrases choc»

Reste que le chef péquiste marque parfois des points de façon controversée et ce, depuis sa course à la direction. M. Lisée avait notamment refusé de s'excuser après avoir associé Alexandre Cloutier à l'imam Adil Charkaoui. Après cet épisode, M. Cloutier avait reçu des menaces et des insultes.

Cet été, M. Lisée avait été vivement critiqué, par l'ex-ministre péquiste Louise Harel, entre autres – parce qu'il avait qualifié les demandeurs d'asile d'«invités de Justin Trudeau».

Plus récemment, ce sont ses commentaires sur la circonscription de Gouin, un «territoire du Parti québécois non cédé», qui ont été considérés comme une insulte par le député Gabriel Nadeau-Dubois. M. Lisée répond plutôt que ses commentaires étaient « un coup de chapeau aux revendications autochtones ».

« Ça fait partie de mon authenticité aussi. Oui, je vais faire des jeux de mots, oui, je vais utiliser des phrases choc. Des gens seront pour, des gens seront contre, mais ça fait partie de la façon que j'ai de faire de la politique », se défend-t-il.

Le chef péquiste accuse « la gauche qui est proche de QS » de vouloir « aseptiser » le débat public et de contribuer à la « régression » de la liberté d'expression.

« Moi, je me suis battu contre la droite, j'ai écrit Comment mettre la droite K.-O. en 15 arguments, je suis allé le présenter dans des Chambres de commerce, j'ai fait des débats avec Éric Duhaime, etc. La liberté d'expression, c'est la liberté qu'Éric Duhaime parle à côté de moi. Ensuite, que les meilleurs arguments gagnent. »

« Alors oui, je trouve qu'il y a une dérive, qui n'est pas seulement au Québec. On le voit en Amérique du Nord et au Canada anglais. Un genre d'imposition, de restriction de la liberté d'expression et je crois que les hommes politiques, les femmes politiques doivent résister à ça s'ils veulent rester authentiques. Ensuite, les gens posent leur jugement. »

En route vers 2018

S'il est élu dans un premier mandat, M. Lisée promet de « redonner de la fierté à la nation » sur les questions de la langue et de laïcité. Il veut aussi poursuivre le virage vert du Québec et redonner aux Québécois confiance en leurs services publics.

« L'objectif central, c'est qu'après quatre ans, la nation québécoise aura retrouvé son élan, son estime de soi qui, je trouve, a été très ébranlée dans les dernières années », décrit-il.

« Est-ce qu'il y a un autre sujet qui va s'imposer à deux semaines de l'élection? Ce n'est pas impossible. On ne le sait jamais. L'élection montréalaise s'est jouée sur le nombre de billets donnés à la Formule E. C'était symbolique de beaucoup d'autres choses, mais c'était quand même important », rappelle le chef de l'opposition officielle.

Entretemps, M. Lisée reconnaît qu'il aura des « efforts » à faire pour travailler sur son image, tout comme pour sa course à la direction. Mais pas question de changer pour mieux séduire l'électorat québécois. « Je suis celui que je suis », affirme-t-il.

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