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La transplantation de tête, bientôt réalité?

La transplantation de tête, bientôt réalité?
Université de Harbin

L'idée peut ressembler à un scénario de science-fiction digne de Frankestein, mais elle pourrait bientôt devenir réalité chez l'humain. Un neurochirurgien italien a greffé avec succès la tête d'un singe sur le corps d'un autre singe.

Un texte de Francine Plourde

Cette opération bien particulière a été réalisée par l'équipe du Dr XiaoPing Ren Ren de l'Université de Harbin en Chine, supervisée par le Dr Sergio Canavero. Les expérimentateurs ont laissé vivre le singe greffé une vingtaine d'heures avant de le débrancher.

À ce jour, ces expériences sur des souris ont été répétées des centaines de fois avec de bons résultats, explique le Dr Canavero.

Ce n'est pas la première fois qu'une greffe semblable est réalisée. En 1970, le neurochirurgien américain Robert White en avait effectué une, mais le primate paralysé n'a survécu que quelques jours.

Aujourd'hui, le médecin italien et son équipe chinoise estiment avoir amélioré la procédure. Ils affirment être parvenus, sur des souris, à ressouder les deux extrémités de moelle épinière sectionnées et ainsi redonner l'usage de leur membre aux rongeurs.

Des travaux controversés

Les recherches du directeur du groupe de neuromodulation de Turin soulèvent la controverse en Europe et en Amérique. C'est pour cette raison qu'il poursuit ses travaux en Chine.

Cette chirurgie se déroule en cinq étapes :

  • Il faut dans un premier temps refroidir la tête à 12 ou 15 degrés, afin de protéger le cerveau. Cette technique est utilisée en chirurgie cardiaque lorsque le coeur cesse de battre et n'irrigue plus le cerveau. Elle permet d'abaisser le métabolisme et éviter la mort des neurones.
  • Il faut ensuite couper la tête et les nerfs à l'aide d'une nanolame, bien plus tranchante qu'un scalpel médical actuel. La coupure doit être nette.
  • Il faut ensuite installer une circulation sanguine croisée entre donneur et receveur. Durant cette étape, les vaisseaux sanguins de la tête sont reliés aux vaisseaux du nouveau corps par des tubes en silicone.
  • À l'aide de la méthode Gemini, pratiquée actuellement seulement sur des souris, les chirurgiens fusionnent les nerfs et la moelle épinière de la tête. Des produits, comme du polyéthylène glycol et du chitosane, permettent cette fusion.
  • Il faut ensuite stimuler électriquement la moelle épinière. Une molécule, le perfluorocarbure, est également utilisée pour protéger les neurones.

Le prochain défi : l'humain

Le Dr Canavero se dit prêt à passer aux choses sérieuses et expérimenter la méthode sur des humains. Il a déjà un volontaire, Valery Spiridonov, un Russe qui souffre d'une maladie dégénérative. La Russie veut bien accueillir l'expérience, mais ceux qui soutiennent M. Spiridonov doivent amasser 20 millions de dollars, qu'ils tentent d'obtenir auprès de fonds privés.

D'ici là, le Dr Canavero et son équipe chinoise s'y préparent déjà en expérimentant sur des cadavres et des donneurs en état de mort cérébrale. Selon lui, la vraie chirurgie devrait se réaliser d'ici deux ans.

« Sur les bases de ce que nous savons de l'anatomie humaine, on estime que le patient [qui recevra la transplantation] restera endormi de deux à quatre semaines. Il pourra ensuite commencer la physiothérapie. Je prévois qu'en quelques mois, il ou elle pourra remarcher. »

— Dr Sergio Canavero

Peu de scientifiques peuvent se prononcer sur la technique parce qu'ils n'ont pas accès aux détails de la méthode. Les expériences n'ont pas été publiées en bonne et due forme dans des revues scientifiques.

Cependant, Sergio Canavero assure que ses travaux seront prochainement publiés dans deux revues universitaires, Surgery et CNS Neurosciences & Therapeutics.

Des questions éthiques

Cette éventuelle transplantation pour le moins spectaculaire comporte son lot de questions éthiques qui commencent avec la création du protocole de recherche et qui incluent, par exemple, le consentement du donneur, puisqu'il ne s'agit plus du don d'un seul organe. Et il y a aussi la reconnaissance de l'identité de la personne transplantée. Comment sera-t-elle perçue par ses proches, par la société? Comme un animal de foire?

Le Dr Canavero rejette ces considérations. Selon lui, si un patient qui doit mourir décide de tenter sa chance, cela ne regarde que lui et son médecin.

Écoutez le reportage de Francine Plourde à l'émission Les années lumière à ICI Radio-Canada Première dimanche, à 12 h 10.

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