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Huron-wendat: comment faire revivre une langue qui n'était plus parlée depuis un siècle? (VIDÉO)

Huron-wendat: comment faire revivre une langue? (VIDÉO)

Depuis cet automne, à Wendake, tout près de Québec, on enseigne le huron-wendat dans un centre de la petite enfance. C'est la dernière initiative d'une aventure qui a commencé il y a des années. Pour redécouvrir cette langue, il a fallu fouiller dans des manuscrits du 17e et du 18e siècle écrits par des missionnaires.

Un texte de Madeleine Blais-Morin

Les enfants de quatre ans du Centre de la petite enfance Orak savent compter jusqu'à dix en huron-wendat. Ça peut sembler peu, mais dans la communauté de Wendake, c'est un exploit qui cache des années d'effort, d'acharnement. Il a fallu redécouvrir cette langue entrée en hibernation au début des années 1900.

Comme tous les autres membres de la communauté, Marcel Godbout, un agent culturel au Conseil de la Nation huronne-wendate, ne parlait pas le wendat, enfant. Il sentait qu'il lui manquait quelque chose : « Ça représente notre identité et qui nous sommes. Pour moi, c'était essentiel de tenter, par différents projets, de reparler à nouveau notre langue qui était endormie pendant une centaine d'années ».

Les manuscrits des missionnaires

Mais comment ranimer une langue qui n'avait plus aucun locuteur?

Megan Lukaniec, une linguiste, épluche depuis près de dix ans des grammaires et des dictionnaires écrits par des jésuites et un frère récollet aux 17e et 18e siècles.

Selon elle, c'est en quelque sorte une ironie de l'histoire : « Les Jésuites n'avaient probablement pas prévu cette utilisation de ces documents-là. Mais, ce processus de revitalisation linguistique, c'est aussi un processus de réappropriation. Donc, on se réapproprie les outils des Jésuites pour faire revivre la langue ».

Megan Lukaniec croit qu'elle est probablement celle qui a le plus consulté ces manuscrits. Américaine, de descendance wendate, elle poursuit ainsi sa thèse de doctorat, mais surtout une mission : « Moi, je m'attendais à venir ici pendant un an pour faire un peu un travail sur la langue, mais en voyant l'ampleur du travail à faire, puis aussi tout ce que la langue pourrait nous dire sur notre culture, notre peuple et l'histoire de notre peuple, je ne pouvais pas arrêter ».

Elle cite en exemple les simples termes de parenté qui sont porteurs de culture. Les relations doivent être spécifiées, explique-t-elle, en parlant d'abord de la personne la plus âgée. Il est donc impossible de dire en wendat : « Je suis ta fille. » Il faut plutôt dire : « Tu es mère à moi. » Selon Megan Lukaniec, c'est une preuve de respect qui est encodée dans la langue.

Extrait du dictionnaire MS 67. Photo : Archives du Séminaire de Québec

Des réalités bien différentes ailleurs

Si, à Wendake, on tente de faire revivre la langue, ailleurs dans d'autres communautés, des langues sont encore parlées, mais pas moins menacées, selon Lise Bastien, la directrice générale du Conseil en éducation des Premières Nations, auquel sont associées 22 communautés autochtones du Québec.

« C'est le message qu'on lance depuis plusieurs années : ça ne prend que deux ou trois générations pour qu'une langue soit vraiment en péril. C'est très court. »

— Lise Bastien, directrice générale du Conseil en éducation des Premières Nations

Des langues sont enseignées dans les écoles de plusieurs communautés au Québec. Mais, selon Lise Bastien, le niveau de locution est très variable et les ressources clairement insuffisantes. « Je sais que les gens sont tannés d'entendre parler d'argent. Par contre, que ce soit pour le fait français ou anglais ou toutes les langues du monde, quand on se donne des moyens pour la survie de notre langue, qui est un marqueur identitaire important, ça prend des ressources financières. »

Des préoccupations qui sont bien loin des enfants du Centre de la petite enfance Orak, à Wendake. C'est tout naturellement que des mots en wendat s'insèrent dans leur vocabulaire.

Ce ne sont que quelques petits mots. Mais, dans la communauté, ils sont porteurs d'un grand espoir.

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