Il arrive parfois que les décideurs à Montréal détruisent des bâtisses patrimoniales pour y construire quelques stationnements sans âme ou qu’ils fassent fi des racines francophones de la métropole en l’anglicisant toujours un peu plus. Il reste que la ville possède une histoire riche que l’organisme Montréal en histoire a décidé de rappeler par le biais d’un parcours interactif ambitieux et en plein air qui permettra aux visiteurs de redécouvrir des chapitres entiers du passé urbain, Cité Mémoire.
Conçu pour les célébrations du 375e, le projet projettera dès mercredi soir 19 tableaux animés sur les façades, murs, rues, trottoirs ou même sur le feuillage des arbres du Vieux-Montréal. En 2017, quatre nouveaux tableaux s’ajouteront à l’ensemble. Une visite organisée pour les médias a permis aux journalistes de voir le résultat de ces créations narrant des récits inspirés qui ont traversé les siècles.
Après avoir téléchargé une application sur un téléphone intelligent contenant des enregistrements vocaux réalisés par des comédiens, le public pourra déambuler pendant trois heures au cœur des interstices du passé montréalais d’où surgiront les visages d’illustres personnages ou de simples anonymes ayant marqué la psyché. Comme l’exposition à ciel ouvert n’est pas linéaire, chacun peut donc choisir l’ordre de la visite sur plus d’une trentaine d’époques.
Les mille et un visages
Aux origines du temps, une légende algonquine qui transforme la ruelle Saint-Dizier en rivière verdoyante. Plus loin, l’histoire de Marie-Josèphe Angélique, une esclave noire de Montréal qui sera exécutée en 1734 sur la base de simples soupçons. Ou bien ces milliers d’orphelins juifs rescapés des camps de concentration sous le régime nazi dont la plupart seront adoptés par des familles montréalaises après la Seconde Guerre mondiale. De la prohibition au féminisme, les mille et un visages de Montréal se déploient à travers 17 lieux du quartier.
Il y a des drames, des injustices et quelques instants lumineux aussi. Chaque épisode - dont certains ne manquent pas d’humour - revient sur les moments charnières, qu’il s’agisse de sport (Maurice Richard déménage) ou de musique (Suzanne de Leonard Cohen) en passant par les grandes réalisations architecturales (Les bâtisseurs de ville).
La proposition sur le poète Nelligan est un petit bijou d’émotion. On reste tout de même circonspect devant l’hommage au fameux Ouimetoscope, le tout premier cinéma en Amérique du Nord transformé en 2011 en condominium dans l’indifférence la plus totale.
On doit la mise en scène de ce trajet vidéographique unique au monde à Victor Pilon et Michel Lemieux, le duo derrière la production Toruk du Cirque du Soleil. Le dramaturge Michel Marc Bouchard, grand amoureux d’histoire, s’est occupé des textes. Le tout est livré avec des trames sonores immersives.
Cité Mémoire en chiffres:
140 techniciens et artisans
5 ans de travail
30 époques
425 costumes
41 jours de tournage
62 extraits de poèmes
89 projecteurs
100 kilomètres de câbles
17 lieux
19 tableaux (24 tableaux à partir de 2017)
18 millions de dollars de budget