Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

«#Bitch – Les filles et la violence»: cruelles ados (PHOTOS)

#Bitch - Les filles et la violence : cruelles ados (PHOTOS)

Jeudi matin. École secondaire Villa Maria, quartier Notre-Dame-de-Grâce, à Montréal. Une petite foule de 85 jeunes filles occupe la chapelle du collège privé non-mixte pour visionner en primeur le documentaire #Bitch – Les filles et la violence, de Jasmin Roy, qui en est l’idéateur, le producteur au contenu, le concepteur et le co-réalisateur, aux côtés de Marie-Pascale Laurencelle.

Après avoir regardé le portrait de 90 minutes, qui les plonge dans une troublante réalité qui est souvent la leur, celle de l’intimidation entre filles, de l’hyper-sexualisation et de la violence amoureuse, les étudiantes sont invitées à prendre la parole.

L’une d’elles avoue bravement ne pas croire que de telles situations existent dans ses classes. Une autre, plus tard, la contredira, en affirmant que des camarades en ont déjà vécu, et que, dans une école de filles, l’intimidation psychologique est plus subtile, et donc, plus dangereuse. Une autre encore reconnaît l’importance de s’aimer soi-même, tandis que l’assistance en entier déclarera avoir le goût d’en apprendre plus sur les combats importants menés par les femmes au fil du temps.

Film et livre

C’est ce genre de discussion que Jasmin Roy et la maison de production Trio Orange espèrent susciter avec #Bitch – Les filles et la violence, que les téléspectateurs découvriront ce lundi, 26 octobre, à 16h, sur la chaîne MOI&cie (en rediffusion jeudi, 19h, vendredi, 8h, et dimanche, 13h).

Après avoir sonné l’alarme devant le fléau de l’intimidation dans les établissements scolaires, Jasmin Roy s’intéresse aujourd’hui plus particulièrement au visage féminin du harcèlement, souvent encore plus cruel que celui qui sévit chez les garçons. Souvent banalisée, insidieuse et sournoise, la brutalité chez les filles s’exprime souvent avec des mots, qu’ils soient sous-entendus ou balancés en plein visage, de la manipulation et de l’exclusion, et fait aussi mal qu’un coup de poing.

On espère qu’après avoir regardé #Bitch, les adolescentes oseront se questionner et demander de l’aide, si elles se reconnaissent dans ce triste hashtag, beaucoup plus présent qu’on ne pourrait le croire, comme en fait foi l’émission spéciale. Un livre du même titre, aussi écrit par Jasmin Roy et préfacé par Julie Miville-Dechêne, présidente du Conseil du statut de la femme, qui fait le tour du problème, en incluant quantité de témoignages de filles et de garçons et de statistiques alarmantes, sera en magasin le 28 octobre.

Le documentaire, lui, aborde deux sujets bien distincts, deux violences, celle qui oppose les filles et celle qui régit certaines relations de couple. Un condensé qui dilue parfois le message, mais trace un bon relief du genre d’échanges qui prévaut souvent chez nos enfants qui grandissent.

Insulte ou mot d’amour?

Le document illustre d’abord comment ces expressions vulgaires et réductrices, autrefois réservées aux films pornographiques ou aux engueulades salées entre adultes, que sont «salope», «pute», «conne», «bitch», «pétasse», «grosse truie» et autres «sympathiques» quolibets du genre, sont devenus fréquemment employées dans le vocabulaire des jeunes filles, et sont même maintenant utilisés comme des mots d’amour. «C’est ma pute, c’est mon amie», s’encensent les gamines, avec la plus grande affection du monde. Un phénomène relativement récent, beaucoup encouragé par la culture populaire et les chanteuses américaines à la Nicki Minaj, qui parsèment leurs textes d’allusions sexuelles peu flatteuses. Une tendance un brin ironique, aussi, car «jamais des garçons ne vont se dire : t’es mon fif, t’es ma tapette», souligne avec justesse Jasmin Roy. Celui-ci dénote par ailleurs que, si elles obtiennent souvent de meilleurs résultats, en classe, que leurs collègues masculins, les filles ont généralement une plus faible estime d’elles-mêmes, un autre non-sens.

#Bitch révèle à quel point les écolières peuvent être, verbalement, des «machines de destruction massive», en donnant la parole à différents spécialistes qui décortiquent les raisonnements des intimidatrices et des victimes. Envie et jalousie qui se manifestent par des agressions verbales, de la cyber-intimidation via les réseaux sociaux, des courriels haineux, du vandalisme sur les objets des autres, une «loi du silence» et une pression indue des pairs, des adolescentes racontent leur histoire. Certains témoignages, qui évoquent des tentatives de suicide ou de harcèlement sexuel, donnent froid dans le dos. N’importe quel parent sera touché par les paroles de ces jeunes personnes, à mi-chemin entre l’enfance et l’âge adulte, aux visages encore candides, qui ne vivent parfois rien de moins que l’horreur, dans des lieux comme l’école, où elles devraient pourtant se sentir en sécurité.

La caméra de #Bitch a suivi un groupe de jouvencelles, recrutées dans des maisons de jeunes, dans un week-end de sensibilisation, où des intervenants ont orchestré des ateliers pour faire comprendre aux participantes ce qu’est réellement l’intimidation. Ou plutôt, des intervenantes, devrions-nous dire, puisqu’un seul homme animait la rencontre ; le reste de l’équipe n’était constitué que de femmes afin que les petites soient à l’aise de s’exprimer sans barrières. On se rend également à l’école La Seigneurie de Beauport, où un programme de prévention, TAXI, a été implanté pour prévenir les assauts en tout genre, qu’ils soient verbaux ou physiques.

Générer la solidarité

Puis, #Bitch – Les filles et la violence étend son champ d’observation jusqu’aux rapports amoureux. Encore là, les propos sont troublants. Des fillettes de 14 ou 15 ans forcées de faire des fellations au terme d’un jeu «vérité ou conséquence», une amoureuse du même âge contrôlée par son copain jaloux ; quelques jours après qu’Ingrid Falaise ait dénoncé son propre passé teinté de dureté conjugale à Tout le monde en parle et sur plusieurs autres tribunes, on constate que le sujet est encore brûlant d’actualité, même si on le décrie depuis plusieurs années.

On se remémore ensuite le décès tragique de la jeune Gabrielle Dufresne-Élie, victime d’un homicide perpétré par son amoureux, le 8 juin 2014, et #Bitch se termine en évoquant l’importance de parler aux jeunes des pionnières qui leur ont défriché le chemin et se sont battues pour obtenir des droits aujourd’hui acquis.

Générer un mouvement de solidarité, et, pourquoi pas, changer le hashtag pour un mot-clic plus doux, voilà l’objectif ultime de #Bitch – Les filles et la violence. «Les filles doivent apprendre à se revaloriser du succès des autres, faire leur bout de chemin à ce niveau», plaide Marie-Pascale Laurencelle.

#Bitch – Les filles et la violence, le lundi 26 octobre, à 16h, à MOI&cie.

INOLTRE SU HUFFPOST

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.