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Concerts de clôture de l'OSM : «War Requiem», la poésie et non la guerre

«War Requiem» de l'OSM, la poésie et non la guerre
Pierre-Étienne Bergeron

L'Orchestre symphonique de Montréal (OSM) clôturera sa saison avec «War Requiem», l'œuvre chorale du Britannique Benjamin Britten composée en 1962 pour manifester son rejet de la guerre et de toutes ses atrocités. Entretien avec le chef Kent Nagano.

War Requiem, opus 66 est un requiem non liturgique qui nécessite trois solistes (soprano, ténor, baryton), un chœur (de l’OSM), un chœur d'enfants (Princeton High School Women's Choir), un orgue, un grand orchestre et un orchestre de chambre. Son exécution dure environ 85 minutes. L’œuvre fut créée le 30 mai 1962 pour la reconstruction de la cathédrale de Coventry, détruite pendant la Seconde Guerre mondiale par des bombardements.

«War Requiem a connu une vague de popularité dans les années 1960, raconte Kent Nagano au bout du fil. L’OSM a joué l’œuvre peu de temps après son écriture. Mais ça fait plus de 25 ans qu’elle n’a pas été proposée par nos musiciens. Peu d’entre eux ont déjà joué cette pièce, en fait. Pas dans le contexte de l’OSM en tout cas. Nous eu une première impression de l’œuvre ce matin. Nombreux musiciens m’ont dit être très touchés par War Requiem. Ce sera une semaine très émotive.»

Dimanche était en effet un jour spécial pour l’OSM. Première répétition de l’œuvre effectuée par les musiciens et première rencontre avec les solistes que sont la soprano Catherine Naglestad (Américaine), le ténor Ian Bostridge (Britannique) et le baryton Russell Braun (Canadien). Kent Nagano connait chaque soliste, personnellement. Il a choisi minutieusement chacun d’entre eux pour cette œuvre. «J’ai connu les trois solistes en raison de mon travail à l’opéra de Munich, en Allemagne, indique le chef d’orchestre. Russell Braun et moi avons déjà travaillé ensemble, il y a un an. Je collabore aussi beaucoup avec Ian Bostridge. Nous venons récemment de faire Passion selon Saint Matthieu (de Johann Sebastian Bach). Même si nous n’avons jamais offert Britten ensemble, nous sommes très proches l’un de l’autre au plan esthétique. Il est dans la tradition de Peter Pears (le chanteur classique britannique).»

Kent Nagano a également travaillé avec Catherine Naglestad. D’après lui, c’est un concert tout spécial pour la soprano : «Il y a deux semaines, nous avons fait le Ring de Richard Wagner ensemble, à Munich. C’est la première fois qu’elle chante War Requiem. Nous avons déjà fait des prérépétitions à Hambourg. Nous allons continuer de pratiquer tous ensemble, dès aujourd’hui.»

La poésie plutôt que la guerre

Quand on a demandé à Benjamin Britten de composer une œuvre pour une cérémonie inaugurale entourant la reconstruction de la cathédrale, ce dernier a fait fi de la grandeur de l’armée britannique victorieuse et a plutôt choisi de dénoncer l’acte guerrier. C'est ainsi qu'il eut l'idée d'associer le cérémonial du requiem catholique romain à la poésie de Wilfred Owen, un artiste bien connu en Angleterre qui a vécu la Première Guerre mondiale. Témoin et victime du terrifiant conflit en tant que soldat, ses textes ont inspiré à Britten un manifeste de résistance contre l’absurdité de la guerre. C’est devenu un chef-d’œuvre du 20e siècle.

«J’aime la façon que Britten a combiné les textes et la poésie d’Owen, affirme Kent Nagano. Aujourd’hui, il est considéré comme un grand poète en Angleterre. Il faut dire aussi que Britten, lui, a vécu la Deuxième Guerre mondiale en prison. Il était un objecteur de conscience, un pacifiste. Pour lui, son regard sur la guerre était très spécial à l’époque. En musique, il a mélangé les mondes latins et britanniques. D’ailleurs, les textes en anglais [dans War Requiem] représentent d’une part le soldat britannique et de l’autre côté, le soldat allemand. L’idée était qu’ils deviennent amis…»

Au dire du chef d’orchestre, le monde en 2016 est encore gravement touché par les conflits internationaux. War Requiem est de toute évidence une œuvre très pertinente qu’il devait ramener dans le répertoire de l’OSM.

«Le premier chœur représente la société, explique Nagano. Le chœur des enfants, lui, est détaché de tout. C’est la pureté, c’est une voix qui vient un peu du ciel. Ce que j’aime de cette œuvre pour le XXIe siècle, pour Montréal, c’est la combinaison entre le passé et l’actuel. J’adore également cette dualité entre le côté public et le côté privé (l’intime). La vision de Britten n’est pas très différente de celle que l’on pourrait avoir aujourd’hui.»

L’OSM joue War Requiem de Benjamin Britten avec les solistes Catherine Naglestad, Ian Bostridge et Russell Braun – les 25, 28 et 29 mai – Maison symphonique de Montréal.

À noter que le baryton américain Thomas Hampson a dû annuler sa participation aux concerts pour des raisons de santé. Il a été remplacé par le baryton canadien Russell Braun.

Pour obtenir des informations supplémentaires, on peut consulter le site internet de l’OSM.

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